Au Chili, les autorités jésuites révèlent les violences sexuelles commises par un prêtre admiré
Au Chili, les autorités jésuites révèlent les violences sexuelles commises par un prêtre admiré
Par Christine Legrand (Buenos Aires, correspondante)
Renato Poblete est accusé d’au moins 22 cas de violences sexuelles commises entre 1960 et 2008.
Au Chili, le prêtre jésuite Renato Poblete était vénéré. Décoré, en septembre 2009, par l’ancienne présidente socialiste Michelle Bachelet, il avait été qualifié, à sa mort en février 2010, à l’âge de 85 ans, de « saint » par l’actuel président de droite Sebastian Pinera. Mais aujourd’hui, le prêtre modèle est accusé d’au moins 22 cas de violences sexuelles commises pendant près d’un demi-siècle, entre 1960 et 2008. Ce sont les conclusions d’un rapport, publié le 30 juillet à Santiago par la congrégation jésuite chilienne elle-même, après une enquête confiée à un avocat pénaliste de l’université du Chili qui, pendant six mois, a interrogé une centaine de personnes.
Le scandale a éclaté, en janvier, avec le témoignage d’une victime, Marcela Aranda, qui a dénoncé les viols à répétition que lui a fait subir Renato Poblete, entre 1985 et 1993. Agée aujourd’hui de 53 ans et enseignante de théologie de l’Université catholique dans la capitale chilienne, Marcela Aranda a révélé que le prêtre l’avait obligée, par trois fois, à avorter. Après ce témoignage bouleversant, à la télévision chilienne, d’autres victimes ont osé parler, certaines dénonçant des « agressions soudaines et violentes ». Quatre d’entre elles étaient mineures au moment des faits.
« L’enquête a montré de manière indiscutable que Renato Poblete a abusé sexuellement de manière grave, répétée et systématique, en s’abritant derrière le pouvoir que lui conférait son statut de prêtre, l’argent dont il disposait et le prestige dont il bénéficiait du fait de son travail apostolique », a reconnu Cristian Del Campo, la plus haute autorité jésuite au Chili. La Compagnie de Jésus a demandé pardon pour ce qu’elle a qualifié de « dure vérité », précisant que le rapport, de plus de 400 pages, sera transmis à la justice.
L’Eglise chilienne est ébranlée, ces dernières années, par une longue série de scandales d’abus sexuels, en particulier de pédophilie. En mai 2018, l’ensemble de l’épiscopat avait présenté sa démission au pape François. Parmi eux, l’archevêque de Santiago, le cardinal Ricardo Ezzati, 77 ans, accusé d’avoir couvert des prêtres pédophiles.