Les objets militaires anciens, un marché en évolution
Les objets militaires anciens, un marché en évolution
LE MONDE ARGENT
Les ventes d’armes du XXe siècle sont plus réglementées, mais les souvenirs historiques ont leurs aficionados.
Paire de pistolets Cizeron datant du XVIIIe-XIXe siècle, estimée entre 4 500 et 5 000 euros, en vente à Lyon le 22 janvier. / Etude Bremens et Belleville
Le 12 janvier au Mans, le 14 au Puy-en-Velay, le 22 à Lyon, le 24 à Laval… Les ventes d’objets militaires anciens, baptisés « militaria », sont légion en ce début d’année. « Je préfère parler de ventes de souvenirs historiques, précise Nicolas Dugoujon, expert de la vente de Lyon. Le militaria a longtemps été le parent pauvre du marché de l’art, mais, contrairement à bien d’autres univers, il n’a pas baissé, et recrute même de nouveaux amateurs, de souvenirs historiques justement. »
Ce segment de marché comprend les armes bien entendu, mais également les décorations, les éléments d’uniformes, les sabres, des documents… Les collectionneurs s’intéressent à l’ensemble du passé militaire. Avec une constante : chaque nationalité se focalise avant tout sur sa propre histoire. Une exception toutefois : le Premier Empire français. « C’est pratiquement le seul marché international avec des collectionneurs partout dans le monde. Le dernier sabre de la garde impériale dont j’ai fait l’expertise a été acquis par un Sud-Américain », précise Nicolas Dugoujon.
Un intérêt renouvelé grâce aux jeux vidéo
Du côté des amateurs français, le XXe siècle est à l’honneur. Avec de nouveaux arrivants, qui s’intéressent aux objets militaires par le biais de revues, d’émissions de télévision, mais aussi par le jeu vidéo ! « Medal of Honor ou Call of Duty montrent des armes très bien faites et fidèles à l’esprit d’origine. Ils font d’ailleurs appel à des experts… Et du coup, ces jeux suscitent parfois des vocations », s’amuse Nicolas Dugoujon.
Parmi les objets les plus recherchés, les souvenirs des troupes d’élite, à l’image des équipements de parachutistes américains du Débarquement, ceux des « As » de l’aviation (ce titre étant obtenu après cinq victoires en combat aérien), ou encore tout ce qui a trait à la Résistance et à la Libération, dont les croix de l’ordre de la Libération. Les souvenirs de la première guerre mondiale ont, quant à eux, connu un regain d’intérêt du fait des commémorations récentes.
Les budgets engagés pour se lancer dans une collection militaria sont extrêmement divers. « Les mêmes collectionneurs sont à la fois à la recherche d’objets de prix et d’objets plus courants relatifs à la même période. Tout se vend dans ce domaine », insiste Philippe Casal, commissaire-priseur au Puy-en-Velay. Certains objets se vendent quelques dizaines d’euros, à l’image d’une gamelle que l’on trouve à moins de 20 euros. Mais il faut compter entre 150 et 200 euros pour un képi de général des années 1970, entre 500 et 600 euros pour un sabre du Premier Empire (15 000 à 20 000 euros s’il vient de la garde impériale), ou 800 à 1 000 euros pour un fusil réglementaire à silex du Premier Empire, modèle 1777 modifié an IX.
Législation complexe
Il est en revanche plus difficile de donner une cote pour les armes à feu militaires du XXe siècle. Certaines armes anciennes ayant été utilisées lors d’attentats terroristes en France, la loi s’est récemment durcie. Nicolas Dugoujon résume à grands traits cette législation complexe concernant la vente des armes anciennes : « Pour celles qui datent d’avant 1900, c’est permis ; après 1900, c’est interdit. »
Un système de neutralisation (le mécanisme et les pièces sont soudés) effectué par le Banc national d’épreuve des armes de Saint-Etienne permet néanmoins de vendre des armes postérieures à 1900, mais cette condition vient d’être complétée, en août, par l’obligation, pour le détenteur, d’une autorisation spécifique (à obtenir en préfecture). « Concrètement, le marché des armes à feu anciennes du XXe siècle va s’effondrer, le processus devient trop complexe », prédit Nicolas Dugoujon.