Affaires des corticoïdes : une impression de légèreté
Affaires des corticoïdes : une impression de légèreté
Par Yann Bouchez, Clément Guillou
Si l’ouvreur du Racing 92 n’a pas enfreint les règles antidopage, le traitement suivi par Dan Carter interroge sur le caractère routinier des infiltrations chez le club champion de France.
De gauche à droite: l’entraîneur du Racing 92 Laurent Labit, Laurent Travers, le président Jacky Lorenzetti et le docteur Sylvain Blanchard lors d’une conférence de presse le 28 octobre. | THOMAS SAMSON / AFP
Il n’est pas sûr que l’interview que Dan Carter nous a accordée éteigne le débat sur l’utilisation des corticoïdes. L’ouvreur du Racing 92 n’a certes pas enfreint les règles antidopage, comme l’a confirmé la commission de lutte contre le dopage de la Fédération française de rugby. Mais l’impression de légèreté qui entoure le traitement de Carter interroge sur le caractère routinier des infiltrations chez le club champion de France – de 60 à 80 par saison, selon l’entraîneur adjoint, Ronan O’Gara.
Ainsi, la star néo-zélandaise a-t-elle bénéficié d’une infiltration au genou droit six jours avant la finale du Top 14 pour, selon ses termes, « une petite inflammation » constatée au lendemain de la demi-finale. Carter était resté sur le terrain jusqu’au bout de la prolongation – cent minutes de jeu –, offrant la victoire d’une transformation, à une minute du terme.
Après deux jours hors des terrains mais marqués par des exercices dans la piscine, des massages, des étirements et de la cryothérapie, il s’entraînait de nouveau. Quatre jours après, il remportait une finale de très haut niveau. Un calendrier à comparer aux huit jours de repos qu’impose l’Union cycliste internationale après une infiltration de corticoïdes.
Confiance absolue
Aurait-il pu jouer sans cette infiltration ? Lui ne s’est pas posé la question. A-t-il bénéficié d’un traitement à base de corticoïdes uniquement parce qu’il s’agissait d’une finale ? Non, nous a-t-il répondu en souriant, renvoyant à une infiltration subie pendant la saison régulière. Le club nous précisera plus tard qu’il s’agissait de mésothérapie, un traitement à base d’anti-inflammatoires non stéroïdiens, à l’inverse des corticoïdes.
C’est peut-être là le plus stupéfiant : comme il l’a répété à de nombreuses reprises, Dan Carter place une confiance absolue dans le médecin du Racing – ou s’abrite derrière lui. Lors de l’entretien, il ne s’est d’abord pas souvenu avoir signé la fiche de consentement réglementaire avant ses infiltrations. Il l’a signée, a ensuite certifié le club puis… le joueur lui-même. Il n’a pas demandé à bénéficier de ce traitement décrit par les médecins du sport comme un dernier recours, c’est le médecin qui l’a lui-même proposé, assurant qu’il ne savait même pas que les corticoïdes pouvaient être administrés d’une autre manière.
La légende des All Blacks semble authentiquement surprise par la polémique. Dan Carter ne cache d’ailleurs pas avoir subi une infiltration de corticoïdes dans la semaine précédant une demi-finale de Coupe du monde, à l’automne 2015, et, comme il le dit lui-même : « Quand il y a une solution possible qui ne sort pas du cadre des règles antidopage, ce serait stupide de ne pas s’en servir. »