Le bac 2019 débute lundi 17 juin avec l’épreuve de philosophie. / ALAIN LE BOT / PHOTONONSTOP

« La dernière ligne droite… » : il n’est pas sûr que l’expression survive à la réforme du baccalauréat. A la même date dans deux ans, ce n’est pas une semaine d’épreuves qui attendra les candidats de la session 2021, la première de ce bac « nouvelle formule » promis par le candidat Macron. Non : arrivés en juin, pour valider le précieux sésame, les lycéens de terminale n’auront plus qu’à réussir l’écrit de philosophie – épreuve étendue à tous les candidats de la voie générale – et un « grand oral » de trente minutes (échanges avec le jury compris). Ces deux épreuves, les lycéens les aborderont avec 80 % du stress (et 80 % de la note globale) « déjà derrière eux », disent les professeurs.

Mais l’évaluation en contrôle continu introduite par la réforme (à hauteur de 40 % de la note finale) ne compte pas que des défenseurs chez les enseignants : beaucoup mettent en garde contre la complexité de sa mise en œuvre. Beaucoup, aussi, pronostiquent l’explosion du nombre d’épreuves organisées en cours d’année, à raison d’une session en classe de première et de deux sessions en terminale. « A mille lieues du choc de simplification promis par le tandem Macron-Blanquer », glisse le proviseur d’un grand lycée parisien.

Des écrits anticipés en mars

Il n’empêche : quitte à bouleverser l’architecture de l’examen bicentenaire, pourquoi ne pas aller jusqu’au bout de la logique et caler le calendrier de toutes les épreuves sur celui de la plate-forme d’orientation Parcoursup ? C’est la direction déjà prise, semble-t-il, pour les deux écrits des enseignements de spécialité : ceux-ci devraient être anticipés au mois de mars en terminale, pour peser dans l’affectation vers le supérieur. C’est en tout cas ce qu’a proposé le ministère de l’éducation aux syndicats d’enseignants rencontrés à la fin de mai. Dans ce scénario, une partie du contrôle continu serait, à l’inverse, reportée au troisième trimestre.

« La logique de la réforme n’a jamais été de faire disparaître les épreuves terminales », explique l’universitaire Pierre Mathiot, directeur de Sciences Po Lille, dont le rapport « Baccalauréat 2021 », remis il y a dix-huit mois, a servi de colonne vertébrale à la réforme lancée par le ministre de l’éducation, Jean-Michel Blanquer. « Dès les premières discussions avec Emmanuel Macron et Jean-Michel Blanquer, il a été acté la nécessité de maintenir ce qui passe pour la garantie du caractère national du baccalauréat », explique-t-il. « Supprimer [le bac], ce serait comme démonter la tour Eiffel », disait déjà, dans les années 2000, l’ex-ministre de l’éducation Xavier Darcos.

Un baccalauréat « modèle »

N’en déplaise à ceux qui estiment l’examen démodé, le bac à la française, avec ses épreuves standardisées externes aux établissements scolaires, fait plutôt figure de modèle : depuis quinze ans, ce type de certification est « devenu dominant dans les pays de l’OCDE, sous la pression des universités, des entreprises mais aussi des familles », explique la sociologue Nathalie Mons. Certains pays continuent de s’en passer (à l’image des Etats-Unis ou du Japon) ; beaucoup l’ont adopté et adapté à leur culture scolaire (comme la Norvège, l’Autriche ou la Belgique francophone). « Aucun pays n’a fait le choix de supprimer les épreuves finales, reprend Nathalie Mons. S’aventurer sur ce terrain-là reviendrait à aller à contre-courant de la tendance générale. »

D’autant que la recherche a démontré les effets bénéfiques du baccalauréat sur les apprentissages, dès lors que les épreuves sont passées dans un cadre large et réglementé et qu’elles portent sur des compétences complexes. Elles peuvent même diminuer « significativement » les inégalités sociales à l’école, peut-on lire dans un dossier que le Conseil national d’évaluation du système scolaire (le Cnesco, que Mme Mons préside) a consacré au sujet en juin 2016.

A l’époque, le quinquennat de François Hollande touchait quasi à sa fin, sans que le chantier explosif du baccalauréat n’ait été ouvert. Tout juste Najat Vallaud-Belkacem, alors ministre de l’éducation, avait-elle glissé au terme de la session 2016 du bac qu’il faudrait « un jour » procéder à un « toilettage » de l’examen. Avant elle, Vincent Peillon avait réussi le tour de force d’écrire une loi d’orientation et de programmation sur l’école (2013) en omettant le sujet.

Stratégie et « recette »

Jean-Michel Blanquer a rompu avec la stratégie de ses prédécesseurs en faisant de ce « nouveau bac », inscrit parmi les engagements présidentiels de La République en marche, un enjeu de tout début de quinquennat. Sur le fond, en revanche, il n’a rien inventé : réduire (à quatre ou cinq) le nombre d’épreuves terminales pour augmenter la part de contrôle continu était déjà peu ou prou la « recette » de Xavier Darcos (ministre de l’éducation de 2007 à 2009) et, avant lui, de François Fillon (2004-2005). Eux aussi avaient rêvé d’un lycée construit autour de « majeures » et de « mineures », dépassant la logique des séries (L, S et ES). Un vent de contestation avait eu raison de leur projet. « Sans doute que l’opinion publique n’était pas prête », souffle un proche de l’actuel ministre de l’éducation.

Si l’opinion publique a fini par se laisser convaincre – au moins en partie – de la nécessité de réformer un examen coûteux, chronophage et complexe, dont la « valeur symbolique » est saluée mais la « valeur réelle » sujette à discussion, elle n’est pas prête à voir l’année de terminale s’achever au printemps. C’est aussi pour cette raison que la suppression des épreuves finales ne semble pas une option valable pour bon nombre d’observateurs de l’école. « On ne peut quand même pas lâcher dans la nature, fin mars, 650 000 lycéens de terminale », fait valoir Martin Andler.

Ce mathématicien a cosigné, en 2016, une note du think tank Terra Nova intitulée « Comment sauver le bac ? ». Il y défendait, entre autres, la validation des acquis en cours de scolarité, adossée à deux journées d’épreuves seulement, une en classe de première et une autre en terminale. La réforme actuelle ne va pas aussi loin.

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des tchats dans lesquels vous pourrez poser des questions à des enseignants sur les sujets.

Tchat « philo », avec Thomas Schauder, lundi 17 juin à partir de 9 h 15.

Tchat « français », lundi 17 juin à partir de 17 heures.

Tchat « histoire-géo », mardi 18 juin à partir de 11 h 30.

Tchat « sciences éco », jeudi 20 juin à partir de 11 h 30.

Tchat « maths », vendredi 21 juin à partir de 11 h 30.

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