Les Etats-Unis ordonnent à un groupe chinois de céder Grindr, l’application de rencontres gay
Les Etats-Unis ordonnent à un groupe chinois de céder Grindr, l’application de rencontres gay
Par Morgane Tual
Ils estiment que les données sensibles dont dispose Grindr, rachetée par un groupe chinois en 2016, ne sont pas en sécurité.
L’application GrindR revendiquait 27 millions d’utilisateurs en 2017. / ALY SONG / REUTERS
Les données personnelles des utilisateurs de Grindr, l’application de rencontres gay, sont-elles en sécurité ? Les Etats-Unis en doutent fortement et estiment même qu’elles sont en mesure de mettre en péril la sécurité nationale. La raison : Grindr, créée en Californie en 2009, a, depuis, été rachetée par un groupe chinois, Kunlun.
L’agence Reuters, le New York Times et le Wall Street Journal ont appris que les Etats-Unis avaient, de ce fait, exigé que Kunlun cède l’application. Dans un article publié le 28 mars, le New York Times explique que les autorités craignent notamment que les données dont dispose Grindr soient utilisées pour faire pression sur des personnalités américaines ou pour extorquer des informations à des Américains ayant accès à des dossiers sensibles.
L’application de rencontres, qui revendiquait 27 millions d’utilisateurs en 2017, dont beaucoup d’Américains, collecte des données comme l’orientation sexuelle, la localisation de la personne, ses messages, mais aussi, dans certains cas, son statut sérologique.
A la recherche d’un nouvel acquéreur
Le Comité américain pour l’investissement étranger (Committee on Foreign Investment in the United States, CFIUS) a ordonné à Kunlun de se séparer de cette application, rapportent les trois médias. Selon l’agence Reuters, Kunlun serait déjà à la recherche d’un acquéreur, alors que le groupe avait annoncé, en août 2018, sa volonté de faire entrer Grindr en Bourse.
Le CFIUS a pour rôle d’examiner les investissements étrangers dans des entreprises étrangères, et notamment les fusions et acquisitions, afin de s’assurer qu’elles ne mettent pas en danger la sécurité nationale. Elle le fait en général avant la transaction et a le pouvoir de l’autoriser ou non. « Les raisons pour lesquelles le comité a décidé d’agir maintenant, plus de trois ans après la prise de contrôle de l’entreprise par des Chinois, ne sont pas claires », écrit le New York Times. Le CFIUS ne s’est pas exprimé sur le sujet, pas plus que Kunlun.
« Des mines de données privées et sensibles »
En 2016, Kunlun a acheté 60 % des parts de Grindr, pour 93 millions de dollars (83 millions d’euros). En 2018, le groupe a pris possession des parts restantes pour 150 millions de dollars. Le sénateur démocrate de l’Oregon Ron Wyden a déclaré qu’il avait saisi le CFIUS, l’an dernier, pour qu’il s’intéresse au cas de Grindr. « Il est grand temps que l’administration et le CFIUS se penchent sur l’impact, pour la sécurité nationale, de l’achat, par des entreprises étrangères, de mines de données privées et sensibles d’Américains », a-t-il dit dans un communiqué.
Les inquiétudes des Etats-Unis ne cessent de grandir concernant les technologies chinoises. En 2018, le CFIUS avait refusé une fusion entre MoneyGram, un service américain de transfert d’argent, et Ant Financial, une filiale du géant chinois Alibaba. Les Etats-Unis sont aussi engagés dans une épreuve de force avec le groupe de téléphonie chinois Huawei, que Washington considère comme une menace sécuritaire.