Les bons et les mauvais arguments de François Hollande pour défendre son bilan
Les bons et les mauvais arguments de François Hollande pour défendre son bilan
Par Samuel Laurent, Anne-Aël Durand, Adrien Sénécat
Economie, chômage, Europe… Tour d’horizon des déclarations du chef de l’Etat, jeudi 1er décembre, dans le discours où il a annoncé ne pas briguer de second mandat présidentiel.
François Hollande ne sera pas candidat à l’élection présidentielle de 2017. Il en a fait l’annonce jeudi 1er décembre depuis l’Elysée. Mais, s’il ne brigue pas de second mandat, le chef de l’Etat a également défendu point par point son action depuis mai 2012, confessant un seul regret : le fait d’avoir proposé la déchéance de nationalité. A tort ou à raison ? Nous avons passé ses arguments en revue.
Chômage : des « résultats » trop fragiles
CE QU’IL A DIT
« L’engagement majeur était de faire baisser le chômage. (…) Les résultats arrivent, plus tard que je ne les avais annoncés. Mais ils sont là. »
POURQUOI C’EST DISCUTABLE
François Hollande s’était d’abord engagé à inverser la courbe du chômage avant la fin de 2013. L’objectif n’a pas été tenu, mais le chef de l’Etat a décidé de poursuivre son engagement sur ce front, liant son hypothétique candidature à une reprise du marché de l’emploi.
Techniquement, on peut considérer l’objectif comme tenu ces derniers mois. En effet, le nombre de demandeurs d’emplois sans activité mesuré par Pôle emploi (catégorie A) a reculé en France métropolitaine en septembre et en octobre 2016. Même chose si on compte également les demandeurs d’emploi en activité partielle (catégories B et C).
Le constat est un peu moins reluisant si l’on regarde le deuxième indicateur de l’emploi en France, le taux de chômage mesuré par l’Insee. Ce dernier a d’abord baissé du premier au second trimestre 2016, passant de 9,9 à 9,6 %, avant de remonter légèrement au troisième trimestre (9,7 %).
On peut donc dire, quel que soit l’indicateur retenu, que le chômage se situe aujourd’hui plus ou moins clairement en dessous du plus haut atteint pendant le mandat de François Hollande. Reste que cette « inversion de la courbe » est toute relative par rapport à la hausse du chômage constatée depuis mai 2012, ce qui ternit clairement le bilan présidentiel sur le front de l’emploi.
Economie : des comptes publics en meilleure santé
CE QU’IL A DIT
« Les comptes publics ont été assainis. […] La Sécurité sociale est à l’équilibre et la dette du pays a été préservée. »
POURQUOI C’EST PLUTÔT VRAI
Le régime de retraite des salariés du privé devrait en effet revenir à l’équilibre en 2016, selon le projet de loi de financement de la Sécurité sociale adopté à la fin de 2015. Si le résultat est conforme aux prévisions, ce serait une première depuis 2004. Notre système de protection sociale dans son ensemble, en comptant la branche vieillesse, reste néanmoins dans le rouge, mais nettement moins qu’en 2011.
Sur le déficit, François Hollande dit également plutôt vrai : il était de 4,8 % du PIB en 2012 ; il est de 3,5 % en 2015, selon l’Insee. Un bémol tout de même : le chef de l’Etat promettait initialement de faire mieux (à savoir 3 % de déficit) dès 2013, et même d’arriver à l’équilibre en 2017.
Société et institutions : des réformes à son actif
CE QU’IL A DIT
« J’ai fait avancer les libertés, l’égalité entre les couples a été renforcée. J’ai modernisé notre démocratie avec la réforme territoriale. »
François Hollande a effectivement fait voter en mai 2013 la loi autorisant les unions entre personnes de même sexe, malgré de nombreuses et importantes manifestations d’opposants. Il a en revanche renoncé à autoriser les lesbiennes à accéder à la procréation médicalement assistée, qui était pourtant une promesse de campagne.
La réforme territoriale, qui a fait passer le nombre de régions de 22 à 13, restera également à son actif, de même que la loi limitant le cumul des mandats.
Education : une hausse des moyens toute relative
CE QU’IL A DIT
« J’ai voulu que l’école dispose des moyens indispensables qui lui avaient été ôtés. »
POURQUOI C’EST DISCUTABLE
La dépense intérieure d’éducation (DIE) est un indicateur qui permet de mesurer le poids de cette dernière dans les comptes publics. Elle était de 7 % du PIB en 2010, puis de 6,75 % en 2012. En 2014, elle était remontée à 6,8 %.
Néanmoins, les moyens consacrés à l’école n’ont pas retrouvé leur niveau de 2010. Et, malgré les créations de postes dans l’éducation, le nombre d’élèves par classe a continué d’augmenter, en raison d’une hausse des effectifs plus importante que celle du personnel.
Europe : la fin de l’austérité, vraiment ?
CE QU’IL A DIT
« Au niveau européen, j’ai agi en notre nom pour que l’austérité puisse être enfin terminée. »
POURQUOI C’EST PLUS COMPLIQUÉ
Contrairement à ce qu’il affirme, François Hollande n’a pas réellement pu infléchir les grandes orientations économiques de l’Union européenne. Certes, il a réussi à faire adopter un pacte de croissance à ses homologues en 2012. Mais, sur les « 120 milliards d’euros » annoncés, seule une maigre partie (10 milliards d’euros environ) représentait des investissements supplémentaires, le reste étant une réorientation de fonds existants.
Par ailleurs, si le chef de l’Etat a obtenu un délai pour le respect de la règle des 3 % de déficit par la France, il n’a pas obtenu de réelle remise en cause de cette dernière.
On peut néanmoins noter son implication dans la gestion du dossier grec, contribuant à éviter une sortie du pays de l’Union européenne à l’été 2015. Une implication saluée par la gauche en Grèce lors d’une visite dans le pays en octobre de la même année.