Durant le sit-in devant le quatier général de l’armée à Khartoum, au Soudan, le 15 avril. / MOHAMED NURELDIN ABDALLAH / REUTERS

Les manifestants au Soudan ont durci leur position en réclamant, lundi 15 avril, la dissolution du Conseil militaire de transition pour le remplacer immédiatement par un pouvoir civil. Mardi, ils étaient encore présents devant le quartier général (QG) de l’armée dans la capitale, Khartoum.

Lundi, l’Association des professionnels soudanais (SPA), fer de lance de la contestation qui secoue le pays depuis le 19 décembre, a dénoncé une tentative de dispersion du sit-in qui se tient depuis le 6 avril devant le QG de l’armée, sans en identifier les auteurs.

La destitution de Bachir ne suffit pas

« L’armée va tenter à nouveau de disperser les protestataires car elle est sous pression, mais nous ne comptons pas partir (…) Cela sera peut-être une longue bataille, mais nous devons nous battre pour nos droits », a déclaré à l’Agence France-Presse Ahmed Najdi, un des manifestants rassemblés mardi devant le siège de l’armée à Khartoum.

Des milliers de personnes ont répondu à l’appel de cette association à protéger la « révolution » et ont afflué devant le QG de l’armée avec un message clair : la destitution jeudi par l’armée du président Omar Al-Bachir et les promesses du Conseil militaire d’instaurer un gouvernement civil, sans donner aucun calendrier, ne suffisent pas. « Nous savons ce qu’il s’est passé en Egypte et nous ne voulons pas que cela nous arrive », a expliqué Ahmed Najdi.

En Egypte voisine, le président Hosni Moubarak, au pouvoir pendant trente ans comme l’a été Omar Al-Bachir, avait été renversé par une révolte populaire lors du « printemps arabe » en 2011. Mais en 2013, l’armée conduite par le général Abdel Fattah Al-Sissi avait renversé le nouveau président élu, l’islamiste Mohamed Morsi. M. Sissi est depuis au pouvoir dans ce pays et a été élu président pour un nouveau mandat l’année dernière.

Des piliers du régime de Bachir toujours présents

L’Union africaine a de son côté menacé lundi de suspendre le Soudan de l’organisation si l’armée ne quittait pas le pouvoir au profit d’une « autorité politique civile » d’ici à quinze jours. Plusieurs pays occidentaux ont également appelé les autorités à ne pas faire usage de la force pour disperser les manifestations. Au moins 65 personnes sont mortes depuis le début de la contestation, selon un bilan officiel.

Après des images ces derniers jours de militaires saluant les manifestants, les relations entre l’armée et les contestataires – qui avaient appelé les militaires à se ranger auprès d’eux pour faire partir Bachir – se sont tendues. Sur une banderole déployée sur les murs de son siège, l’armée les a d’ailleurs appelés à ne « pas s’approcher ». Si le général Abdel Fattah Al-Burhane, à la tête du Conseil militaire depuis vendredi, a promis « d’éliminer les racines » du régime de Bachir, de nombreux piliers de ce système figurent à ses côtés.

Amnesty International a appelé l’armée à remettre le président déchu, 75 ans et actuellement détenu par les militaires dans un lieu inconnu, à la Cour pénale internationale (CPI), qui a émis contre lui des mandats d’arrêt pour « crimes de guerre », « crimes contre l’humanité » et génocide au Darfour. Après avoir affirmé vendredi qu’il refuserait d’extrader M. Al-Bachir, le Conseil militaire a annoncé lundi soir par la voix du général Jalaluddine Cheikh que la décision « sera[it] prise par un gouvernement populaire élu et non par le Conseil militaire ».