Manifestation des « gilets jaunes » autour de la place de l’Etoile. La brigade de sapeurs-pompiers de Paris intervient pour éteindre des voitures en feu, avenue Kléber. / JULIEN MUGUET POUR LE MONDE

Trois fois plus d’agressions en dix ans : depuis quelques années, les pompiers envoyés secourir les personnes sont de plus en plus exposés aux violences provoquées par les détresses sociales, les comportements individualistes ou les excès d’alcool et de drogues.

Le nombre d’agressions déclarées par les sapeurs-pompiers en intervention a grimpé de 23 % en 2017, après 17,6 % en 2016, selon les derniers chiffres publiés mercredi 19 décembre par l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP) du ministère de l’intérieur.

Et l’année 2018 semble prendre le même chemin : à Paris et en petite couronne, 293 pompiers ont été agressés sur les onze premiers mois de l’année, contre 198 sur toute l’année 2017, selon la brigade de sapeurs-pompiers de Paris (BSPP). « Ces agressions sont d’autant plus inacceptables qu’elles peuvent mettre en danger les vies des personnes que les pompiers viennent secourir », souligne le capitaine Guillaume Fresse, de la BSPP.

Si ces violences restent relativement rares (2 813 pompiers agressés sur 4,7 millions d’interventions), leur hausse continue inquiète la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France (FNSPF), qui réclame des mesures « fortes » de l’Etat pour mieux protéger ses quelque 147 000 troupes. En 2017, le nombre d’agressions en France a atteint 2 813 (soit en moyenne six pompiers agressés pour 10 000 interventions), contre 2 280 en 2016 (5 pour 10 000). Le nombre de sapeurs-pompiers agressés pour 10 000 interventions en 2017 a été le plus élevé en Nouvelle-Aquitaine (14), en Bourgogne - Franche-Comté (13), dans le Grand Est (9) et les Hauts-de-France (8).

Le nombre d’agressions déclarées a notamment explosé à Paris et Marseille, où les pompiers sont militaires : + 74 % pour ceux de la BSPP et + 68 % pour ceux du bataillon de marins-pompiers de Marseille (BMPM).

Détresse sociale, alcool ou stupéfiants

« Les hausses significatives de ces dernières années sont notamment le fait de personnes en détresse sociale, fortement alcoolisées ou sous l’emprise de stupéfiants », explique à l’AFP le capitaine Fresse, de la BSPP. « Ces hausses ne sont pas anodines. Elles reflètent ce que l’on perçoit dans les interventions à travers le territoire. On est moins respectés lors des opérations de secours, avec des gens insatisfaits, aux comportements de consommateurs, des réactions épidermiques très fortes », abonde Eric Florès, directeur de la communication de la FNSPF.

Les agresseurs sont soit les personnes qu’ils viennent secourir, soit leurs proches, soit des témoins qui passaient par là. En septembre 2018, pour la première fois depuis près de dix ans en France, un pompier est mort tué par la personne qu’il était venu secourir : un pompier de la BSPP de 27 ans, poignardé dans le Val-de-Marne.

Mesures réclamées au gouvernement

La FNSPF avait alors appelé le gouvernement à faire en sorte que les forces de l’ordre soient systématiquement déployées aux côtés des pompiers lors des interventions jugées à risques. La FNSPF lui réclame d’autres « mesures fortes » pour anticiper les risques, comme le maintien du réseau pompier à travers tout le territoire et la mise en place de centres départementaux de réception des appels d’urgence avec un seul numéro (le 112) commun aux pompiers, à la police, à la gendarmerie et au SAMU.

En 2017, 62 % des sapeurs-pompiers agressés ont déposé plainte, contre 59 % en 2016. Des pompiers hésitent à le faire dans les zones rurales, de peur des représailles : pour le systématiser, la FNSPF demande également au gouvernement de faire en sorte qu’ils puissent le faire anonymement. Ainsi qu’une politique pénale de tolérance zéro pour les agresseurs de pompiers.