Budget 2017 : la défense doit jongler entre ses grands programmes
Budget 2017 : la défense doit jongler entre ses grands programmes
Par Nathalie Guibert
Plus de 17 milliards d’euros d’investissements sont prévus dans les équipements militaires ; le montant des programmes lancés mais non financés se monte, lui, à 35,6 milliards d’euros.
En 2017, trois avions de transport stratégique A 400M, six hélicoptères d’attaque Tigre (photo), une quatrième frégate multimissions (Fremm), des avions légers de renseignement, ou encore un premier lot de missiles de croisière navals seront livrés. | KAY NIETFELD / AFP
Avec plus de 17 milliards d’euros d’investissements prévus dans les équipements militaires, le ministre de la défense peut être satisfait de son budget pour 2017. Jean-Yves Le Drian a ainsi confirmé à l’ouverture du salon Euronaval, mardi 18 octobre, qu’il notifierait au printemps le contrat du nouveau programme des Frégates de taille intermédiaire (FTI). Celui-ci ne peut plus attendre si la marine veut pouvoir compter sur quinze frégates de premier rang comme elle le souhaite à l’horizon 2029. Selon La Tribune, les cinq FTI coûteront près de 4 milliards d’euros.
Après les attentats qui ont frappé la France en 2015 et 2016, l’Etat s’apprête à dépenser 600 millions d’euros de plus pour ses armées en 2017 – soit 32,4 milliards d’euros, 40,5 milliards au total si l’on inclut les pensions. L’effort comprend la création nette de quelque 500 emplois, en lieu et place de plusieurs milliers de suppressions. La loi de programmation militaire de 2014 à 2019 avait initialement prévu un plan social massif de 33 600 départs.
L’Etat vit au-dessus de ses moyens
C’est ainsi que seront livrés, en 2017, trois avions de transport stratégique A 400M, six hélicoptères d’attaque Tigre, une quatrième frégate multimissions (Fremm), des avions légers de renseignement, ou encore un premier lot de missiles de croisière navals. Les crédits consacrés à l’équipement des forces réservent aussi 3,1 milliards pour la dissuasion.
Mais l’Etat vit au-dessus de ses moyens, et la « bosse budgétaire » – les programmes lancés mais non financés – se monte comme en 2016 à 35,6 milliards d’euros. Depuis des années, nombre de grands programmes ont été étalés dans le temps, ou ont vu leur cible d’acquisition réduite. Les très attendus avions ravitailleurs multirôle MRTT, une lacune ancienne de la défense française, sont tous reportés après 2017. La défense a dû procéder à l’achat en urgence de quatre C 130 américains, dont le premier doit être livré dans quelques mois. L’armée de terre, qui vit dangereusement avec ses véhicules de l’avant blindés (VAB) vieux de quarante ans, doit attendre 2018 pour percevoir ses premiers « Griffon », censés les remplacer.
« Retard industriel »
Les documents budgétaires pour 2017 ont révélé que le premier exemplaire du nouveau sous-marin nucléaire d’attaque de la classe Barracuda ne serait pas livré en 2017 comme prévu mais en 2019. Un premier décalage calendaire avait été enregistré au cours des années précédentes pour des raisons budgétaires sur ce programme, estimé à 9 milliards d’euros au total d’ici à 2029 pour six navires. Cette fois, le report est « dû à un retard industriel », selon Bercy. Le premier Barracuda, baptisé Suffren, est d’ores et déjà assemblé à Cherbourg. Les problèmes « relèvent de la mise au point toujours délicate du prototype », assure l’industriel DCNS pour qui « cela ne changera pas le cadencement des livraisons prévues jusqu’en 2029 ». La difficulté sera, pour la marine, de devoir prolonger le vieux Rubis, sous marin-livré en 1983, et de continuer à former des équipages sur les deux types de navires.
En dépit des nouveaux efforts budgétaires, le rythme des programmes d’équipement, conjugé au surengagement de l’armée en opérations, la conduit à « manger son capital », ce qui n’est pas tenable à terme. Les documents financiers témoignent des trop faibles taux de disponibilité des matériels pour ce qui concerne les hélicoptères de manœuvre (49 %) et d’attaque (58 %) de l’armée de terre, ou les avions de patrouille maritime (54 %). Autre indicateur de tension, les activités d’entraînement restent inférieures aux normes requises.