Un Airbus d’Air France à l’aéroport de Lyon-Saint-Exupéry, le 14 mars. / EMMANUEL FOUDROT / REUTERS

Jean-Marc Janaillac, ex-PDG d’Air France-KLM, regardait vers l’est, avec la Chine en point de mire. Anne Rigail, la nouvelle directrice générale d’Air France, penche plutôt vers l’Ouest. La patronne de la compagnie aérienne cherche d’abord à renforcer la société commune, qui associe Air France-KLM à l’américaine Delta Airlines pour l’Atlantique nord. Il faut dire que ce joint-venture (JV) pèse lourd dans les comptes des deux compagnies, avec un chiffre d’affaires annuel de 13 milliards de dollars (11,6 milliards d’euros). A elle seule, elle représente plus de 20 % du chiffre d’affaires d’Air France-KLM.

Ce poids devrait encore s’accroître, avec l’ouverture, depuis le 31 mars, d’une nouvelle ligne vers Dallas, au Texas. La 13destination d’Air France aux Etats-Unis et la 22e pour Air France-KLM. Cette nouvelle ligne ne doit rien au hasard. Elle vient compléter l’accord de coopération, qui lie Air France avec la compagnie indienne Jet Airways. « Le joint-venture avec Jet Airways fonctionne très bien entre l’Europe et l’Inde. Le partenariat est tellement positif que l’on fera tout pour soutenir [la compagnie indienne] », a précisé Mme Rigail, qui faisait allusion aux difficultés financières qui affectent cette dernière. Avec l’apport de Jet Airways, « les recettes unitaires ont progressé », s’est-elle félicitée. Pour Air France, le partenariat avec la compagnie indienne est avantageux, grâce à « une saisonnalité inversée », se réjouit Mme Rigail. Au contraire de la majorité des passagers, ceux du sous-continent viennent aux Etats-Unis à contre-cycle, surtout en hiver, alors que la pleine saison pour Air France-KLM a lieu en été.

A l’avenir, le joint-venture sur l’Atlantique nord devrait bénéficier de l’arrivée de la britannique Virgin Atlantic, contrôlée à 31 % par Air France et à 49 % par Delta Airlines. « Virgin Atlantic nous apporte le Royaume-Uni », se félicite Air France. Avec la compagnie britannique, le partenariat franco-américain va pouvoir proposer des vols au départ de Londres.

Problème de rentabilité

Après Dallas, Mme Rigail parie davantage sur « le développement de nouvelles fréquences que sur l’ouverture de nouvelles lignes aux Etats-Unis ». L’idée maîtresse de la directrice générale est « la performance opérationnelle », autrement dit la robustesse de l’exploitation, sa rentabilité. Elle a posé un « problème en 2018 ». Pour le résoudre, en 2019, Air France « a réaménagé son programme avec une offre simplifiée ». La compagnie veut choyer sa clientèle premium, qui représente « 55 % [du] chiffre d’affaires sur les Etats-Unis ». A ses passagers de « première » ou de classe affaires, Air France va proposer « au moins un vol par jour avec un full flat bed », un lit complètement plat.

Outre l’Amérique, l’autre pilier du développement d’Air France est Transavia, sa filiale à bas coûts. Elle dégage « la meilleure marge du groupe », souligne Mme Rigail. Selon elle, Transavia est « un bon outil offensif sur le point-à-point au départ des bases en France ». Mais la filiale est aussi un rempart contre les appétits de compagnies comme easyJet ou Ryanair. « C’est un outil défensif contre l’arrivée des low cost en France », admet la directrice générale.

La flotte de Transavia France va passer à 40 appareils. Air France aimerait la faire croître encore plus à l’avenir. « La question se pose », reconnaît Mme Rigail. Pour faire grossir Transavia, Air France doit obtenir le feu vert des pilotes. Avant la crise de Boeing, Air France aurait dû passer une commande d’une centaine de 737 Max pour renouveler les flottes de Transavia France et Transavia Holland. Une commande reportée, faute d’avoir obtenu alors l’accord des syndicats de pilotes. Cela ne devrait être que partie remise.

Pour retrouver son rang parmi les premières compagnies au monde, une ambition fixée par Benjamin Smith, directeur général d’Air France-KLM, Air France va investir 1 milliard d’euros sur cinq ans, dont 600 millions d’euros entre 2019 et 2020, a précisé Anne Rigail. Avec cette somme, la compagnie aérienne va moderniser les cabines de ses 15 A330 pour 140 millions d’euros. De l’été 2019 à celui de 2020, ce sont les douze Boeing 777 à destination des Antilles qui bénéficieront d’une enveloppe de 125 millions d’euros pour leur intérieur. Les sept A380 se referont une beauté « à l’automne 2020 », selon Mme Rigail pour 200 millions à 220 millions d’euros. Enfin, dès cette année, 100 millions d’euros seront consacrés à l’installation de la Wi-Fi sur tous les long-courriers de la flotte d’Air France, soit 60 % des avions de la compagnie aérienne.