Réforme des retraites : l’avenir de Jean-Paul Delevoye en question
Réforme des retraites : l’avenir de Jean-Paul Delevoye en question
Par Raphaëlle Besse Desmoulières, Bertrand Bissuel
Le haut-commissaire à la réforme des retraites a suivi le projet depuis le début mais ne sera pas en première ligne pour le défendre devant les parlementaires, au grand dam de certains.
Que fera Jean-Paul Delevoye, haut-commissaire à la réforme des retraites, une fois qu’il aura remis – en juillet en principe – ses recommandations pour jeter les bases du régime universel, promis par Emmanuel Macron ? Si l’une de ses attributions consiste à coordonner le « suivi de [la] mise en œuvre » des textes, ce ne sera pas lui mais la ministre des solidarités et de la santé, Agnès Buzyn, qui sera en première ligne pour défendre le projet de loi, lors de son examen au Parlement – ce qui devrait être le cas cet automne ou, plus probablement, début 2020.
Des voix s’élèvent, cependant, pour que M. Delevoye porte le texte quand il sera débattu à l’Assemblée nationale et au Sénat. Ayant piloté, pendant plus d’un an, la concertation avec les partenaires sociaux, « il connaît le sujet comme personne et sera le meilleur pour expliquer cette réforme face aux détracteurs », vante Corinne Vignon, députée La République en marche (LRM) de Haute-Garonne et présidente du groupe de travail transpartisan sur ce dossier. Si un tel scénario l’emportait, « je serais content », affirme son collègue Laurent Pietraszewski (LRM, Nord), pressenti pour devenir le rapporteur du projet de loi. « Au sein du groupe, le sentiment de confiance à l’égard de Jean-Paul est très fort », ajoute-t-il, tout en faisant preuve de tempérance : le rôle à venir du haut-commissaire dépend de « décisions qui appartiennent au président de la République et au premier ministre », souligne le député macroniste, et Mme Buzyn est « une ministre extrêmement brillante », capable d’affronter les discussions avec les élus de la nation.
« Laissons faire les pros »
M. Delevoye ne peut pas se substituer à Mme Buzyn au motif qu’il n’est pas membre du gouvernement ? Qu’à cela ne tienne, fait valoir Mme Vignon, qui plaide pour l’intégration du haut-commissaire dans l’équipe d’Edouard Philippe, non pas comme ministre mais avec son statut actuel. L’élue de Haute-Garonne rappelle qu’il en avait été ainsi pour Martin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives de 2007 à 2010.
« Laissons faire les pros, lâche un député LRM. Buzyn n’est pas du tout impliquée [dans la réforme des retraites], elle sera ravie, elle qui a un boulot de fou… » Une allusion aux nombreux chantiers qui attendent la ministre (bioéthique, dépendance, revenu universel d’activité, etc.). Ces marques de soutien à l’égard du haut-commissaire sont une « façon de contrer Matignon », juge un syndicaliste, en faisant référence au faible enthousiasme prêté à l’entourage de M. Philippe pour le régime universel. « Ça témoigne d’une certaine appréhension chez les députés de la majorité », renchérit le représentant d’une autre organisation de salariés. M. Delevoye, lui, fait mine de pas se soucier de toutes ces supputations : « L’important, dit-il, est le projet. »