Jean-Dominique Senard, le président de Renault ,et Hiroto Saikawa, le patron de Nissan, lors d’une conférence de presse à Yokohama, au Japan, le 12 mars 2019. / Kim Kyung Hoon / REUTERS

Nissan et Mitsubishi sont-ils prêts à suivre Renault, tenté de répondre favorablement à la proposition de fusion dévoilée lundi 27 mai par Fiat Chrysler Automobiles (FCA) ? Au cours d’un conseil de l’Alliance Renault-Nissan-Mitsubishi, qui s’est tenu mercredi au siège de Nissan à Yokohama (au sud de Tokyo), Jean-Dominique Senard, président du groupe français, et son directeur général, Thierry Bolloré, ont informé pour la première fois officiellement leurs homologues japonais de l’existence du projet.

Un communiqué plutôt laconique a été diffusé à l’issue de la rencontre. Outre la mention de conclusions « positives » sur des questions opérationnelles propres à l’alliance, le texte se contente de mentionner qu’il y a eu « des discussions franches et transparentes sur la récente proposition de FCA au groupe Renault ». « Les Japonais se sont montrés prudents mais intéressés, assure une source proche de Renault. Ils paraissent confiants dans le fait que la constitution d’un ensemble Renault-Fiat-Chrysler puisse les aider dans leurs difficultés actuelles. »

A son arrivée la veille à l’aéroport de Tokyo, M. Senard avait livré un message d’optimisme.
« Je pense que tous ces événements récents sont très bons pour l’alliance, et je vais veiller à ce que Nissan et Mitsubishi en tirent pleinement parti », avait déclaré le nouveau pilote du partenariat automobile franco-japonais. Les dirigeants du groupe au losange souhaitent accélérer. Renault envisageant de réunir son conseil d’administration au début de la semaine prochaine pour entrer au plus vite en négociations exclusives avec FCA.

Un moyen de pression

Nissan a-t-il la possibilité de refuser, au risque de se retrouver isolé ? La proposition de FCA représente pour Renault « un moyen de pression sur Nissan, qui disait que le groupe français était petit et profitait de ses revenus, note un bon connaisseur du constructeur nippon. C’est une façon de dire : on a un peu moins besoin de vous ».

Echaudé en avril par la relance jugée brutale de l’idée d’une fusion avec Renault, à laquelle il s’oppose, Nissan a accueilli l’annonce de FCA avec une certaine réserve. En interne, les réactions étaient mitigées, en particulier parce que le constructeur nippon a l’impression d’être mis devant le fait accompli.

Nissan et le gouvernement japonais craignent une perte d’indépendance, notamment en matière de recherche et développement. Le constructeur s’inquiète aussi d’une dilution de son pouvoir dans la nouvelle structure. Nissan reste le plus important contributeur de l’entité franco-japonaise, ayant écoulé en 2018 plus de la moitié des 10 millions de véhicules de l’alliance. En cas de rapprochement avec FCA, cette part tomberait à 36 %.

Dans ce contexte, le patron de Nissan, Hiroto Saikawa, a déclaré à son arrivée à la réunion de mercredi qu’il voulait « regarder de près le projet en ayant à cœur les intérêts de Nissan ». La veille, il en avait parlé comme d’un « pas positif vers l’avenir » et d’une « bonne initiative » à même « d’élargir la portée de l’alliance actuelle ». La partie nippone apprécierait en effet l’idée de voir dissoute la part du gouvernement français, premier actionnaire de Renault.

Nissan bénéficie aussi d’un atout majeur : il est indispensable à Renault et à FCA pour ses accès aux prometteurs marchés asiatiques, Chine et Japon principalement. Mitsubishi l’est également, pour l’Asie du Sud-Est. Un siège du conseil d’administration de la future alliance serait réservé à un représentant de Nissan.

Pour ne rien manquer de l’actualité économique

Cet article est paru dans notre newsletter « La lettre éco ». Si vous êtes abonné au Monde, vous pouvez vous inscrire à cette lettre quotidienne en suivant ce lien. Chaque jour à 12 h 30, vous y retrouverez les informations du Monde et son regard sur l’actualité économique, à travers notamment la chronique « Pertes & profits ».