« Too Old to Die Young », série américaine créée et réalisée par Nicolas Winding Refn. / AMAZON VIDEO

LA LISTE DE LA MATINALE

Il fait trop chaud pour dormir ? Cette semaine, trois nouveautés de haute volée accompagneront vos nuits blanches (ou autres !) : Euphoria s’intéresse aux ados sans fausse pudeur, Le Grand Bazar dresse un portrait familial décapant et Too Old to Die Young séduira les fans de Nicolas Winding Refn, réalisateur du cultissime Drive.

« Too Old to Die Young » : l’univers crépusculaire de Winding Refn

TOO OLD TO DIE YOUNG Official Trailer (2019) Nicolas Winding Refn, TV Series HD
Durée : 03:06

Depuis sa sortie, le 14 juin, sur Amazon Video Prime, Too Old to Die Young (« trop vieux pour mourir jeune »), du cinéaste Nicolas Winding Refn, déploie son tempo adagissimo, sa vacance dépressive, son absence apparente de rebond et son silence. Pour goûter pleinement cette lenteur à la fois désœuvrée et d’une grande plénitude, mieux vaut être adepte des longues arches (en musique, au théâtre, au cinéma ou en littérature) et sensible à l’art du microdéveloppement sur de très larges échelles. C’est ainsi qu’on goûtera pleinement cette élégie crépusculaire qui montre un personnage christique aller au bout d’un chemin semé sinon de croix du moins de crimes – dont les siens, qu’il commet au nom d’une morale visant à venger des victimes de pédopornographie, de viols et autres crimes à caractère sexuel.

Too Old to Die Young pousse plus loin encore l’érotisme et le fétichisme propres à l’univers de Winding Refn et porte un regard homoérotique sur le personnage joué par Augusto Aguilera, auquel s’oppose dans une chasse à l’homme implacable celui du policier incarné par Miles Teller, taiseux et irradiant de froideur.

On retrouvera dans Too Old to Die Young certaines thématiques clés typiques du cinéaste : images et plans composés avec un soin maniaque, travelling latéral, couleurs de néons saturées, couchers de soleil, découpes lumineuses et ombres portées, sabres et lames mutilantes, miroirs, fenêtres, corridors en perspective, inceste, nécrophilie. Sans oublier la musique de son compositeur fétiche, Cliff Martinez. Beaucoup trouveront insupportables la pénombre dans laquelle une grande partie de la série est plongée et la sophistication presque agressive des partis pris esthétiques. Pour notre part, Too Old to Die Young, en dépit de certaines outrances, nous aura bouleversés et fascinés. Renaud Machart

« Too Old to Die Young », série créée et réalisée par Nicolas Winding Refn. Avec Miles Teller, Augusto Aguilera, Jena Malone, Cristina Rodlo, John Hawkes, Nell Tiger Free, William Baldwin (Etats-Unis, 2019, 10 x 97 min). Sur Amazon Video Prime.

« Le Grand Bazar » : une comédie familiale rythmée et enjouée

Peut-être la comédie familiale à la française Fais pas ci, fais pas ça (2007-2017) aura-t-elle une « descendance ». Le Grand Bazar apparaît en avoir le potentiel : des personnages bien campés, des possibilités de rebondissements vaudevillesques à foison, une écriture acérée.

Passé une entrée en matière au forceps qui donne envie de fuir, Le Grand Bazar brosse le vivant portrait d’une famille recomposée. Un peu dans le ton de Scènes de ménage, le programme court et humoristique de M6 sur le quotidien de couples d’âges différents.

Ses deux personnages principaux, Samia et Nicolas Rousseau-Bensaïd, impeccablement interprétés par Nailia Harzoune et Grégory Montel (primé pour ce rôle au festival Séries Mania 2019), forment un couple « mixte » qui vient d’avoir son premier bébé. Mais inutile pour eux de rêver vivre à trois, chacun ayant des enfants d’une précédente union, des parents et ex-beaux-parents estimant avoir leur mot à dire en tant que grands-parents, sans oublier leurs ex, avec qui ils partagent la garde des enfants…

Nerveuse, rythmée, enjouée, cette série grand public alterne scènes comiques et moments attendrissants et emporte assez vite l’adhésion, tant pour son écriture que son interprétation. Martine Delahaye

« Le Grand Bazar », série créée par Baya Kasmi. Avec Nailia Harzoune, Grégory Montel (France, 2019, 6 x 55 min). A partir de ce mardi, sur M6 à 21 h 05, deux épisodes par soirée.

« Euphoria » : au cœur des tensions et tentations adolescentes

official trailer | euphoria | season 1 (hbo)
Durée : 02:35

En surfant à son tour sur la vague des séries pour ados, la chaîne américaine HBO ne recherche peut-être pas le scandale, mais elle ne fait rien pour l’éviter.

Dans Euphoria, on rencontre Rue, 17 ans, alors qu’elle vient de passer l’été en désintoxication… et qu’elle se précipite chez son dealeur habituel, pour supporter le retour à la maison et l’année scolaire qui s’annonce. Peut-être la tendre amitié qui va la lier à l’adorable Jules (une fille transgenre, dans la série comme dans la vie), nouvelle venue à l’école, la détournera-t-elle de cette incessante recherche d’étourdissement…

Mais Euphoria risque de faire grand bruit aux Etats-Unis pour une autre raison : les ados qui entourent Rue, jeunes d’aujourd’hui nés à l’ère du porno 2.0 disponible à tous et à toute heure, ont… une sexualité. Et, comble de l’audace, l’on y voit des pénis, filmés frontalement, inactifs ou en érection, « en direct » ou dans des sextos. La nudité féminine sous toutes les coutures, c’est bien et banal, mais les pénis…

Pourtant, l’essentiel n’est pas là. Au travers de son aspect parfois trash et de son apparente frivolité, Euphoria fait souffler un vent nouveau sur la recherche d’identité d’adolescents avançant à tâtons et prenant des risques avec une folle vigueur. La série frappe (enfin) au cœur des tensions et tentations de l’adolescence, en s’intéressant et en nous attachant particulièrement à ce que les filles traversent. M. D.

« Euphoria », série créée par Sam Levinson. Avec Zendaya Coleman, Hunter Shafer (Etats-Unis, 2019, 8 x 60 min). Sur OCS Go ou le lundi à 21.00 sur OCS City.