« Gilets jaunes » : un acte XII dédié aux « gueules cassées » des manifestations
« Gilets jaunes » : un acte XII dédié aux « gueules cassées » des manifestations
Les manifestations prévues samedi 2 février à Paris et dans plusieurs villes seront centrées sur un hommage aux blessés et la dénonciation des violences policières.
Le défilé des « gilets jaunes » à Paris, le 26 janvier 2019. / ALAIN JOCARD / AFP
Des « gueules cassées » en tête de cortège à Paris, des manifestants qui défilent avec des bandages en guise de solidarités avec les victimes… L’acte XII des « gilets jaunes », prévu samedi 2 février, sera centré sur un hommage aux blessés et la dénonciation des violences policières.
Celles-ci sont devenues l’une des préoccupations centrales de ce mouvement qui dure depuis le 17 novembre 2018, aux côtés des revendications habituelles autour de la baisse des taxes, la hausse du pouvoir d’achat, le référendum d’initiative citoyenne… En témoignent les vidéos de violences policières qui sont échangées sur les réseaux sociaux. En témoignent, aussi, les réactions suscitées par la blessure à l’œil de Jérôme Rodrigues le 26 janvier à Paris, l’une des figures du mouvement devenu l’icône des nombreux manifestants blessés, parfois grièvement, depuis le début de la contestation.
A Paris, une grande marche pour les blessés
A Paris, des « gilets jaunes » appellent à une marche pour mettre à l’honneur les victimes des violences policières. « Il y a énormément de blessés, mais on n’en tient jamais compte ; on ne les voit pas aux infos », déplorait, mercredi sur RMC, Eric Drouet, l’un des leaders du mouvement, appelant à une « marche pour les blessés » samedi. En dépit de leurs dissensions, M. Drouet manifestera à Paris aux côtés de deux autres figures médiatiques des « gilets jaunes », Priscillia Ludosky et Maxime Nicolle.
Un groupe Facebook intitulé « Acte XII : la grande marche des blessés » annonce une manifestation « déclarée » de la place Félix Eboué (12e arrondissement) jusqu’à la place de la République. En tête de cortège, des « blessés protégés par un cordon de bénévoles », puis des manifestants défilant avec « des pansements sur l’œil, des bandages, du rouge sur les gilets jaunes en guise de sang »…
Principale revendication : « en finir avec la force démesurée qu’impose le gouvernement pour faire taire la contestation, peut-on lire sur la page Facebook. La France est un pays où manifester est un droit. Personne ne devrait avoir peur de défendre ses idées. » Les manifestants réclameront notamment l’interdiction des LBD, des grenades lacrymogènes GLI-F4 et des grenades de désencerclement DMP.
« Il est temps que ces armes de guerre ne soient plus utilisées dans le cadre du maintien de l’ordre », avait déclaré, mercredi lors d’une conférence de presse, Me Arié Alimi, l’avocat de plusieurs blessés. Vendredi, le Conseil d’Etat a rejeté les demandes de suspension de l’usage des LBD.
Des manifestations dans plusieurs grandes villes
A Marseille, en prélude au défilé sur le Vieux-Port, des « gilets jaunes » ont prévu d’ériger un « mur de la honte » en souvenir des quatorze personnes mortes (onze en France, trois en Belgique) en marge des manifestations. Des « gilets jaunes » se rassembleront également samedi à Nancy « contre les violences policières », et dimanche à Nantes en hommage aux blessés. A Valence (Drôme), où Emmanuel Macron s’était déplacé le 24 janvier, les autorités attendent « entre 8 000 et 10 000 manifestants » pour une « marche régionale » prévue samedi après-midi.
A Toulouse, l’un des épicentres de la mobilisation, une manifestation déclarée est prévue, selon France 3 Occitanie. Un parcours a été « négocié » en préfecture à l’initiative de trois « gilets jaunes » afin de « sécuriser la manifestation ». D’autres appels ont été lancés sur les réseaux sociaux : l’un annonce une « action surprise, pacifiste mais offensive » ; un autre demande aux manifestants de venir avec un œil caché en hommage aux blessés. Une assemblée citoyenne est également prévue dimanche pour « structurer le mouvement » dans une salle prêtée par la municipalité.
A Bordeaux, des « gilets jaunes » qui se relaient tous les jours sur le rond-point proche du CHU pour apporter leur soutien aux manifestants blessés appellent à une grève générale à partir de vendredi, selon l’édition bordelaise de 20 Minutes. Par ailleurs, un collectif contre les répressions policières a été officiellement lancé jeudi soir, pour aider les personnes blessées en lien avec des avocats, toujours selon le quotidien.
Une longue liste de manifestants blessés
Selon le collectif militant Désarmons-les et le journaliste indépendant David Dufresne, les « gilets jaunes » gravement blessés sont plus d’une centaine – des manifestants surtout, mais aussi des journalistes et passants. Une majorité a été victime de tirs de LBD, dont une vingtaine à l’œil, la plupart éborgnés, selon eux.
De son côté, le gouvernement n’admet que quatre cas graves de blessure à l’œil et défend des armes qui restent nécessaires pour éviter des contacts directs violents et davantage de blessures entre manifestants et forces de l’ordre. « Je veux bien expertiser la totalité de nos armes de défense, a concédé le ministre de l’intérieur, Christophe Castaner, sur BFM-TV mardi. Ce que je sais, c’est que si on les retire à nos policiers, il leur reste quoi ? Il leur reste le corps-à-corps ou leur arme de service. Je ne souhaite pas qu’ils utilisent leur arme de service et je souhaite éviter le corps-à-corps. »
Une mobilisation en baisse ?
Samedi 26 janvier, le ministère de l’intérieur a recensé 69 000 « gilets jaunes » mobilisés, dans des rassemblements parfois accompagnés de violences, soit légèrement moins que le 19 janvier. Ils étaient alors 84 000, dont 7 000 à Paris, selon les autorités – des chiffres contestés par les « gilets jaunes ». Plutôt en baisse à Paris, la mobilisation est restée soutenue dans plusieurs grandes villes de province, notamment Toulouse et Bordeaux.
Pour poursuivre la mobilisation, la CGT a appelé à une « grève générale » le 5 février, un appel relayé par Eric Drouet, mais aussi le chef de file de La France insoumise (LFI) Jean-Luc Mélenchon, Olivier Besancenot (NPA, Nouveau Parti anticapitaliste) et le Parti communiste français (PCF).
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