Après la victoire d’Emmanuel Macron, la droite tiraillée
Après la victoire d’Emmanuel Macron, la droite tiraillée
Par Alexandre Lemarié, Matthieu Goar
Désigné par le bureau politique du parti pour mener la campagne des élections législatives, François Baroin tente de contenir les troupes.
Faut-il s’opposer à Emmanuel Macron ou coopérer avec lui ? Dès dimanche 7 mai dans la soirée, la droite a présenté un visage divisé. Désigné par le bureau politique du parti pour mener la campagne des élections législatives, François Baroin a félicité le nouveau président, Emmanuel Macron, dont il a salué « l’audace ».
Mais le sénateur de l’Aube a aussitôt projeté sa famille politique dans la prochaine campagne. « La mère des batailles ce sera la bataille des législatives », a-t-il estimé sur France 2, avant de critiquer M. Macron et ses soutiens :
« Ils sont en marche vers l’ambiguïté. Nous nous sommes en ordre vers la clarté. »
Quant à savoir s’il serait dans l’opposition, il a déclaré :
« Je suis évidemment dans l’opposition et j’aurai la charge, à la demande de ma famille politique, de mener avec l’UDI la campagne des législatives. »
Eviter les ralliements à En marche !
Histoire de contenir ses troupes, M. Baroin a répété que les élus Les Républicains (LR) qui rejoindraient M. Macron dans un gouvernement ou qui iraient faire campagne sous les couleurs d’En marche ! aux législatives s’excluraient « de fait » de « la famille » politique et qu’ils auraient des candidats LR face à eux lors du scrutin de juin.
Ce message est destiné en particulier à Bruno Le Maire, qui a fait une offre de service à M. Macron dès dimanche soir. « Je suis depuis des années à droite. Mais je peux travailler dans une majorité de gouvernement, a déclaré le député LR de l’Eure, sur TF1. Mettons les vieilles querelles politiciennes de côté et faisons avancer la France. »
Sans se dire prêt à travailler avec M. Macron, Christian Estrosi, le président de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, a aussi tenu des propos positifs à l’égard du nouveau président, dont il « souhaite la réussite, pour la France ».
Recensement des divergences
Plusieurs moments compliqués attendent la droite dans les semaines à venir. La nomination du premier gouvernement d’Emmanuel Macron est le premier écueil, surtout si le nouveau président arrive à attirer des personnalités importantes de la droite. Dimanche soir, l’appel du pied de M. Le Maire a été isolé.
« Il peut y avoir des démarches individuelles, mais ça n’est pas convenable par rapport à nos candidats aux élections législatives », a estimé Jean-François Copé. L’ancien candidat à la primaire a ensuite recensé les divergences entre M. Macron et la droite, notamment sur la fiscalité, sur la sécurité, sur le « communautarisme et la lutte contre l’islam radical » : « Ces éléments-là font que les élections législatives sont capitales. »
Encore plus critique, Eric Ciotti s’est inscrit immédiatement dans l’opposition, dans la foulée de M. Baroin. « Même si Emmanuel Macron est le président de la République et doit bénéficier du respect dû à ses fonctions, je ne lui accorde pas ma confiance », a annoncé le président du département des Alpes-Maritimes, en évoquant « un président de circonstance, élu par défaut ». Avant d’appeler son camp à « engager avec une détermination totale la bataille des élections législatives, pour donner une majorité de droite et du centre à la France ».
L’aile centriste tient bon mais votera des textes
Une position plutôt logique pour ces personnalités représentatives de l’aile droitière du parti. Nathalie Kosciusko-Morizet, dont le positionnement n’est pas aussi éloigné du programme de M. Macron, a également été très claire, en critiquant l’attitude de M. Le Maire : « Je suis un peu surprise que des personnalités au soir du second tour basculent comme ça. Moi, si j’avais adhéré à son projet, je l’aurais soutenu dès avant le premier tour », a déclaré l’ancienne candidate à la primaire, qui a confirmé qu’elle serait candidate aux élections législatives à Paris sous les couleurs de la droite et du centre.
Mais la députée de l’Essonne a aussi répété qu’elle pourrait voter les mesures de M. Macron qu’elle approuve : « A l’Assemblée, on est là pour construire. » Jean-Christophe Lagarde, président de l’UDI, a eu la même analyse sur les futures réformes :
« Si cela va dans le sens des réformes indispensables à la France, nous apporterons un soutien vigilant. Sinon nous les combattrons sans concession. »
Mener l’opposition au nouveau président
Deux semaines après l’élimination de François Fillon au premier tour, la victoire d’Emmanuel Macron pose deux problèmes urgents à la droite républicaine. Il va d’abord falloir tenter de préserver l’unité du parti alors que plusieurs personnalités pourraient avoir envie de travailler avec Emmanuel Macron.
A plus long terme, le parti Les Républicains va devoir contrer le Front national, qui rêve de devenir la principale force d’opposition après avoir accédé au second tour de l’élection présidentielle. Lors de son discours de défaite, Marine Le Pen a affiché sans ambiguïté sa volonté d’être la première force d’opposition.
Dimanche soir, la présidente de la région Ile-de-France, Valérie Pécresse a expliqué que la droite devait gagner les élections législatives pour « ne pas laisser Macron seul face aux extrêmes ».