Au Mali, violences et désaffection des électeurs ont marqué les municipales
Au Mali, violences et désaffection des électeurs ont marqué les municipales
Le Monde.fr avec AFP
Le scrutin de dimanche, destiné à élire 12 000 conseillers municipaux, n’a pas pu se tenir dans plusieurs zones tenues par des groupes rebelles.
Les avertissements et mises en garde se sont vérifiés au Mali : les élections communales, dimanche 20 novembre, ont été perturbées par une série de violences et d’intimidations qui se sont soldées par la mort de cinq militaires et un civil, et une participation en berne.
Ni les résultats ni le taux de participation global de cette première consultation depuis l’élection du président Ibrahim Boubacar Keïta en 2013, constamment repoussée depuis deux ans, n’étaient connus mardi matin.
Ce scrutin dans un pays sous état d’urgence coïncidait avec le premier anniversaire de l’attentat djihadiste contre l’hôtel Radisson Blu de la capitale malienne, Bamako, qui avait fait 20 victimes, outre deux assaillants tués.
« Intégrer le processus de paix »
Le nord du Mali était tombé en mars-avril 2012 sous la coupe de groupes djihadistes liés à Al-Qaida. Ces groupes en ont été en grande partie chassés à la suite du lancement, en 2013, à l’initiative de la France, d’une intervention militaire internationale, qui se poursuit actuellement.
Mais des zones entières échappent au contrôle des forces maliennes et étrangères, malgré la signature en mai-juin 2015 d’un accord de paix censé isoler définitivement les djihadistes. Longtemps concentrées dans le nord, les attaques se sont étendues à partir de 2015 vers le centre, puis le sud du pays.
Preuve de cette instabilité persistante, dimanche soir, après le vote, un convoi de l’armée qui transportait des urnes en vue du dépouillement est tombé dans une embuscade au nord de Douentza (centre), faisant cinq tués parmi les militaires, selon des sources de sécurité maliennes. Les assaillants « n’ont pas pu emporter les urnes », a affirmé l’une de ces sources, soulignant qu’« ils voulaient saboter les élections ».
Par ailleurs, dans la nuit de dimanche à lundi, des jihadistes présumés ont pris brièvement le contrôle de la localité de Dilli (nord), près de la frontière mauritanienne, tuant un civil, a indiqué à l’AFP un élu de Nara, à 370 km au nord de Bamako.
« Ils ont attaqué la sous-préfecture », emportant deux ambulances et un véhicule du sous-préfet, a précisé cet élu. Selon une source de sécurité malienne, les assaillants pensaient sans doute trouver dans la sous-préfecture la commission locale de dépouillement des bulletins de vote.
La seule éclaircie sur le terrain est venue de l’annonce par un mouvement armé du centre du pays, l’Alliance nationale pour la sauvegarde de l’identité peule et la restauration de la justice (ANSIPRJ), de son ralliement au processus de paix.
« Nous avons décidé de déposer les armes, et d’intégrer le processus de paix », a déclaré à l’AFP Oumar Aldjana, secrétaire général de l’ANSIPRJ, qui revendique quelque 700 combattants, malgré une scission en septembre.
Matériel électoral brûlé
Sur le plan électoral, les opérations de dépouillement se poursuivaient mardi matin. A Bamako, dans trois des six communes, la participation avoisinait les 25 %, a indiqué à l’AFP un responsable du gouvernorat de la capitale, où l’on redoutait un taux inférieur à 20 %.
Plus de 7,2 millions d’électeurs étaient appelés aux urnes pour désigner à la proportionnelle quelque 12 000 conseillers municipaux, dont les mandats sont échus depuis 2014.
Officiellement, seules 15 des 703 communes ne comportaient pas de listes, mais dans les faits le scrutin n’a pu se tenir dans de nombreuses communes du nord et du centre du pays en raison de l’insécurité ou de l’opposition de groupes armés.
Ainsi, il n’a pas eu lieu à Kidal (nord-est), bastion de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA, ex-rébellion), où quelques centaines de personnes ont manifesté et où les drapeaux du Mali et de l’ONU ont été brûlés, selon une source militaire étrangère sur place.
La CMA avait dénoncé l’« entêtement du gouvernement » à organiser ce scrutin avant l’installation dans le nord des autorités intérimaires prévues par l’accord de paix et le retour des dizaines de milliers de réfugiés et de déplacés.
A Tombouctou (nord-ouest), où du matériel électoral a été enlevé et brûlé au cours d’attaques distinctes, si le vote s’est déroulé normalement en ville, il n’a en revanche pu se tenir dans de nombreuses communes de la région.