Devant la piscine de la Butte aux Cailles, à Paris, jeudi 27 juin. / Stéphane Mandard

A Paris, on ne peut toujours pas se baigner dans la Seine malgré les promesses de l’ancien maire de la capitale Jacques Chirac. Pour rendre la canicule plus supportable, les touristes ont trouvé la parade : ils se jettent (tout habillés ou en maillot de bain) dans les fontaines du Trocadéro pour un selfie devant la tour Eiffel. Les Parisiens moins téméraires, eux, prennent d’assaut les piscines. Leur fréquentation a bondi de plus de 50 % depuis le début de la semaine, selon les statistiques de la mairie. Mais il faut s’armer de patience. Paris ne compte que quarante établissements publics, dont une dizaine sont actuellement fermés pour travaux.

A Joséphine Baker, posée sur la Seine, on poireaute en plein cagnard sur le quai au pied des tours de la Bibliothèque nationale de France pour obtenir le précieux sésame. A Roger Le Gall, dans le 12e arrondissement, on fait la queue toute la journée pour profiter du bassin de 50 mètres découvert, de la pataugeoire et du solarium (très) légèrement ombragé. Bâche retirée, la piscine est passée en mode été depuis quelques semaines. Et peu importe que le bassin jouxte quasiment le périphérique, qui reste engorgé malgré la circulation différenciée décrétée pour contrer le pic de pollution à l’ozone.

« S’il faut attendre une demi-heure avant de pouvoir entrer, je me demande si c’était une si bonne idée »

Sur la Butte aux Cailles, dans le 13e arrondissement, on a installé des lignes comme dans les aéroports pour réguler le flux inhabituel de « nageurs ». Comme d’autres établissements municipaux, la piscine ouvre ses portes de 6 heures à 22 h 30 sans interruption depuis le début de la canicule. A 15 heures, jeudi 27 juin, le compteur électronique affichait 270 baigneurs. Et quasiment autant à s’impatienter à l’ombre le long du bâtiment de briques rouges, sur le trottoir. Stéphanie, en sueur, porte sa fille de 2 ans dans les bras. « Elle m’en parle depuis ce matin. Avec la chaleur, elle voulait absolument aller se baigner », dit la jeune mère. Garance acquiesce d’un hochement de tête derrière sa grosse tétine rose.

« S’il faut attendre une demi-heure avant de pouvoir entrer, je me demande si c’était une si bonne idée. »

A l’intérieur, ou plutôt à l’extérieur, car le bassin couvert, récemment rénové, est fermé pour cause de vidange, chaque centimètre carré est occupé par une serviette. Les maîtres-nageurs ont abandonné leur petit chalet en bois bien pratique l’hiver depuis que le bassin en plein air est ouvert en toute saison, mais irrespirable quand le mercure dépasse les 30 °C. Lunettes de soleil et chapeau de paille sur la tête, ils se sont réfugiés à l’ombre du mur qui délimite l’enceinte non olympique.

La canicule a fait d’autres victimes : les nageurs

Le « grand bain » ressemble à une pataugeoire. Le « petit bain » est sur le point de déborder, annexé par les collégiens du quartier qui ont terminé les cours. Emma et ses copines de 6e s’en donnent à cœur joie. Le reste de l’année, elles ne sont « pas très piscine » et ne la fréquentent que parce que « c’est au programme ». Mais avec la chaleur étouffante, elles trouvent ça finalement « super » et promettent de revenir pas plus tard que demain. Elles ont d’ailleurs écrit leur satisfaction sur le livre que les agents municipaux ont installé avant le tourniquet de sortie. Hormis quelques petits griefs. « Tout va très bien ! Sauf les cheveux dans les cabines… » Les agents de la Butte aux Cailles ont aussi eu la bonne idée de réduire la température de l’eau des douches. Un bonheur pour rafraîchir les corps. Un malheur pour la consommation d’eau.

La canicule a fait d’autres victimes dans les piscines parisiennes : les nageurs. A partir d’aujourd’hui, la mairie de Paris va réduire les créneaux horaires réservés aux clubs pour ouvrir plus largement au grand public.