A gauche, les promoteurs de Notre primaire pressent les partis de s’engager
A gauche, les promoteurs de Notre primaire pressent les partis de s’engager
Par Camille Romano
Les instigateurs de l’appel pour une primaire des gauches et des écologistes ont dénoncé vendredi une « forme de duplicité » des responsables politiques.
Europe Ecologie Les Verts (EELV) European MP Yannick Jadot (R) gestures as he speaks next to French Economist Julia Cage (C) during a press conference of the collective "Notre primaire" (Our Primary) calling for a primary of the left and ecologist parties for the 2017 presidential election, on April 15, 2016 in Paris. / AFP / BERTRAND GUAY | BERTRAND GUAY / AFP
Ils sont souriants et détendus, et pourtant, pour les instigateurs de Notre primaire, l’heure est grave. Leur appel en faveur d’une primaire des gauches et des écologistes en vue de l’élection présidentielle de 2017 risque de ne pas se concrétiser. C’est qu’à gauche, les partis ne se décident pas à aller au-delà de la « bienveillance » vis-à-vis de cette initiative. « Bienveillance ne signifie pas engagement », nuance Yannick Jadot, l’un des promoteurs de l’appel. Vendredi 15 avril, les acteurs de Notre primaire ont donc sommé les partis de gauche de cesser de « tergiverser » et de s’engager « clairement ».
Dans leur viseur, en vrac, le Parti socialiste, Europe Ecologie-Les Verts, le Parti communiste. Les deux premiers, pour le « flou » des motions adoptées le week-end dernier à propos de leur participation au vote. Si PS et EELV ont accepté le « principe » de leur participation aux primaires, ils restent prudents, et tentent d’imposer leurs conditions. Daniel Cohn-Bendit a ainsi raillé le texte adopté par EELV : « Mais pour qui ils se prennent enfin ? » Au PS, la motion, adoptée samedi 9 avril, annonçait « accueillir avec intérêt la démarche » : le terme de « soutien », auparavant utilisé, avait disparu.
Quant au PCF, il est attaqué pour son refus en bloc de la candidature de François Hollande. Refus qui fait reculer le Parti socialiste, son secrétaire général, Jean-Christophe Cambadélis, ayant affirmé que François Hollande était le « candidat naturel du PS » pour la présidentielle.
Sans changement, « d’ici au mois de juin, c’est mort »
Daniel Cohn-Bendit a prévenu l’assistance :
« Si les partis ne changent pas d’attitude d’ici au mois de juin, c’est mort. »
Pour tenter de sauver leur initiative, les organisateurs de Notre primaire ont dévoilé , dans un texte intitulé « Fini de tergiverser », trois « principes fondamentaux » sur lesquels les partis doivent être d’accord pour participer à la primaire :
L’ouverture de la primaire à tous les citoyens se reconnaissant dans les valeurs de la gauche et de l’écologie et à l’ensemble des partis et des mouvements de la gauche et des écologistes. Ce premier principe veut aussi interdire à un parti d’empêcher la participation de plusieurs candidats, ce que voudrait faire le PS.
- Un calendrier qui devra être tenu : le vote se tiendrait en décembre 2016, précédé d’une période de cinq semaines de débat pour permettre à tous les candidats de s’exprimer, et à des candidats moins médiatiques d’émerger. Ce calendrier doit être adopté en juin au plus tard, insiste le comité organisateur.
- L’engagement des perdants de ne pas présenter ou soutenir de candidats concurrents à celui qui sortira gagnant de la primaire. « Ils ne sont pas obligés de le soutenir, c’est moins contraignant », a plaidé Yannick Jadot. Le gagnant devra intégrer dans son équipe des représentants des perdants.
Porter la responsabilité d’un nouveau 21 avril
S’il « souhaite fortement » que tous les partis adhèrent à ces principes d’ici au mois de juin, le comité organisateur n’exclut pas la possibilité d’un refus. « Mais dans ce cas, que ça soit clair ! », exhortent Daniel Cohn-Bendit et Yannick Jadot.
Si un parti se fiche que le prochain Président soit le gagnant de la primaire @lesRepublicains, qu'il le dise ! https://t.co/h8R3UPkkkH
— notreprimaire (@notreprimaire)
Il n’est pas non plus question d’absoudre ceux qui décideraient de se retirer : ils « porteront la responsabilité d’un nouveau 21 avril », comme l’ont répété plusieurs des organisateurs, dont l’économiste Julia Cagé :
« Plus la gauche est fracturée, plus la primaire est nécessaire. Car une gauche fracturée augmente les chances d’un nouveau 21 avril. »
Plusieurs des organisateurs se sont montrés pessimistes sur la tenue de la primaire : Daniel Cohn-Bendit en avait déjà fait part dans un entretien au Monde. Il est rejoint dans le « courant pessimiste » par Romain Goupil. Pour le cinéaste :
« [Les partis] continuent à fonctionner avec des logiques d’appareil, et ça ne va pas le faire. »
Conscients de leur faible poids auprès des partis, les organisateurs de la primaire tentent de faire pression en faisant appel aux médias, mais aussi en appelant les citoyens à « s’emparer » de cette primaire, et à interpeller leurs responsables politiques. Tous insistent : sur le terrain, les militants qu’ils rencontrent ont envie de débattre avec les autres partis de la gauche.
Pessimistes et optimistes repartent donc, en espérant que leur initiative n’a pas été mise à mort par le manque de volonté des partis de travailler ensemble, et notamment par l’annonce de François Hollande d’annoncer sa décision quant à la candidature à la fin de l’année 2016. Soit pendant la période prévue pour le vote des primaires.