« Pupille » : l’adoption de X à Z
« Pupille » : l’adoption de X à Z
Par Thomas Sotinel
Elodie Bouchez, Sandrine Kiberlain et Gilles Lellouche tentent de donner chair à ce qui reste avant tout une enquête sur l’accouchement sous X.
Le premier entretien met face à face une fonctionnaire des services sociaux départementaux et une femme plus jeune ; la première annonce à la seconde qu’elle a été choisie parmi d’autres candidates pour être la mère d’un enfant né quelques jours plus tôt à Brest. La future mère perd tous ses moyens, demande l’âge du bébé, quelles sont ses chances à elle face aux autres demandeurs. On comprend dès cette première séquence que Pupille s’appuie sur une connaissance approfondie des mécanismes et des pratiques de l’adoption en France.
Ce souci d’exactitude est troublé par la physionomie des interlocutrices : la responsable, c’est Miou Miou, l’adoptante, c’est Elodie Bouchez. Tout au long du film on verra surgir des personnages définis par leur profession, par leur position dans le processus qui va de l’accouchement sous X à l’adoption. Presque tous sont interprétés par des acteurs connus, voire des vedettes, comme Gilles Lellouche qui joue le père d’accueil chez qui Théo – c’est ainsi qu’a été nommé l’enfant – attend la fin de la procédure, ou Sandrine Kiberlain qui suit le dossier.
Un délai avant le bouclage d’un dossier
Malgré le talent et l’engagement des actrices et des acteurs, ces deux versants du projet restent séparés, sans doute par la raideur du scénario, par le systématisme de la mise en scène qui recourt aux très gros plans pour forcer l’intimité avec les personnages. Quand le film s’aventure, timidement, sur le terrain de la fiction en s’éloignant de son thème central (les duos entre Gilles Lellouche et Sandrine Kiberlain au moment où l’histoire approche de sa conclusion) ce qui devrait être une respiration ne paraît qu’un délai avant le bouclage d’un dossier.
Cette mise en avant du sujet du film, fût-ce aux dépens de l’entreprise cinématographique elle-même, est une pratique ancienne du cinéma français. Au temps d’André Cayatte ou d’Yves Boisset, il s’agissait de mettre en lumière ce qui faisait scandale, ce qui divisait. Depuis quelques années on voit se multiplier les longs métrages qui célèbrent telle institution, telle pratique – la justice des mineurs, la gestion publique des greffes d’organe… C’est sans doute le signe qu’elles sont menacées, puisque le besoin de les défendre se fait sentir.
PUPILLE – Bande-annonce officielle – Jeanne Herry (2018)
Durée : 02:04
Film français de Jeanne Herry, avec Gilles Lellouche, Sandrine Kiberlain, Elodie Bouchez, Olivia Côte (1 h 55). Sur le web : www.facebook.com/STUDIOCANAL.FRANCE, www.facebook.com/STUDIOCANAL.FRANCE