Au procès Balkany, le fisc accusé de surévaluer le patrimoine du couple
Au procès Balkany, le fisc accusé de surévaluer le patrimoine du couple
Le Monde.fr avec AFP
Patrick Balkany a pris pour la première fois la parole au troisième jour de son procès, et de celui de sa femme, pour évasion fiscale, déclarant avoir « horreur » de la corruption.
Au troisième jour de son procès et de celui de son épouse, prévu jusqu’au 20 juin pour évasion fiscale, blanchiment d’argent et corruption, le maire Les Républicains de Levallois-Perret, Patrick Balkany, a pu donner, mercredi 15 mai, une version des faits qu’il attendait avec impatience de pouvoir détailler devant les juges du tribunal correctionnel de Paris.
S’ils reconnaissent avoir omis de déclarer une partie de leur héritage, les Balkany réfutent toute sous-évaluation du reste de leur patrimoine. Le fisc, qui avait porté plainte en 2015, chiffre à 4 millions d’euros les impôts dus sur le revenu et la fortune. Le couple n’avait pas payé d’ISF entre 2010 et 2015 malgré des actifs estimés par l’administration à 16 millions d’euros en 2011, 2012 ou 2013.
« J’ai horreur de la corruption »
Longuement questionné sur son train de vie fastueux et l’argent liquide coulant à flot autour de lui, l’élu a invoqué un héritage familial, en commençant par raconter l’histoire de son père, résistant rescapé d’Auschwitz, qui fit fortune dans la revente d’un stock militaire américain puis dans le prêt-à-porter, et dissimula ses millions en Suisse.
Une fortune helvète dont Patrick Balkany rapatrie 6 millions de francs à la fin des années 1980. Il vend ensuite ses parts dans l’entreprise familiale pour 33 millions, une « cession suspecte » car surévaluée, selon l’accusation. En parallèle, son épouse Isabelle – également jugée, mais toujours hospitalisée après une tentative de suicide début mai – retire 4 millions de francs d’une vente d’actions familiales, puis en touche 10 autres sur un compte suisse en 1995. Elle récupère en 2008 près de 2 millions d’euros après la vente d’objets d’art familiaux.
Quant à l’argent liquide qui inonde le dossier, il provient des coffres familiaux et de la revente discrète de lingots d’or paternels, assure Patrick Balkany. Ces espèces, « y en a plus », déboires fiscaux obligent. Mais à l’époque, « il fallait bien les utiliser », par exemple en payant cash 87 000 euros de billets d’avion en « business class » entre 2010 et 2013.
Mais là où d’anciens employés ont décrit des primes en espèces, il nie. Des grosses coupures débordant de partout, de la coiffeuse de son moulin de Giverny (Eure) aux poches de son peignoir ? « C’est pas notre genre ». « J’ai horreur de la corruption », lâche-t-il en déclenchant des murmures dans la salle, « ce que nous avons dépensé, c’est notre argent ».
« Pas propriétaires » du riad de Marrakech
Le chiffre de 16 millions d’euros avancé par l’administration serait donc largement surévalué, jure Patrick Balkany : le moulin de Giverny ne compterait pas 11 chambres comme l’ont dit les enquêteurs, mais quatre. Malgré 1,8 million d’euros de travaux à Giverny depuis 1986, la piscine serait « bonne à refaire », le tennis « déformé ».
La villa Pamplemousse de Saint-Martin, qu’Isabelle Balkany a reconnu avoir achetée avec de l’argent suisse, était selon lui un gouffre financier en raison des travaux induits par l’« air marin » ou les ouragans, et le fisc gonflerait sa valeur. Interrogé sur l’exotique montage financier qui entourait la villa, il assure avoir « découvert » pendant l’enquête « ces sociétés qui se baladaient ».
Quant au riad de Marrakech, dont les enquêteurs estiment qu’il est détenu par les Balkany, l’élu le balaie : « Nous ne sommes absolument pas propriétaires. » Cette villa est au cœur d’une procédure pour blanchiment et corruption qui sera jugée séparément, du 20 mai au 20 juin. Les réquisitions du Parquet national financier, pour le seul délit de fraude fiscale, sont attendues le jeudi 16 mai.