Corruption : l’eau plus pure de la Saur
Corruption : l’eau plus pure de la Saur
Par Jean-Michel Bezat
Le numéro trois du secteur vient de décrocher une certification mondiale anti-corruption pour ses activités françaises.
La Saur, numéro trois français du secteur de l’eau. / Yann Castanier | Hans Lucas / Hans Lucas
C’est peu dire que les grands opérateurs du secteur de l’eau en France, comme Veolia et Suez, traînent encore une mauvaise réputation, largement héritée d’une époque où ils régnaient en maître sur le marché de l’adduction et du traitement de la précieuse ressource. Après plusieurs lois anticorruption, l’actualité judiciaire rappelle de temps à autre que ce secteur, certes moins prospère que naguère, n’a pas totalement rompu avec les vieilles pratiques.
La Saur, numéro trois français du secteur, veut afficher sa différence. « Le secteur pâtit d’une image encore dégradée, reconnaît son président exécutif, Louis-Roch Burgard. Il n’a plus les mêmes pratiques qu’il y a quinze ou vingt ans, mais cela lui colle à la peau. » Après trois ans de travail interne et l’audit d’un cabinet extérieur, son groupe de 9 000 salariés (1,25 milliard d’euros de chiffre d’affaires) a annoncé, lundi 15 juillet, l’obtention de la norme ISO 37001 pour ses activités françaises.
Adoptée fin 2016, l’année de la Loi Sapin 2 en France, ISO 37001 est la première certification mondiale anticorruption. A ce jour, six groupes français l’ont décrochée : Alstom, Crédit agricole, Eurotradia (commerce international), Engie, GTT (membranes de cuves pour méthanier) et Sofrecom, une filiale d’Orange. Est-ce la présence du fonds d’investissement suédois EQT, majoritaire depuis 2018, qui a poussé à cette démarche ? « L’entreprise était déjà très mobilisée, nous avons engagé cette démarche il y a près de trois ans », indique M. Burgard.
Un avantage concurrentiel
La nouvelle norme impose à l’entreprise de cartographier les risques et de définir un code de bonne conduite précis : respect du droit de la concurrence, traque des conflits d’intérêt et d’éventuels actes de corruption ou de trafic d’influences. Jusqu’au contrôle des cadeaux, des invitations d’élus ou des parrainages de manifestations. Elle doit aussi former des salariés. Presque tout l’encadrement a suivi une formation, soit environ 1 000 personnes sur 6 500 dans l’Hexagone. Enfin, la Saur promet d’assurer le suivi des engagements pris.
« Les salariés sont très décidés à avoir un comportement aussi intègre que possible, affirme son président. Les seuils de tolérance évoluent, et nous voulons être en avance sur la société. Il faut regagner la confiance des élus locaux et des consommateurs : s’ils ont une vision dégradée, nos messages sur les infrastructures ou la santé publique seront jugés de manière négative. » M. Burgard assure que son groupe prône la transparence, dans un secteur où l’eau est parfois trouble. « Nos clients ont accès aux données de notre système d’exploitation. On ne peut pas être corrupteur et transparent. »
Cette politique peut lui donner un avantage concurrentiel dans un secteur où la Saur doit se faire une place au soleil face aux géants Veolia et Suez. C’est une des raisons du choix stratégique qu’elle a fait : miser sur le développement à l’étranger, notamment les pays du golfe arabo-persique, pour atteindre 2 milliards de chiffre d’affaires, dont 30 % à l’international, au terme de son plan en 2022.