Elisabeth Borne, une bonne élève du macronisme pour l’écologie
Elisabeth Borne, une bonne élève du macronisme pour l’écologie
Par Éric Béziat
La ministre chargée des transports succède à François de Rugy, qui a démissionné mardi.
Elisabeth Borne le 23 mai 2018. / Charles Platiau / REUTERS
En nommant Elisabeth Borne ministre de la transition écologique et solidaire, mardi 16 juillet, le président de la République a choisi de faire monter d’un cran une travailleuse acharnée de la réforme macronienne. Tout s’est décidé en fin d’après-midi, après un entretien entre le premier ministre, Edouard Philippe, et celle qui n’était alors que sa ministre des transports.
Bourreau de travail (dernier mail à 2 heures, premier avant 7 heures), la nouvelle patronne de l’hôtel de Roquelaure, qui conserve le portefeuille des transports, a la réputation d’être exigeante voire impitoyable avec ses équipes. Au ministère des transports, elle a, entre autres, usé, en deux ans, deux directeurs de cabinet.
A son bilan, est évidemment accrochée la réforme de la SNCF promulguée en juillet 2018, menée à bien malgré l’opposition farouche des syndicats de cheminots et une grève historique de trois mois, de mars à juin. Elisabeth Borne y a joué un rôle pivot, conduisant une concertation longue et houleuse avec les représentants des salariés de la SNCF, sans se démonter et sans jamais rien lâcher sur les points durs de la réforme (fin du statut des cheminots, ouverture à la concurrence…).
« Calamity Borne »
En parallèle, elle a piloté le grand œuvre de son mandat, la loi d’orientation des mobilités (LOM), destinée à remplacer la vieille loi d’orientation des transports intérieurs datant de 1982. La LOM a été votée au printemps par le Sénat et l’Assemblée nationale qui n’ont toutefois pas réussi à se mettre d’accord sur une version finale en commission mixte paritaire. Elle sera de nouveau au menu des deux Assemblées à l’automne.
La LOM affiche, parmi ses objectifs, le verdissement des transports et multiplie les mesures en ce sens : interdiction des véhicules thermiques à carburant fossile d’ici à 2040, facilitation du développement des véhicules électriques, créations de « zones à faibles émissions » dans certains territoires, dispositions en faveur du vélo et du covoiturage, création d’un chèque mobilité pour ceux qui abandonnent leur voiture individuelle pour aller au travail, taxation des billets d’avion… De quoi justifier le transfert de cette ultra-spécialiste des transports au ministère voisin de l’environnement. Il faut dire qu’elle s’est confrontée pendant une bonne année aux dossiers de l’écologie politique en tant que directrice de cabinet de Ségolène Royal en 2014-2015. Coïncidence bienvenue : son nouveau directeur de cabinet, Guillaume Leforestier, nommé fin juin, a passé quatre ans au ministère de l’écologie. Elle va entrer dans le vif du sujet juste après la passation de pouvoirs, mercredi 17 juillet, au Sénat pour défendre la loi énergie-climat.
Elisabeth Borne a quand même ses détracteurs. Toute une partie du monde cheminot (elle est surnommée « Calamity Borne » sur les tracts de la CGT) et la gauche d’obédience communiste ou « insoumise » la honnissent, l’accusant d’enterrer le ferroviaire, en particulier le fret (la tenant responsable du fiasco du fameux train de fruits et légumes Perpignan-Rungis) et plus largement d’être la ministre de la fermeture des petites lignes.
Dans un autre registre, beaucoup la jugent trop « techno », trop campée sur ces certitudes. Sa raideur, son absence de rondeur politique n’a facilité la négociation ni avec les élus des territoires (contrairement aux éléments de langage diffusés par le gouvernement), ni lors des discussions budgétaires, même si elle est souvent montée au front face à Bercy et a réussi parfois à emporter le morceau, en particulier sur la reprise de 35 milliards d’euros de dette de la SNCF.