« George Michael : Freedom » : un autoportrait de la « voix de l’ange »
« George Michael : Freedom » : un autoportrait de la « voix de l’ange »
Par Audrey Fournier
Le chanteur britannique se raconte dans cet émouvant documentaire achevé juste avant sa mort, en 2016.
C’est un curieux objet que George Michael venait de terminer lorsqu’il a été emporté par la maladie, le 25 décembre 2016, à l’âge de 53 ans. Autoportrait distancié, réalisé par lui-même et coproduit avec son ami le compositeur David Austin, George Michael : Freedom ressemble à un hommage que l’auteur-interprète britannique, sentant la mort approcher, aurait pris soin d’écrire pour lui-même. Cette démarche personnelle ne rend ce film d’une heure trente que plus touchant.
Fils d’une Anglaise et d’un Chypriote, physique de jeune premier, George Michael accède très jeune à la notoriété grâce aux tubes pop édulcorés qu’il chante aux côtés d’Andrew Ridgeley, l’autre moitié du groupe Wham!, formé en 1981. Sans renier ce début de carrière kitsch, le chanteur, qui veut plus que tout être « aimé et respecté », comme il le dit en voix off (le documentaire ne le voit jamais face caméra, sauf à l’occasion d’archives d’entretiens plus anciens), se lance en 1986 dans une carrière solo. A la faveur d’un tube, Faith, et d’un album du même nom, il devient en 1988, à 25 ans, l’artiste le plus vendu dans le monde. En dépit du succès, il confie pourtant n’avoir jamais été aussi malheureux de sa vie.
Showman accompli
Voix exceptionnelle, charisme hors du commun, gentillesse et générosité… De Naomi Campbell à Stevie Wonder, en passant par Tracey Emin ou Liam Gallagher, les stars se bousculent au micro pour faire l’éloge de ce brillant compositeur au timbre pur et chaleureux. Influencé par la soul, le funk et le R’n’B, il lui est reproché à la fin des années 1980 de marcher sur les plates-bandes des artistes noirs, avec lesquels il s’est beaucoup produit en duo (Whitney Houston, Aretha Franklin, Nile Rodgers…). Showman accompli, George Michael le solitaire n’est pourtant jamais autant à l’aise que sur scène, face à un public monstre : le film permet de revoir ses performances remarquées lors du festival Rock in Rio en 1991 (160 000 personnes au stade Maracana) et du concert hommage à Freddie Mercury en 1992 (90 000 personnes à Wembley), au cours duquel il offre une reprise de Somebody to Love restée dans les annales.
Queen & George Michael - Somebody to Love (The Freddie Mercury Tribute Concert)
Durée : 05:04
Sa brillante carrière est néanmoins émaillée d’accidents, mais le documentaire n’évoque naturellement que les plus « nobles » d’entre eux, à commencer par son combat contre les termes du contrat qui le lie à Sony, sa maison de disques, et le force à assurer la promotion de son album Listen Without Prejudice (1990). Mais le chanteur, supportant de plus en plus mal l’exposition médiatique qui va de pair avec sa carrière, décide, au faîte de sa gloire, de disparaître. Cela donnera en 1991 un tube, Freedom ! (que le producteur Mark Ronson qualifie de chef-d’œuvre comparable à La Joconde) et un clip mythique réalisé par David Fincher, dans lequel l’artiste s’efface au profit de cinq top-modèles alors très en vue.
George Michael - Freedom! ’90 (Official Music Video)
Durée : 06:36
George Michael évoque aussi longuement le drame personnel que furent la maladie et la mort en 1993 de son compagnon, Anselmo Feleppa, atteint du sida, ainsi que son tardif coming out public, en 1998. On ne s’étonnera guère que cet « auto-hommage » passe sous silence les démêlés du chanteur avec la justice et ses ennuis de santé dans les années 2010, pour mieux s’intéresser – à raison – aux concerts et albums de cette période, moins marquants d’un point de vue artistique mais impeccablement produits. Trente-cinq ans après ses débuts, la « voix de l’ange » résonne, intacte.
George Michael : Freedom, réalisé par George Michael et David Austin (R-U, 2017, 95 min).