En 2012, l’EM Lyon Business School et Centrale Lyon ont été parmi les premiers établissements français à ouvrir ensemble leur « learning lab », laboratoire consacré à l’innovation pédagogique. Chaises et tables à roulettes pour se déplacer à l’envi, murs écritoires et Post-it électrostatiques pour noter ses idées, écrans connectés pour partager le fruit de ses réflexions… Tout a été conçu pour favoriser l’interactivité et la collaboration. « Ce centre d’expérimentation devait susciter un intérêt pour l’innovation pédagogique et intégrer celle-ci dans les écoles, explique Thierry Picq, directeur académique de l’EM. Aujourd’hui, le learning lab a pleinement joué son rôle et, à terme, il a même vocation à disparaître. »

Des salles modulables

Depuis deux ans, l’école de commerce a entamé sa transformation numérique, investissant plusieurs millions d’euros pour réorganiser les espaces de travail et équiper les salles de mobilier flexible, d’écrans et de tableaux blancs interactifs. « Il n’y avait pas tout ce matériel quand j’ai intégré l’école, en 2013 », témoigne Pierre-Antoine Canova, aujourd’hui en quatrième année. « Maintenant, on peut facilement se réunir dans des salles totalement modulables : on déplace les chaises, on se connecte pour projeter sa présentation PowerPoint et on la modifie à plusieurs, en tapant sur le clavier ou en écrivant directement sur l’écran avec un stylet. C’est plus confortable que de se retrouver à quatre ou cinq derrière un ordinateur ! », estime le jeune homme. Et d’insister : « Ce sont de petits détails, mais qui comptent. »

Désormais, les admissibles au concours sont même accueillis par des robots de télé-présence : une manière pour l’EM Lyon de mettre en avant ces produits high-tech qui permettent aux élèves hospitalisés de continuer à suivre leur scolarité à distance, ou à un enseignant de participer à un jury de soutenance à laquelle il ne peut se rendre.

« Tout est fait pour favoriser les croisements et les échanges entre les étudiants, les diplômés, les entreprises : les salles de cours sont des espaces que l’on peut créer et reformater en fonction des besoins. »

Symbole de ce changement, une nouvelle bibliothèque a vu le jour. Baptisée « Creativity and Learning Hub », elle se veut un lieu où l’on peut aussi bien s’isoler, affalé dans un pouf, que travailler en groupe dans l’un des petits espaces vitrés prévus à cet effet, discuter autour d’une table basse ou encore tester un jeu vidéo. « Nous avons particulièrement travaillé sur la lumière et le son, d’habitude négligés, de manière à ce que que les différents utilisateurs puissent se côtoyer sans se gêner », précise Thierry Picq. Quant à la cafétéria, elle est devenue un lieu à la fois de détente et de travail, où il est possible de grignoter tout en révisant ses cours.

C’est aussi dans cet esprit qu’a été pensé le campus parisien ouvert à la rentrée 2016 par l’école lyonnaise et qui constitue, d’après Thierry Picq, « la matérialisation la plus avancée de cette nouvelle vision des lieux d’apprentissage », car ils sont partis « d’un espace vierge ». « Tout est fait pour favoriser les croisements et les échanges entre les étudiants, les diplômés, les entreprises : les salles de cours sont des espaces que l’on peut créer et reformater en fonction des besoins », décrit l’enseignant.

Maîtriser le travail collaboratif

Cette reconfiguration physique des lieux correspond à une transformation pédagogique axée sur le « social learning » : « Tous les cours utilisent des outils communautaires. Il faut que les étudiants maîtrisent le travail collaboratif », martèle Thierry Picq.

Dans cette perspective, l’EM Lyon a développé une plate-forme spécifique, Connections, qui « fonctionne comme un forum, avec différents groupes pour les cours, l’emploi du temps, la scolarité… », énumère Pierre-Antoine Canova, qui apprécie d’avoir « toutes les informations centralisées à un endroit, sans être obligé d’aller chercher sur le site ou dans ses mail  ». Pour l’étudiant, il est aussi « plus facile de poster un message sur le forum dédié que d’aller voir le professeur à la fin du cours. On sait qu’il aura le temps de regarder et on ose aussi davantage poser une question ».

Les échanges virtuels portent, notamment, sur les projets qui se développent dans le cursus. Le cours de marketing fondamental, par exemple, n’est plus dispensé sous la forme d’un cours théorique suivi de lectures complémentaires puis d’études de cas : il est désormais centré sur un projet comme l’organisation d’une campagne de marketing.

Des ressources sont mises à disposition des étudiants en ligne, un quiz permet de vérifier l’acquisition de certaines notions de base tandis qu’un tutorat à la carte est proposé à ceux qui souhaitent avoir de l’aide. Etudiants et enseignants communiquent ainsi entre eux via le réseau social tout au long du projet. Celui-ci s’achève par un concours de pitchs durant lequel les équipes doivent présenter un produit concret, qu’il s’agisse d’une vidéo ou d’un mug. « Ce processus pédagogique très formalisé est représentatif du mouvement que nous voulons impulser dans l’ensemble de nos cours », affirme Thierry Picq. Un passage à l’échelle auquel doit désormais s’attaquer l’école si elle veut achever sa mutation.