Surveiller et anticiper les pannes dans les flottes d’entreprise
Surveiller et anticiper les pannes dans les flottes d’entreprise
Par Eric Gibory
Audits réalisés sur place et analyse de données des véhicules par télématique permettent aux entreprises des gains économiques et une sécurité renforcée.
Julie Guillem
Entre la théorie et la pratique, un gouffre peut parfois se creuser. En théorie, la location longue durée avec services est censée couvrir tous les frais nécessaires à l’utilisation d’un véhicule d’entreprise contre un loyer mensuel stabilisé jusqu’à l’échéance du contrat. En pratique, les entreprises doivent assumer la charge de nombreuses opérations de maintenance. C’est le cas d’Avenel, société de BTP.
Cela concerne les travaux de carrosserie, de mécanique, la gestion des pneumatiques, le changement des plaquettes de frein ou des essuie-glaces, soit toutes les opérations non prévues par les contrats signés entre Avenel et ses trois loueurs longue durée. La facture atteint 1 000 euros par an pour ses camionnettes et 500 euros pour ses voitures. « Ce coût vient alourdir le budget prévu par les loueurs longue durée pour l’entretien périodique, soit de 10% à 15 % du loyer mensuel », constate Julien Pouymayon, le responsable de la flotte.
Particulièrement attentif à l’état des pneumatiques et des vitrages, équipements essentiels à la sécurité de ses collaborateurs, Avenel a signé des accords avec les enseignes Euromaster, First Stop et Allo Pare Brise pour les réparer ou les remplacer. « Pour vérifier la pression et l’état d’usure de nos pneus, nos prestataires organisent des audits sur nos différents sites, explique Julien Pouymayon. Cette anticipation contribue à renforcer la sécurité de nos collaborateurs. »
Un quart des véhicules en mauvais état
Pour anticiper les incidents, Avenel a également recours à la télématique. Installés sur les véhicules, les boîtiers communicants permettent d’obtenir à distance et en temps réel des informations sur la pression des pneus, les niveaux d’huile, de liquide de frein, de refroidissement et de recevoir des alertes quand une anomalie est détectée. « Nous n’avons pas encore assez de recul pour appréhender les bénéfices obtenus grâce à cette technologie, regrette Julien Pouymayon. En revanche, avant de nous équiper, nous avons cassé deux moteurs. Avec la télématique, cela ne serait jamais arrivé. Avec ce seul avantage, nous amortissons déjà notre investissement. »
Spécialiste de la télématique, Suivideflotte.net développe des solutions de maintenance prédictive. Parallèlement à l’obtention d’informations fiables et précises sur l’utilisation des véhicules, ses technologies permettent d’anticiper les révisions. Comme le conducteur, le gestionnaire de flotte est alerté régulièrement sur les échéances prévues par le constructeur. Grâce à cette fonctionnalité, le plan d’entretien est respecté avec davantage de rigueur. Suivideflotte.net est également capable de contrôler à distance l’état des pièces d’usure, le niveau des fluides et, par exemple, le degré d’encrassement du pot catalytique, et d’alerter le gestionnaire de flotte en temps réel.
Autre tendance, de plus en plus de centres autos proposent à leurs clients de se déplacer sur site pour réaliser un audit de leurs flottes. Après une expérience auprès des parcs des poids lourds, Euromaster vient de lancer une offre équivalente pour les véhicules légers. Le conseiller technique réalise un examen visuel des pneus, du pare-brise, des balais d’essuie-glace et des équipements visibles et préconise les travaux nécessaires. « Lors d’une visite sur un parc de 100 véhicules, le technicien détecte des anomalies sur 25 d’entre eux, affirme Jean-Michel Fauron, directeur commercial. Pour les flottes de véhicules industriels sur lesquelles nous intervenons en prédictif depuis vingt-cinq ans, le nombre de dépannages diminue de 30 % et leur coût baisse d’un tiers. »
Des coûts d’entretien importants
Les solutions proposées reposent sur le principe bien connu en médecine : mieux vaut prévenir que guérir. Surveiller l’état de fonctionnement des véhicules permet d’anticiper les pannes, les casses et les accidents. D’où une maîtrise renforcée des coûts et une sécurité préservée pour les conducteurs.
Dans le cadre de l’une de ses études publiées en 2018, l’Observatoire du véhicule d’entreprise (OVE) estime à 20,7 % la part de l’entretien, des pneumatiques et de l’assurance dans le coût total d’utilisation d’une automobile. Troisième poste de dépense derrière la dépréciation et les charges fiscales et sociales, ce budget est resté stable en 2018. S’il représente un cinquième du budget automobile, ce poste influe également sur les consommations de carburant. Un véhicule mal entretenu et aux pneus sous-gonflés devra passer plus souvent à la pompe. Enfin, un dysfonctionnement ignoré peut provoquer un accident grave avec des coûts humains souvent lourds et un risque de désorganisation important pour l’un des services d’une grande entreprise ou pour l’ensemble d’une PME ou d’une TPE.
Autre élément d’appréciation, Carméléon, un spécialiste de la réparation rapide, vient d’introduire la notion de Total Cost of Repair (TCR) ou coût total de réparation. Au coût direct, le montant des réparations, il faut ajouter des coûts cachés (convoyage jusqu’au garage, taxi, véhicule de remplacement, etc.). Ces derniers représenteraient de 10 % à 25 % du TCR. Une raison de plus pour éviter les réparations par la mise en place d’une maintenance prédictive.
Prochaine étape, les informations collectées dans le véhicule pourront être transmises directement aux ateliers. Non seulement la prise de rendez-vous avec le garage se fera automatiquement mais le mécanicien disposera des informations en amont pour commander les pièces et ainsi immobiliser le véhicule le moins longtemps possible. Un véritable Graal pour les gestionnaires de flottes et leurs prestataires.