Avec Wargroove, disponible vendredi 1er février sur PC, Switch et Xbox One, le studio britannique Chucklefish convoque une sorte d’âge d’or du jeu vidéo, une période d’insouciance et de paix qui aurait duré, selon les historiens (un peu) et l’auteur de ces lignes (surtout), de 2001 à 2008.

Pendant ces années frivoles et avec la régularité d’un coucou suisse, Nintendo et son partenaire Intelligent Systems gratifiaient une année sur deux les amateurs de tactique en tour par tour de nouveaux épisodes d’Advance Wars.

Tous les deux ans, les joueurs retrouvaient leurs petits soldats comme on retrouve de vieux amis, enfilant les missions comme on enfile de confortables chaussons. Les règles n’ont jamais varié d’un iota : deux camps jouent alternativement. Une unité peut à chaque tour se déplacer et effectuer une action : attaquer ou capturer un bâtiment. Les bâtiments capturés permettent de gagner de l’argent, qui peut ensuite être dépensé pour acheter de nouvelles unités.

Le joueur qui a compris cet écosystème basique a tout compris et peut désormais s’amuser seul lors d’une longue campagne scénarisée ou en escarmouche contre des amis.

Et puis un jour, les petits soldats et les chaussons ont disparu. La série Fire Emblem, assez proche dans l’esprit, a pris le relais, mais la belle simplicité d’Advance Wars et ses dimensions stratégiques et « gestion » semblaient perdues à jamais.

Des allures d’échiquier

« Genesis does what nintendon’t » (la Mega Drive fait ce que Nintendo ne fait pas), lisait-on dans les publicités anglo-saxonnes il y a bientôt trente ans. On pourrait dire qu’aujourd’hui Chucklefish fait ce que Nintendo et Intelligent Systems ne font plus, à savoir satisfaire les fans d’Advance Wars, depuis trop longtemps abandonnés.

Wargroove n’invente pas grand-chose et, à vrai dire, on aurait plus vite fait de vous dire de relire le début de cet article que de vous en expliquer le principe. Il propose les mêmes affrontements en tour par tour, sur les mêmes champs de bataille aux allures d’échiquier, avec les mêmes unités aux forces et faiblesses complémentaires mais transposés dans un contexte historique médiéval fantastique.

Oubliez les tanks : ici, les lanciers l’emportent face aux chevaliers, les spadassins trottinent pour capturer des villes, les harpies s’occupent de la supériorité aérienne tandis que les tortues géantes croisent à quelques encablures des côtes.

Les camps se démarquent davantage par leurs généraux et les terrains où on les rencontre que par leurs unités. / Chucklefish

Unités interchangeables

Alors oui, les fulgurances et les nouveautés sont rares dans Wargroove, mais elles sont à chaque fois le goût de l’évidence. A l’image des héros, des unités spéciales que l’on contrôle directement. Les généraux qui accompagnent leur troupe sur le champ de bataille ont tous une compétence spéciale, un groove qu’ils chargent en se battant, et qu’ils peuvent ensuite déchaîner pour, selon les cas, soigner leurs alliés, téléporter une unité ou encore dresser des barrières végétales.

Malin : la mort du général, et c’est la reddition automatique. Il faut dès lors trouver le juste équilibre entre lancer dans la mêlée son unité la plus puissante, mais aussi la protéger pour éviter de la perdre sur une faute d’inattention.

Au rang des nouveautés, signalons aussi l’astucieux système de coups critiques (chaque type d’unités possède une botte secrète qui ne se déclenche que si certaines conditions sont respectées) ou encore les formats de missions alternatifs (escorte, fuite, errance dans des marécages sordides) qui offrent des respirations bienvenues entre deux batailles rangées bien retorses.

En revanche, si quelque chose ne varie pas d’une mission à l’autre, c’est la nature des forces en présence. Humains du royaume de Carmina, morts-vivants de Felheim, Floriens de la forêt, ou encore peuple du désert du Chant d’Eden : tous disposent des vingt unités aux caractéristiques strictement interchangeables. Et même si leurs physiques et leurs noms diffèrent d’un camp à l’autre, ces petites astuces ne font pas illusion longtemps.

C’est peut-être là la différence entre ce jeu Chucklefish et un authentique titre Nintendo : si le géant japonais remettait aujourd’hui le couvert avec un nouvel Advance Wars, il y a fort à parier que Nintendo révolutionnerait la recette originale. Chucklefish, lui, ne fait que passer le plat quelques minutes au micro-ondes. Le résultat est donc sans grande surprise – mais on s’en contentera largement.

Il est possible de créer ses propres campagnes et scénarios et de les échanger avec ses amis. / Chucklefish

En bref

On a aimé :

  • Les combats tactiques en tour par tour qui rappellent énormément Advance Wars ;
  • Le pixel art élégant qui rappelle beaucoup Advance Wars ;
  • Tout le reste qui rappelle totalement Advance Wars ;
  • Quelques nouveautés qui ne rappellent pas Advance Wars et qui s’adaptent très bien à son principe ;
  • Sur Switch, tout aussi adapté au jeu mobile que sur grand écran ;
  • Pouvoir adapter le niveau de difficulté (par défaut très exigeant).

On n’a pas aimé :

  • Les unités de chaque camp sont finalement largement interchangeables ;
  • Les animations charmantes mais répétitives à chaque combat. On peut heureusement les désactiver ;
  • Perdre son général (et la partie) à cause d’une faute bête d’inattention mais, que voulez-vous, c’est de notre faute après tout, on fera attention la prochaine fois.

C’est plutôt pour vous si…

  • Vous aimez Advance Wars mais vous les avez tous terminés cinq fois ;
  • Vous aimez Fire Emblem mais vous trouvez que ça manque de grosses tortues ;
  • Vous aimez les échecs mais vous trouvez que ça manque de magie.

Ce n’est plutôt pas pour vous si…

  • Vous possédez une PlayStation 4, sur lequel le jeu n’est pas disponible, mais pas de panique ça devrait venir.

La note de Pixels :

3 Advance Wars/4