Sélection albums : Brent Cash, Grandaddy, Manuel de Falla…
Sélection albums : Brent Cash, Grandaddy, Manuel de Falla...
A écouter cette semaine : des chansons parfaites en provenance d’Athens, des fresques pop délirantes venues de Modesto, un ballet espagnolisant...
- Brent Cash
The New High
Pochette de l’album « The New High », de Brent Cash. | MARINA RECORDS/DIFFER-ANT
Musicien originaire de la ville d’Athens (Géorgie), l’Américain Brent Cash a d’abord été batteur dans divers groupes plus ou moins confidentiels. En 2008, son premier album, How Will I Know If I’m Awake l’avait révélé en chanteur à la voix douce, multi-instrumentiste et auteur-compositeur de merveilles pop, autant dans des atmosphères impressionnistes que dans des envols lumineux. How Strange It Seems, en 2011, confirmait son talent. Comme ce nouvel et troisième album The New High, publié comme les autres par Marina Records, compagnie de Hambourg. Moins orchestral que les précédents où un ensemble de vents notamment venait habiller certaines chansons. Harmonies vocales, assise du piano, volutes de guitare, quelques sonorités de claviers anciens, rythmique fluide, tout y est, un rien plus dépouillé avec le seul apport d’un quatuor à cordes. Ce qui donne douze chansons pop parfaites, dans l’interprétation, la réalisation toute en délicatesse et précision. Sylvain Siclier
1 CD Marina Records/Differ-ant.
- Grandaddy
Last Place
Pochette de l’album « Last Place », de Grandaddy. | COLUMBIA/SONY MUSIC
Onze ans après leur précédent album, Just Like the Fambly Cat, les Californiens de Grandaddy semblent ne s’être jamais quittés, tant leur nouvel opus, Last Place, resplendit de tout ce qui faisait l’attrait du groupe au crépuscule des années 1990. A l’époque, Jason Lytle, tête pensante aux allures de bûcheron-skater, bousculait les restes du grunge, pour associer ce qu’il restait des distorsions électriques à une délicatesse devant plus à la fragilité élégiaque d’Elliott Smith qu’aux coups de boutoir de Pearl Jam. Comme au temps de ses meilleurs albums (Under the Western Freeway, The Sophtware Slump…), Grandaddy répartit sa mélancolie entre chansons à l’entrain power-pop (Way We Won’t, Brush With the Wild…) – marqué par l’éternelle admiration de Lytle pour Electric Light Orchestra –, ballades enveloppantes (The Boat is in the Barn) et fresques au crescendo déchirant (This is the Part, A Lost Machine…). Avec un brio mélodique guidé par des guitares joueuses, un piano profond, une électronique désuète et le timbre haut perché d’une innocence meurtrie. Stéphane Davet
1 CD Columbia/Sony Music. www.grandaddymusic.com
- Manuel de Falla
Fanfare pour une fête. L’Amour sorcier. Le Tricorne (Suites)
Esperanza Fernandez (voix), Orchestre national d’Ile-de-France, Enrique Mazzola (direction).
Pochette de l’abum consacré à Manuel de Falla par l'Orchestre national d'Ile-de-France. | NOMADMUSIC
Un siècle après sa création, L’Amour sorcier nous apparaît enfin tel que son compositeur l’avait rêvé, dans la fusion du symphonique et du populaire. Musique de fer et de feu, qui claque et frémit idéalement dans l’interprétation de l’Orchestre national d’Ile-de-France (Ondif), le célèbre ballet de Manuel de Falla prend ainsi chair dans la voix d’une authentique « cantaora » (chanteuse de flamenco), Esperanza Fernandez, qui dote chaque incantation d’une fascinante crudité. Dirigé avec autant de passion que de goût par Enrique Mazzola, l’Ondif récidive dans la « transe en danse » avec Le Tricorne, autre ballet espagnolisant. La fièvre vocale (et gitane) en moins. Pierre Gervasoni
1 CD NoMadMusic.
- Omar Sosa & Seckou Keita
Transparent Water
Pochette de l’album « Transparent Water », d’Omar Sosa et Seckou Keita. | WORLD VILLAGE/PIAS
Une certaine idée de la plénitude et de la sérénité. Le pianiste de jazz cubain Omar Sosa et le joueur de kora et chanteur sénégalais Seckou Keita savent à quel point la musique peut œuvrer dans ce bon sens nécessaire. Ils tissent une partition aux vertus apaisantes, traversée de spiritualité et qui porte en creux des échappées belles, sous l’attention d’anges ou d’esprits bienveillants. Depuis sa conversation musicale avec la kora de Ballaké Sissoko sur l’album du Trio Chemirani, la famille virtuose de la percussion persane (Trio Chemirani invite/Accords croisés), on sait combien le piano de Sosa et la harpe-luth d’Afrique de l’Ouest vont bien ensemble. Ici encore, le charme opère et même s’amplifie avec l’enrichissement apporté par le fin percussionniste vénézuélien Gustavo Ovalles, complice de longue date du pianiste, et le raffinement des instruments orientaux, en particulier le geomungo coréen (joué par E’Joung-Ju), le koto japonais (Mieko Miyazaki), le sheng et le bawu chinois (Wu Tong). Patrick Labesse
1 CD World Village/PIAS.
- Vanessa Wagner
Mozart : Fantaisie en ré mineur K.397 et Sonate pour piano en si bémol majeur K.570/Clementi : Sonate pour piano en fa majeur op. 23 n° 2 et Sonate en sol mineur op. 50 n° 3 « Didone abbandonata - Scene tragiche »
Vanessa Wagner (pianoforte et piano).
Pochette de l’album « Mozart, Clementi », de Vanessa Wagner. | LA DOLCE VOLTA
Ce premier album de Vanessa Wagner pour le label La Dolce Volta est un bonheur en soi. La pianiste française la plus délicieusement singulière de sa génération y fait montre de son habituelle liberté et propose avec une gourmandise assumée un excitant face-à-face entre les sonorités d’un piano Brodmann de 1814 et celles d’un grand piano de concert Yamaha, le fameux CFX, autour de deux compositeurs. L’un est majeur : Mozart. L’autre moins mineur qu’on ne croit : Clementi, que l’on découvre sous des auspices nettement plus appétents qu’à l’ordinaire. C’est que Vanessa Wagner joue avec la clarté de l’évidence, un tour qui combine fluidité élégante et densité savoureuse, goût du détail et intelligence de la forme. Jamais compassé, jamais poseur, son piano respire large, ose une quasi méditation au début de la Fantaisie mozartienne, habille de lumière délicate les contours de la Sonate K.570 tandis que le Brodmann semble dramatiser le passage à Clementi. La pianiste défendra avec une ardeur communicative cette musique qui fait le lien entre Mozart et Beethoven, accrochant avec élégance la Sonate op. 23 n° 2 aux basques de Wolfgang, pousse la Sonate op. 50 n° 3 dans les bras de Ludwig Van. Marie-Aude Roux
1 CD La Dolce Volta.