Contesté, le sélectionneur de l’équipe de foot du Togo s’en remet à l’arbitrage du président
Contesté, le sélectionneur de l’équipe de foot du Togo s’en remet à l’arbitrage du président
Par Alexis Billebault
Contesté par des supporters des Eperviers, mais soutenu par ses joueurs et le chef de l’Etat, le Français Claude Le Roy devrait rester en poste.
L’entraîneur et sélectionneur français de l’équipe nationale togolaise des Eperviers. / JUSTIN TALLIS / AFP
L’élimination du Togo par le voisin béninois ne passe pas. La défaite des Eperviers par 1 à 2 lors de la sixième et dernière journée des qualifications pour la CAN 2019, le 24 mars à Cotonou, a réveillé le mécontentement de la frange des supporters locaux qui continuent de réclamer le départ de Claude Le Roy, 71 ans.
Nommé sélectionneur du Togo en avril 2016, le Français, qui ne faisait déjà pas l’unanimité, a vu les réseaux sociaux s’enflammer contre lui. Le collectif de supporters « Martin Luther King », emmené par Edoh Komi, avait même souhaité organiser une marche pour exiger son départ qui, face aux refus des autorités, s’était transformé en sit-in devant le stade municipal le 6 avril, dispersé par les gaz lacrymogènes.
Près d’un mois plus tard, Claude Le Roy, qui se trouve toujours à Lomé, relativise le mécontentement toujours vif, rappelant qu’« on ne peut pas être apprécié par tout le monde » et poursuit « je sais qu’il y a des gens déçus par l’élimination du Togo, mais je reçois aussi des messages de sympathie. Je suis sensible à ce que disent les supporters, mais les avis de mes joueurs, de mon staff technique, comptent beaucoup », insiste-t-il.
Au Togo, personne ne sait vraiment jusqu’à quand court le contrat de l’ex-coach du Cameroun. D’ailleurs, lui-même balaie le sujet d’un énigmatique : « Je suis toujours sous contrat. » En fait, à en croire Claude Le Roy, sa mission est bien plus large qu’un simple rôle de sélectionneur. « J’ai commencé un travail qui va au-delà de la sélection, plaide-t-il. Nous avons mis en place Graines du Togo, un programme de détection de jeunes joueurs. Nous travaillons aussi, en lien avec l’ambassadeur de France au Togo, à l’ouverture d’un centre international pour le football féminin, à Lomé. Avec mon staff, nous nous y consacrons tous les jours. Alors, si vous m’interrogez sur mon avenir, je vous réponds que c’est le président de la République qui en décidera ! »
« Avancées significatives »
Or le chef de l’Etat, Faure Gnassingbé, justement, apprécie Le Roy. Le président togolais s’est même beaucoup impliqué pour faire venir à Lomé celui qui avait été champion d’Afrique 1988 avec le Cameroun. Et selon les informations du Monde Afrique, Faure Gnassingbé serait aujourd’hui plutôt favorable au maintien du Français dans ses fonctions. « Il y a eu des avancées significatives depuis que Le Roy est là, reprend Steven Lavon, journaliste togolais. Par exemple, l’organisation de la sélection est beaucoup plus professionnelle. Il n’y a plus de problèmes de primes, l’équipe joue des matches amicaux, effectue des stages. Le Roy a fait progresser ses adjoints togolais et est soutenu par ses joueurs. » Il l’est aussi par des entraîneurs locaux, dont Tchakala Tchanilé, ancien international et sélectionneur. « Cet homme a apporté une sérénité, une rigueur, que l’équipe nationale n’avait jamais connues. D’accord, le Togo ne s’est pas qualifié pour la CAN 2019, mais il faut voir sur le long terme et ne pas casser la dynamique. Si le foot togolais avance, c’est aussi parce que Le Roy est porteur d’un projet, et que par son expérience il a su convaincre les autorités de le suivre. » Avant de signer son contrat en 2016, le Français avait fait de la reprise du championnat national, à l’arrêt depuis 2014, une condition essentielle à sa venue. Un souhait exaucé.
Banderole réclamant la démission de Claude Le Roy après la défaite des Togolais, contre le Bénin, lors du match de qualification de la CAN, le 24 mars 2019. / CC 2.0
Ces arguments ne parviennent cependant pas à convaincre ses détracteurs. « Si vous posez la question à des supporters, la majorité vous répondra qu’ils souhaitent son départ. Le Roy est également en froid avec une partie de la presse, qui estime qu’il se montre trop distant avec les journalistes », reprend Steven Lavon.
Pour Edoh Komi, le maintien du Français n’est même pas négociable. « Il faut qu’il parte. Il avait dit qu’il quitterait son poste si le Togo ne se qualifiait pas pour la CAN 2019. Là, on a l’impression qu’il s’accroche. Quant au président de la République, il doit écouter son peuple. »
Au sein de la Fédération togolaise de football (FTF), les avis sont partagés. Il reviendra donc à Faure Gnassingbé, et à lui seul, de trancher dans les prochaines semaines. Le chef de l’Etat et Claude Le Roy entretiennent de très bonnes relations, ont des contacts réguliers. Et le président, conforté par les avis de son proche entourage, est convaincu que le Normand est toujours l’homme de la situation.