Vendredi 10 mai à Alger, on « vendredit ». Autrement dit, on manifeste contre le pouvoir en place le jour de la grande prière. / Ramzi Boudina / REUTERS

C’est vendredi, et ce jour-là en Algérie, on « vendredit », du verbe « vendredire ». C’est le mot du moment, un terme que la rue algérienne a inventé pour résumer le fait de manifester le jour de la grande prière. Et ce mot, vous, abonnés de l’application WhatsApp du Monde Afrique, vous adoreriez qu’il entre au dictionnaire.

Quand la rédaction, après avoir souligné le nombre important de mots venus du continent africain et entrés au dictionnaire cette année, vous a demandé quels mots vous rêveriez de voir entrer au Petit Larousse, vous avez été nombreux à avancer « vendredire ».

De quoi donner raison au linguiste Bernard Cerquiglini, qui nous expliquait que le continent est malin pour inventer des verbes qui manquent pour raconter nos vies. Si « vendredire » se range parmi les verbes du 3e groupe, le scientifique, lui, mettait plutôt l’accent sur les verbes du premier groupe, ceux qui se terminent en « er » et rendent des services fous. Il prenait l’exemple de « cadeauter » ou de « gréver », deux mots déjà largement employés. Et là, vous avez quelques jolies idées en la matière…

Il y a ceux qui adoreraient qu’on entérine le verbe « carrefourter », qui signifie « attendre quelqu’un à un carrefour », et ceux qui plaident pour « catiser », qui résume l’idée de traverser une rue ou une avenue à pied, ou encore de prendre un raccourci. Et ces verbes seraient de vrais raccourcis de la langue !

« Quellième ? », « choital », « mounafica »

Mais les noms aussi foisonnent de Cotonou à Bamako. A l’heure où les étudiants et les élèves observent à quelle place ils sont reçus aux concours qu’ils viennent de passer, vous nous proposez « quellième ? », pour demander à quelle place est reçu un candidat ou à quelle position il se situe sur une liste d’attente. Quant à celui qui a le choix de plusieurs écoles ou universités, on dit au Burkina qu’il est « choital », parce qu’il a le choix.

Sachez que tous ces mots, c’est vous qui nous les avez fait remonter, avec beaucoup d’autres encore. La rédaction s’en régale à Paris et aimerait les employer si le service correction du journal ne veillait pas d’aussi prêt à nos usages… Quoi qu’il en soit, nous savons que vous n’êtes pas des « mounafica », terme moré qui désigne le colporteur de ragots ou d’informations qui ont pour but de nuire à une personne, mais bien les « enrichisseurs » de nos conversations.

Patience, patience… Peut-être que ces termes feront demain leur entrée au dictionnaire, supplantant du même coup les mots anglo-saxons… En tout cas, n’allez jamais penser que c’est « insalamable » ou dit autrement que « ça ne peut pas se faire », comme on le répète souvent au Congo-Brazza. Car tout finit par arriver !