Mission accomplie pour les Bleues qui peuvent maintenant se concentrer sur leur huitième de finale prévu dimanche au Havre. / DAMIEN MEYER / AFP

Les footballeurs se transforment souvent en comptable pragmatique lorsqu’il s’agit de commenter leurs prestations parfois poussives. Aucune raison que les footballeuses n’échappent à cette habitude. Lundi 17 juin, à l’issue de leur courte victoire (1-0), décrochée dans la douleur à Rennes face au Nigeria, les Bleues ont avant tout souhaité mettre en avant le sans-faute réalisé dans le groupe A : neuf points sur neuf. La manière n’était certes pas au rendez-vous, mais les réalistes peuvent se satisfaire de la victoire.

« Il n’y a aucune inquiétude. C’est vous qui allez les créer dans les médias. L’objectif c’était les trois victoires », a ainsi asséné la milieu de terrain Charlotte Bilbault. Réaction semblable de la meneuse de jeu expérimentée, Gaëtane Thiney : « C’est notre meilleur parcours lors d’un premier tour de Coupe du monde. Ce n’est pas inquiétant. Une nouvelle compétition commence. Il va falloir désormais gagner tous les matchs. »

Le VAR favorable aux Bleues

Un implacable argument mathématique après tout, avant de s’attaquer à la phase à élimination directe, dimanche, au Havre (Seine-Maritime), les joueuses tricolores ont en effet encore leur avenir entre les mains.

Que le premier tir cadré de la rencontre ne soit intervenu qu’à la 65e minute de jeu et que le succès ait été acquis après un premier penalty raté et finalement retiré par Wendie Renard à cause d’une intervention du VAR (assistance vidéo à l’arbitrage), sanctionnant un léger pas en avant de la gardienne adverse, importent finalement peu.

Mais qu’a réellement pensé la sélectionneuse Corinne Diacre de la prestation de son équipe ? Sans avoir besoin de faire preuve d’une grande perspicacité, certainement pas que du bien. Mais la conférence de presse d’après match n’est ni le lieu, ni le moment opportun pour se livrer à une féroce autocritique.

Sans surprise, Diacre a préféré insister sur l’objectif atteint : « On en demande toujours plus. Maintenant, le contrat est rempli, on voulait aller chercher cette troisième victoire. On l’a fait, même si c’est dans la difficulté. J’ai presque envie de dire qu’on la savoure encore plus. Pour nous, c’était important de gagner, même dans la difficulté. »

« Ce troisième match de poule, c’est toujours difficile »

Enthousiasmantes lors du match d’ouverture (4-0), face il est vrai à de faibles Sud-Coréennes, persévérantes et collectives lors de leur deuxième sortie contre la Norvège (2-1), les Bleues, déjà qualifiées pour les huitièmes de finale, n’ont pas réussi à briser la malédiction du troisième match de poules, souvent décevant. On se consolera en rappelant que les enseignements à tirer d’une rencontre, où l’enjeu n’est pas vital et où l’équipe type est modifiée, sont en général loin d’être déterminants pour la suite d’une grande compétition.

Les protestations des joueuses nigérianes n’ont pas fait changer d’avis l’arbitre de la rencontre lundi à Rennes. / Vincent Michel / AP

En 2018, les Bleus de Didier Deschamps avaient ennuyé tous leurs supporteurs lors d’un triste 0 à 0 face au Danemark avant d’enflammer la Coupe du monde lors du tour suivant contre les Argentins et de décrocher leur deuxième étoile de champions du monde.

Deux ans auparavant, ils avaient échoué sur le même score à battre la Suisse à domicile, ce qui ne les avait pas empêchés de se hisser en finale de l’Euro. « Ce troisième match, quand on est déjà qualifiés, c’est toujours difficile. Les filles avaient certainement un peu peur de la blessure. La victoire n’est pas illogique, même si elle est un peu étriquée, avec ce but sur penalty », reconnaissait Corinne Diacre.

La dramaturgie des matchs à élimination directe

Bousculées par l’impact physique des Nigérianes, les Bleues, dont la solidité défensive a été saluée par leur coach, savent ce qu’elles ont à améliorer. « Nous avons péché dans la justesse de la dernière passe et nous aurions dû être plus mobiles devant. Nos appels doivent être plus tranchants », analyse la jeune Kadidiatou Diani.

Dans l’entrejeu, afin de soulager la capitaine Amandine Henry, souvent obligée de se démultiplier aux quatre coins du terrain, il faudra certainement aussi trouver d’autres solutions. Les Françaises ont tendance à user jusqu’à la corde du jeu sur les côtés, de manière peut-être trop stéréotypé.

Au prochain tour, les cartes seront redistribuées. C’est toute la magie de la Coupe du monde et c’est aussi ce qui la rend inégalable, tout comme la dramaturgie qu’elle parvient à réinventer à chaque édition. Rien ne remplace les matchs couperets, ceux où les scénarios les plus fous sont possibles et où se décident les destins des équipes.

Le 23 juin, en entrant sur la pelouse havraise du stade Océane, les Bleues sentiront cette tension et cette excitation, celles de n’avoir plus le droit à l’erreur pour continuer à rêver de leur première finale le 7 juillet, en banlieue lyonnaise.

Que le chemin passe par l’Australie, le Brésil ou l’Italie, les trois adversaires potentiels (le suspense prendra fin mardi 18 juin au soir), il faudra élever d’un cran, ou même de plusieurs, son niveau d’exigence.

« Je viens de jouer un match. Je suis en huitièmes de finale de Coupe du monde. Je vais me reposer et essayer de remettre mes pieds bien droit pour que les ballons rentrent. Et ça ira bien… », résume Gaetane Thiney. On en revient encore et toujours au réalisme.

Coupe du monde 2019 : la VAR est-elle efficace ?
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