Soupçons d’espionnage pour la Corée du Nord : ouverture d’une information judiciaire
Soupçons d’espionnage pour la Corée du Nord : ouverture d’une information judiciaire
Par Harold Thibault, Elise Vincent
Après quatre jours de garde à vue, l’administrateur du Sénat Benoît Quennedey a été déféré au parquet de Paris et devait être présenté à un juge d’instruction.
A l’issue de quatre jours de garde à vue au siège de la direction générale de la sécurité intérieure, l’administrateur du Sénat Benoît Quennedey a été déféré, jeudi 29 novembre dans l’après-midi, au parquet de Paris, pour être présenté à un juge d’instruction. Une information judiciaire du chef de « recueil ou livraison d’informations à une puissance étrangère susceptible de porter atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation » a été ouverte ce même jour, a appris Le Monde de source judiciaire. Le parquet a requis son placement sous contrôle judiciaire pour lui interdire certains contacts et l’exercice de ses fonctions, dont il a déjà été suspendu temporairement mardi par la présidence du Sénat.
M. Quennedey avait été placé en garde à vue dimanche soir, comme l’a révélé l’émission Quotidien, de retour d’un week-end chez ses parents en Bourgogne. Son appartement à Paris, son bureau au Sénat et le domicile de ses parents à Dijon ont été perquisitionnés lundi.
Une passion pour la Corée du Nord
L’association de l’amitié France-Corée qu’il préside défend le rapprochement de Paris avec Pyongyang, notamment l’établissement de relations diplomatiques formelles et la levée des sanctions qui pèsent sur le pays. M. Quennedey, 42 ans, a publié deux ouvrages sur la Corée du Nord et porte sur son régime un regard bienveillant, en opposition à ce qu’il jugeait être un biais dans le traitement du pays en Occident.
« Oui en Corée du Nord on a la santé gratuite, on a l’éducation gratuite, on a des systèmes d’appartements qui sont à très bas prix », disait-il en 2017 dans une librairie parisienne, sans juger nécessaire d’ajouter que 40 % de la population souffre de malnutrition et que le système de santé est épouvantable dans les campagnes. Le système politique, pas un totalitarisme mais à ses yeux une « adaptation locale de démocratie populaire », qui opère selon un « centralisme démocratique ».
Sa passion pour le pays date de ses années d’études, à Sciences Po puis à l’ENA, dans les années 90. Le bloc communiste s’est effondré ; la dynastie des Kim non seulement reste solidement attachée au pouvoir, et ce malgré une terrible famine, mais elle défie les Etats-Unis, notamment en développant sa dissuasion nucléaire. Et il est évident à ses yeux qu’elle est, du fait de la propagande américaine, incomprise du monde extérieur. Il s’est rendu huit fois dans le pays, dont la dernière en septembre pour les 70 ans de la fondation du régime.