Un écran informe les passants sur l’affaire Carlos Ghosn, le 21 novembre, à Tokyo. / KAZUHIRO NOGI / AFP

Dix jours supplémentaires. Répondant à une demande du parquet de Tokyo, le juge a accepté vendredi 30 novembre de prolonger la garde à vue de l’ex-président du constructeur japonais Nissan. Arrêté le 19 novembre, M. Ghosn reste donc en détention jusqu’au 10 décembre, soit vingt-deux jours au total, le maximum permis par la législation nippone dans le cadre de poursuites par le parquet (vingt-trois jours dans le cadre d’une une enquête policière). Il pourra alors :

  • être libéré sans charges,
  • de nouveau placé en garde à vue pour de nouvelles accusations,
  • inculpé. Dans ce dernier cas, il sera soit immédiatement incarcéré, soit relâché sous caution.

Les interrogatoires quotidiens et sans avocat vont se poursuivre pour M. Ghosn. A ce stade, le PDG de l’Alliance Renault-Nissan-Mitsubishi Motors est soupçonné d’avoir minimisé ses revenus chez Nissan d’un milliard de yens par an (7,7 millions d’euros) sur la période d’avril 2010 à mars 2015, dans des documents publics remis par la société aux autorités financières nipponnes. Or selon une source proche du dossier interrogée par l’Agence France-Presse, l’enquête montre que cette situation a débuté dès 2009 et perdurait encore l’an dernier. Les investigations pourraient donc théoriquement être étendues à d’autres années, ou bien à d’autres motifs.

Les investigations pourraient donc théoriquement être étendues à d’autres années, ou bien à d’autres motifs, Nissan reprochant à son ancien patron d’avoir commis des abus de biens sociaux, tels que l’usage de résidences de luxe aux frais de la compagnie.

Défendre le fonctionnement de la justice japonaise

En conférence de presse le 29 novembre, le procureur adjoint Shin Kukimoto a expliqué que la détention de M. Ghosn avait été décidée « parce que le tribunal a considéré qu’elle était justifiée », ajoutant que les procureurs « n’avaient aucune intention de le retenir plus longtemps que nécessaire ». Il a refusé de commenter les allégations selon lesquelles M. Ghosn et Greg Kelly, son conseiller américain, lui aussi arrêté le 19 novembre et soumis au même régime, ont nié les accusations portées contre eux.

Selon la presse nippone, qui alimente les fils d’actualité de rumeurs et d’informations, M. Ghosn aurait expliqué avoir voulu reporter le paiement de la moitié des rémunérations au moment de son départ à la retraite. M. Kelly aurait souligné la légalité des opérations évoquées par l’accusation. Il aurait consulté des experts juridiques indépendants et l’agence des services financiers (FSA, organisme gouvernemental) sur ces questions. Il aurait expliqué que les montants non signalés étaient destinés à rémunérer un rôle de conseil que M. Ghosn devait assurer après son départ de Nissan.

M. Kukimoto a profité de son intervention pour défendre le fonctionnement de la justice japonaise, très critiqué depuis l’arrestation de M. Ghosn et qui le fut notamment en 2013 par le comité onusien contre la torture ou, en 2015, par Amnesty international. « Les pays ont leur propre histoire et leurs propres systèmes juridiques. Il est inapproprié de critiquer le système japonais uniquement parce qu’il est différent de votre pays », a-t-il déclaré. « Le Japon est un pays respectueux des lois. C’est ainsi que fonctionne notre système juridique. Je n’y vois aucun problème. »

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