Air France : le syndicat des pilotes valide la politique de montée en gamme de la direction
Air France : le syndicat des pilotes valide la politique de montée en gamme de la direction
LE MONDE ECONOMIE
Le SNPL a donné son aval à l’accord négocié avec les responsables de la compagnie, qui permet à ceux-ci de dérouler leur nouvelle stratégie, axée sur le « premium ».
Sur le tarmac de l’aéroport Roissy-Charles de Gaulle, au nord de Paris, en août 2018. / JOEL SAGET / AFP
Sans surprise, le conseil du Syndicat national des pilotes de ligne (SNPL), réuni mercredi 23 janvier, a donné son assentiment à l’accord négocié par le SNPL avec la direction d’Air France. Pour être approuvé, ledit accord devra être soumis, d’ici à la mi-février, au vote des adhérents. Ce scrutin ne devrait être qu’une formalité. Le rapprochement avec le SNPL illustre la lune de miel qui semble s’installer entre Benjamin Smith, le nouveau directeur général d’Air France-KLM, et les différentes catégories de personnels de la compagnie.
L’accord paraît équilibré, et ce pour les deux parties. Les navigants obtiennent l’augmentation qu’ils réclamaient depuis de longs mois. Ils revendiquaient une hausse de leur rémunération de 4,7 %. En définitive, ils devront se contenter, selon nos informations, de « 2 % à 3 % ». Cela s’ajoute aux 4 % – versés en deux fois –, déjà accordés par la direction à tous les personnels.
En outre, Air France a aussi accepté de revaloriser les primes de vol de près de 20 euros. Une manière de rééquilibrer en partie les rémunérations des commandants de bord de moyen-courriers et ceux de long-courriers. Enfin, les pilotes ont approuvé une plus grande souplesse dans la gestion de leurs effectifs, notamment à l’occasion des départs en retraite. A partir de 60 ans, les navigants recevront une incitation financière pour étendre leur préavis de départ à douze mois au lieu de trois mois.
Après avoir apaisé le climat social et déminé le terrain sur le plan salarial, l’accord permet désormais à la direction de dérouler sa stratégie, axée sur le « premium ». En pratique, la compagnie va cibler principalement les passagers « à haute contribution », c’est-à-dire ceux qui achètent les places les plus chères en première classe, en classe affaires et en Premium Economy. Une démarche fondée sur le constat, comme le note Jean-Louis Barber, ancien président du SNPL, « qu’Air France est principalement une compagnie de grands comptes ». Cela signifie qu’elle est privilégiée par les entreprises hexagonales pour transporter leurs cadres dirigeants.
Rénovation des cabines
En vue d’accroître ses recettes, notamment auprès de cette clientèle de choix, Air France va rénover les cabines, en ajoutant des fauteuils dans les classes business et Premium Economy au détriment de la classe économie. Pour mettre en place cette stratégie, M. Smith a obtenu l’accord du SNPL afin d’en finir avec l’indicateur SKO (sièges au kilomètre offert) et lui préférer le certificat de navigabilité (CDN).
Le SKO permettait jusqu’à maintenant de comparer l’activité d’Air France avec celle de sa filiale KLM, en calculant le nombre de sièges et le nombre de kilomètres parcourus par les avions de chacune des deux compagnies. Le CDN fixe le nombre maximal de sièges autorisés dans un avion. Avec la mise en œuvre de ce nouvel indice, c’est la rentabilité des avions d’Air France et de KLM qui sera désormais mesurée.
Selon l’accord, l’offre de fauteuils Premium d’Air France sera augmentée d’un peu moins de 10 % au cours des années à venir. Cette stratégie accentuera la différence de positionnement des deux compagnies. Aujourd’hui, KLM, qui opère uniquement des avions avec des cabines biclasse, business et économie, offre environ 25 % de sièges en plus qu’Air France, avec des cabines allant jusqu’à quatre classes : première, business, Premium Economy et économie.
Toutefois, les avions d’Air France rapportent plus, car leur recette par siège est supérieure. Pour accepter d’en finir avec l’indicateur SKO, les pilotes d’Air France ont obtenu une garantie de croissance de la flotte axée sur celle du produit intérieur brut français. A chaque fois qu’il dépassera 1 %, la flotte sera augmentée d’un avion.
Dans ce ciel sans nuages, des incertitudes demeurent. M. Smith n’a pas encore fait savoir où il allait trouver les centaines de millions d’euros nécessaires au financement des augmentations de salaires et à la montée en gamme. De plus, cette course aux passagers premium pourrait être contrariée en cas de nouvelle crise économique.