Nucléaire : l’EPR de Flamanville connaît de nouveaux retards et ne pourra pas démarrer avant 2022
Nucléaire : l’EPR de Flamanville connaît de nouveaux retards et ne pourra pas démarrer avant 2022
Par Pierre Le Hir, Nabil Wakim
L’Autorité de sûreté nucléaire demande à EDF de reprendre huit soudures situées dans des endroits difficiles d’accès. Le réacteur ne pourra pas démarrer, au mieux, avant fin 2022.
Flamanville, le 18 novembre 2016. / CHARLY TRIBALLEAU / AFP
Le calvaire de Flamanville va-t-il un jour se terminer ? L’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a annoncé, jeudi 20 juin, qu’Electricité de France (EDF) devrait procéder à de nouveaux travaux sur le réacteur EPR (réacteur européen à eau pressurisée) de Flamanville, dans la Manche. Cette décision provoquera de nouveaux retards pour ce chantier, qui ne cesse d’accumuler les déconvenues. Démarré en 2007, il devait s’achever en 2012 et coûter 3,5 milliards d’euros. Avec ce nouveau retard, il ne devrait pas être en mesure de démarrer avant fin 2022 au mieux, et le coût de 11 milliards d’euros devrait encore être revu à la hausse.
En cause cette fois-ci : huit soudures qui traversent l’enceinte en béton du réacteur et que l’ASN demande à EDF de reprendre. Le PDG d’EDF, Jean-Bernard Lévy, s’attendait à cette décision. Le groupe public n’a pas communiqué de détails sur le retard et les surcoûts provoqués par cette décision, mais il « fera, dans les prochaines semaines, un point précis sur la suite du projet ».
Ces écarts de qualité ont été découverts, en février et en avril 2018, sur des soudures du circuit secondaire évacuant la vapeur vers la turbine. Certaines se révèlent alors non conformes avec la norme « haute qualité » – excluant la possibilité de rupture – choisie par EDF. D’autres ne respectent même pas la réglementation standard.
Mauvaise nouvelle pour le nucléaire français
EDF entreprend alors de reprendre 58 soudures, mais demande à l’ASN la possibilité de conserver huit autres en l’état. Et pour cause : ces soudures traversent l’enceinte de confinement du réacteur et les reprendre entièrement implique de modifier les structures de l’installation.
Le groupe d’experts réuni sur la question en avril par le gendarme du nucléaire avait souligné « la nature et le nombre particulièrement important des écarts survenus lors de la conception et de la fabrication de ces soudures ». EDF avait de son côté demandé à l’ASN l’autorisation de ne réparer ces soudures qu’en 2024, après le démarrage du réacteur. Dans une lettre transmise à l’ASN, le groupe public précise qu’une telle décision reporterait celui-ci au plus tôt à la fin de 2022.
Il s’agit d’une très mauvaise nouvelle pour EDF, mais aussi pour l’ensemble de la filière nucléaire française : le président de la République a demandé au groupe public de lui présenter à la mi-2021 un projet complet pour la construction de nouveaux réacteurs. Cette date avait justement été fixée pour que ce lancement soit réalisé après le démarrage de l’EPR de Flamanville. « La sagesse recommande d’attendre que l’EPR de Flamanville soit achevé avant de prendre des décisions », expliquait il y a un an le ministre de l’économie, Bruno Le Maire. L’ensemble de la filière nucléaire française devra donc attendre la prochaine élection présidentielle pour être fixée sur son sort.