« Première campagne » : la fabrique du candidat Macron, au galop
« Première campagne » : la fabrique du candidat Macron, au galop
Par Clarisse Fabre
Audrey Gordon a suivi une jeune journaliste de France 2 couvrant la course à l’Elysée de celui qui est devenu chef de l’Etat en 2017.
Dans Première campagne, documentaire d’Audrey Gordon, le personnage principal n’est pas Emmanuel Macron, mais la journaliste de France 2 Astrid Mezmorian, qui suivait le candidat d’En marche ! lors de l’élection présidentielle de 2017.
Audrey Gordon et Astrid Mezmorian se connaissent bien, elles ont fait leurs études ensemble à l’Institut d’études politiques, à Paris. Lorsque la jeune journaliste prend son poste dans la chaîne publique, le 1er septembre 2016, Emmanuel Macron, ancien ministre de François Hollande, vient juste d’annoncer sa candidature. Le film suit les deux derniers mois de la campagne, alors que les ralliements à Macron se multiplient et que l’hypothèse que le candidat affronte Marine Le Pen au second tour de l’élection devient plausible.
Classique dans sa forme, le film d’Audrey Gordon raconte la fabrique de l’information sur le terrain. Ou comment une journée de travail aboutit à un sujet d’une minute et trente secondes à l’antenne. Astrid Mezmorian sait ce qu’elle va chercher : au siège de France 2, la directrice du service politique, Nathalie Saint-Cricq, et d’autres membres de la rédaction en chef élaborent et bien souvent dictent « le sujet du jour ».
Un suivi un peu formaté
Le film débute comme un feuilleton de Mission impossible. Astrid Mezmorian et le cameraman de France 2 sont dans un TGV, en route pour assister à un meeting du candidat. La journaliste a une demi-heure pour dénicher un électeur du candidat socialiste, Benoît Hamon, qui serait susceptible de basculer pour Macron au vu de la conjoncture. Astrid Mezmorian finit par trouver un participant qui entre dans cette catégorie et fait son interview, soulagée. Le spectateur, lui, est un peu abasourdi : la chaîne publique n’est-elle pas en train d’amplifier les difficultés, certes réelles, du candidat PS ? Le film n’aborde pas la question.
Prochaine étape, la « cristallisation » du vote autour de Macron. Tous les médias en parlent. Dans la voiture de France 2, le téléphone d’Astrid sonne. C’est Nathalie Saint-Cricq : il faut interroger Macron sur ce phénomène d’emballement proche du sentiment amoureux. Par ailleurs, Macron propose l’instauration d’un service militaire ? Il faut dire « à quoi ça sert, c’est quoi le contenu, combien ça coûte », indique encore la chef…
En montrant les coulisses, Première campagne raconte aussi le formatage du suivi de la campagne sur la chaîne publique. Un peu routinier – alternance de scènes dans la voiture, de meeting et séquences à la rédaction de France 2 –, le film propose peu d’échappées. Mais il y en a tout de même quelques-unes. On voit ainsi Astrid Mezmorian discuter avec son père, chez lui, dans son bureau. Où ce dernier finit par lui dire que Macron est une construction médiatique.
Un soir, Astrid avoue devant ses collègues : « C’est déséquilibrant, émotionnellement, d’être tout le temps dans une surchauffe. » Il y a cette scène de stress, avant le « 20 heures », où deux responsables de France 2 viennent dans son dos, lui donnant des consignes : il faut écrire comme ci, ou comme ça. Mais la journaliste a aimé travailler à percer le mystère Macron. « Et lui, il te connaît bien ? », lui demande le cameraman. « Je pense qu’il connaît mon prénom… » Puis, se ravisant : « J’en sais rien, en fait. »
Première campagne, documentaire français d’Audrey Gordon (1 h 12). Sur le Web : jour2fete.com
PREMIERE CAMPAGNE - Bande Annonce
Durée : 01:44