« Another Day of Life » : la guerre d’Angola en deux dimensions
« Another Day of Life » : la guerre d’Angola en deux dimensions
Par Thomas Sotinel
La tentative de porter à l’écran le récit du reporter Ryszard Kapuscinski passe par l’animation, au risque de la simplification.
Comment faire un film d’une révolution ? La fin d’une colonie portugaise et l’arrivée au pouvoir du Mouvement populaire de libération de l’Angola (MPLA), en 1975, par exemple. En ne filmant pas, répondent Raul de la Fuente et Damian Nenow. Leur adaptation du récit des premiers jours d’une guerre qui devait durer 27 ans par le reporter et écrivain polonais Ryszard Kapuscinski (D’une guerre l’autre – Angola, 1975, Flammarion, 2011) emprunte la voie de l’animation. Au risque d’aplatir la perspective, de simplifier non seulement le récit rapporté par l’auteur au risque de sa vie, mais encore sa position.
Envoyé spécial d’une agence d’Etat polonaise, Kapuscinski pouvait se prévaloir de son statut de membre de l’appareil d’un Etat du bloc socialiste. En Angola, il a utilisé cette position pour faire son travail de journaliste, passant les lignes de défense de Luanda pour arriver jusqu’aux positions avancées du MPLA menacées par la prochaine intervention des forces du régime d’apartheid sud-africain. Comme toutes les informations véhiculées par Another Day of Life, celles-ci sont simplement énoncées, sans qu’elles nourrissent la complexité d’un personnage, d’une situation.
Hollywood, version années 1970
Kapuscinski a raconté ce combat inégal – dont l’équilibre sera rétabli par l’arrivée de troupes cubaines – et la transformation d’un conflit de relativement basse intensité (celui qui opposait les forces indépendantistes à la puissance coloniale) en guerre totale, avec artillerie et aviation. Il l’a fait à travers quelques personnages – un journaliste angolais né au Portugal, une commandante de la guérilla – que de la Fuente et Nenow ont portés à l’écran par le jeu de la rotoscopie (reproduction graphique de prises de vue d’êtres animés). Le procédé introduit forcément une distance dont les réalisateurs ne savent pas tirer profit. Les effets spectaculaires, la langue choisie (l’anglais) pour les dialogues ramènent le film vers Hollywood, version années 1970. C’est chronologiquement exact, mais moins heureux si l’on se soucie d’histoire.
Bande Annonce Another day of life
Durée : 01:45
Film d’animation allemand, belge, espagnol et polonais de Raul de la Fuente et Damian Nenow (1 h 26). Sur le Web : www.anotherdayoflifefilm.com, www.kanakifilms.com/animation-films.html et www.gebekafilms.com/gebeka.php