Age du consentement sexuel : une nécessaire meilleure protection des mineurs
Age du consentement sexuel : une nécessaire meilleure protection des mineurs
Par Jean-Baptiste Jacquin
Le législateur envisage d’inscrire dans le code pénal un âge en dessous duquel toute « atteinte sexuelle » serait automatiquement requalifiée en agression ou viol.
Actuellement, la loi interdit sans ambiguïté tout acte de nature sexuelle entre un majeur et un mineur de moins de quinze ans. Selon l’article 227-25 du code pénal, cette « atteinte sexuelle » est passible de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende. Cela, indépendamment des violences qui permettent de qualifier l’infraction d’agression sexuelle (punie de dix ans de prison) ou de viol (vingt ans de réclusion criminelle) s’il y a eu pénétration. Et des circonstances aggravantes existent lorsque l’agresseur est un ascendant ou une personne ayant une autorité de droit ou de fait sur la victime.
Si le législateur veut renforcer la répression des violences sexuelles sur mineurs, il dispose de quatre leviers : l’âge de la victime, la qualification des faits, les éléments constitutifs d’une infraction et l’importance de la sanction (montant de l’amende et durée d’emprisonnement). Le débat s’est concentré sur l’âge. Inscrire dans le code pénal ce seuil d’âge du non-consentement ne changerait rien à l’interdiction d’une relation sexuelle avec un mineur de moins de quinze ans, mais requalifierait automatiquement l’« atteinte » sexuelle en agression ou en viol.
Pour la docteure Julia Maruani, gynécologue à Marseille, ce projet de réforme répond à un besoin. « Beaucoup de jeunes femmes m’expliquent que les plaintes qu’elles ont déposées pour des attouchements, des abus ou des viols n’ont pas abouti car, disent-elles, “c’est difficile de prouver que l’on n’était pas consentante”. » Une preuve d’autant plus difficile à apporter que souvent c’était avec un « copain ».
Un écart d’âge « constitutif d’une contrainte »
Pour qu’un viol soit constitué, il faut que l’acte de pénétration soit commis par « violence, contrainte, menace ou surprise » (article 222-23 du code pénal). Le parquet de Pontoise a pu parler d’une simple « atteinte sexuelle » dans une décision controversée, car il a estimé qu’aucun de ces quatre éléments n’était présent. Pourtant, la jurisprudence récente de la Cour de cassation considère que l’écart d’âge peut être constitutif en lui-même d’une contrainte.
Edouard Durand, juge des enfants à Bobigny et coprésident de la commission « violences » du Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, explique que « l’objectif de mieux protéger l’enfance justifie de présumer que l’écart d’âge est constitutif d’une contrainte ». La proposition de 13 ans avait été arrêtée en octobre 2016 par le Haut Conseil au regard de ce qui se fait dans les pays occidentaux ayant adopté un tel principe.
En Allemagne, par exemple, un seuil unique est fixé à 14 ans. Au-dessous, la question du consentement n’est pas posée et la peine encourue par l’adulte est comprise entre six mois de prison et dix ans. En revanche, à partir de 14 ans, s’il y a consentement, il n’y a pas d’infraction (sauf en cas de violences, bien sûr). La notion française d’« atteinte sexuelle » automatique jusqu’à 15 ans n’existe pas. L’Autriche est dans une situation similaire avec un seuil fixé à 14 ans.
Au Danemark, l’interdit pénal fixe deux seuils de gravité en fonction de l’âge (moins de 12 ans ou moins de 15 ans). Les Pays-Bas ont décidé de sanctionner d’une même peine que le viol, sans la qualifier ainsi, toute relation avec pénétration avec un enfant de moins de 12 ans. En Belgique, au contraire, toute relation avec un mineur de moins de 14 ans sera qualifiée de viol, comme au Royaume-Uni, au-dessous de 13 ans.