L’Irak a jugé plus de 600 étrangers en 2018 pour appartenance à l’Etat islamique
L’Irak a jugé plus de 600 étrangers en 2018 pour appartenance à l’Etat islamique
Le Monde.fr avec AFP
Trois Français – deux femmes et un homme – ont été condamnés à la prison à vie. Une Allemande a également été condamnée à la peine capitale, de même qu’un Belge et un Russe.
La cour de Tel Keif, en Irak. / Maya Alleruzzo / AP
Quelque 616 étrangers ont été jugés en Irak en 2018 pour appartenance à l’organisation Etat islamique (EI), a fait savoir, lundi 31 décembre, la justice irakienne, ajoutant qu’une centaine d’autres devaient encore comparaître. Au total, « 508 d’entre eux ont été condamnés en vertu de la loi antiterrorisme » qui prévoit jusqu’à la peine de mort, a détaillé dans un communiqué le juge Abdel Settar Bayraqdar, porte-parole du Conseil supérieur de la magistrature.
Parmi ces personnes jugées, on trouve une grande majorité de femmes : 466 contre 42 hommes, ainsi que 108 mineurs – 31 garçons et 77 filles. En outre, « 99 personnes, dont 73 femmes » subissent encore des interrogatoires du parquet ou ont vu leur procès s’ouvrir récemment, selon le juge Bayraqdar.
Trois Français condamnés
La plupart des condamnées sont turques ou originaires des anciennes Républiques de l’Union soviétique. Une Allemande a également été condamnée à la peine capitale, de même qu’un Belge et un Russe. En outre, trois Français – deux femmes et un homme – ont été condamnés à la prison à vie.
Parmi eux, le cas de Mélina Boughedir, capturée par les forces irakiennes à Mossoul le 8 juillet 2017, avait été particulièrement symptomatique du casse-tête diplomatique, sécuritaire et juridique que représente le sort des ex-djihadistes français et de leur famille dans la zone irako-syrienne. Capturée avec ses quatre enfants mineurs – dont trois ont été rapatriés en France –, Mme Boughedir avait été condamnée à sept mois de prison pour entrée illégale sur le territoire irakien, le 19 février. Aucune accusation pour terrorisme n’avait été retenue par le juge d’instruction.
Mais, lors de l’examen de l’appel – automatique en Irak –, à la fin du mois de mars, le Conseil suprême des juges a ordonné un nouveau procès et a décidé de requalifier les charges pesant contre la Française pour y ajouter l’accusation d’appartenance à l’organisation Etat islamique. La Cour de cassation avait estimé que Mélina Boughedir avait suivi son mari « en connaissance de cause ». La jeune femme de 27 ans avait été condamnée en juin à la prison à perpétuité par la cour pénale de Bagdad. Ses avocats français, William Bourdon, Martin Pradel et Vincent Brengarth, se sont dits « soulagés qu’elle n’ait pas été condamnée à mort ».
20 000 arrestations
Depuis fin 2017, l’Irak a officiellement déclaré la « victoire » sur l’Etat islamique. Mais depuis lors, le pays continue de juger quasi quotidiennement des accusés parmi les quelque 20 000 personnes arrêtées pour suspicion de terrorisme depuis la percée djihadiste de 2014.
Deux tribunaux jugent les affaires de terrorisme en Irak, l’un à Tel Keif, près de Mossoul (nord) – l’ancienne « capitale » irakienne du « califat » autoproclamé de l’EI –, et l’autre à Bagdad, où la Cour pénale centrale s’occupe notamment des étrangers et des femmes. Parmi elles, beaucoup avaient suivi leurs époux avec leurs enfants, dont certains sont toujours en attente de rapatriement d’Irak, alors que leur mère est en prison. Dimanche, trente enfants russes sont toutefois arrivés à Moscou dans une nouvelle opération d’évacuation d’enfants vers leur pays d’origine.