Premières élections post-Brexit après la démission d’un ministre d’Irlande du Nord
Premières élections post-Brexit après la démission d’un ministre d’Irlande du Nord
Par Philippe Bernard (Londres, correspondant)
Un désaccord sur les énergies renouvelables provoque de nouvelles élections. Le parti de Martin McGuinness souhaite rester dans l’Union européenne alors que la première ministre est pro-Brexit.
Martin McGuinness au 10 Downing street, Londres, en octobre. | DANIEL LEAL-OLIVAS / AFP
La crise politique provoquée lundi 9 janvier par la démission du vice-Premier ministre d’Irlande du Nord Martin McGuinness, 66 ans, chef des négociateurs du Sinn-Fein pendant le processus de paix et ancien chef de l’Armée républicaine irlandaise (IRA) déstabilise la province du Royaume-Uni déjà ébranlée par la perspective du Brexit qu’elle a rejetée à 56 %. M. McGuinness (nationaliste) qui partage le pouvoir régional avec le Parti unioniste démocrate (DUP ; pro britannique) a justifié sa décision par le refus de sa partenaire dans le gouvernement régional, la première ministre Arlene Foster, de démissionner pour faciliter une enquête sur le scandale « cash for ash » (« de l’argent pour des cendres «) dont elle est accusée d’être responsable.
L’opposition à Mme Foster met en cause un programme de subventions destiné à développer les énergies renouvelables qu’elle a mis en place en 2012 lorsqu’elle était ministre des entreprises. Formidablement avantageux, il aurait donné lieu à des abus qui se traduisent par un manque à gagner de 400 millions de livres (460 millions d’euros) pour les finances publiques. Le programme a été stoppé en février 2016 après qu’un lanceur d’alerte a cité l’exemple d’un fermier éligible à une aide d’un million de livres en vingt ans (1,15 million d’euros) pour chauffer un hangar vide. Mais les fonds doivent continuer à être versés pendant deux décennies aux heureux bénéficiaires.
Elections à l’assemblée régionale
Le système complexe de partage du pouvoir consécutif aux accords de paix de 1998 prévoit que le gouvernement tombe si l’un des deux membres de l’attelage exécutif fait défection. Le Sinn-Fein n’ayant pas l’intention de remplacer M. McGuinness, des élections à l’assemblée régionale devraient avoir lieu dans environ sept semaines. L’affaire du « cash for ash » pourrait ne constituer qu’un prétexte pour une campagne électorale plus large.
Alors que le DUP de Mme Foster a appelé à voter en faveur du Brexit, le Sinn Fein de M. McGuinness, seul parti à être représenté dans les deux Irlandes, milite pour le maintien dans l’Union Européenne. La perspective d’une reconstitution de la frontière interne, qui a de fait disparu depuis les accords de paix mais va devenir une frontière extérieure de l’UE après le Brexit, inquiète les Irlandais, au nord comme au sud. Martin McGuinness estime que le Brexit pose rien moins que la question de la réunification de l’Irlande et prône un référendum. L’élection régionale qu’il vient de provoquer et qu’il espère gagner, pourrait être un moyen pour les nationalistes de poser publiquement la question de l’avenir post-Brexit de l’île.