Départs volontaires, davantage de contrats, rénovation du statut de fonctionnaire, rémunération au mérite… Le gouvernement a présenté, jeudi 1er février, ses pistes de réforme de la fonction publique. Dans un entretien au « Monde », Laurent berger, secrétaire général de la Confédération française démocratique du travail (CFDT), « demande des clarifications ».

Comment accueillez-vous les annonces ?

Ils y vont fort. La CFDT demande des clarifications. Il y a un gros problème de méthode : c’est très étonnant d’annoncer une concertation sur toute l’année 2018 et de donner dès à présent une partie des conclusions.

Dans les fonctions publiques, c’est aussi l’état du dialogue social et du corps social qui pose un vrai problème. C’est la démonstration que lorsqu’il n’y a pas de dialogue social, les agents n’ont aucune chance d’être écoutés. Je demande que le gouvernement rencontre très vite les organisations syndicales.

Quelles sont les mesures qui vous heurtent ?

Sur les rémunérations, il faut dire quelle est la part de la rémunération collective et quelle est la part de l’individuel. Cela ne peut pas être un basculement, une décision qui entraînerait des disparités liées aux marges budgétaires des employeurs plus qu’en fonction de l’investissement au travail.

On nous parle du développement du contrat dans les fonctions publiques : ça veut dire quoi ? Pour qui ? Comment ? Tout cela mérite des éclaircissements, car il y a des craintes de profonds bouleversements pour les agents.

La CFDT n’est pas opposée à des évolutions, mais, encore une fois, il est urgent de dire clairement de quoi on parle.

Que pensez-vous de l’idée avancée par le ministre de l’action et des comptes publics, Gérald Darmanin, d’un « plan de départs volontaires » ?

Le terme est totalement inapproprié. Nous n’avons pas de tabou à construire des dispositifs d’accompagnement à des évolutions professionnelles : formation, montée en compétences, mobilités, et pourquoi pas pour celles et ceux qui en auraient exprimé clairement le souhait, accompagner un départ. Mais sur la seule base du volontariat et de manière sécurisée.

Aujourd’hui, une indemnité de départ volontaire existe déjà. A peine quelques dizaines de fonctionnaires ont souhaité en bénéficier et on les comprend : les conditions sont très risquées, d’autant qu’en plus les fonctionnaires ne cotisent pas à l’assurance-chômage et en sont donc exclus. Les freins au changement ne sont pas toujours du côté où on les croit.

Absence de coup de pouce au pouvoir d’achat, rétablissement du jour de carence, gel du
point d’indice… Est-ce que les fonctionnaires sont les mal-aimés de ce gouvernement ?

Des gouvernements successifs. Le problème, c’est qu’on ne parle pas des missions du service public ni de ce que notre pays est prêt à investir pour avoir des politiques publiques de solidarité dignes de ce nom.

On n’écoute pas les fonctionnaires, on ne parle pas du travail réel. Toutes les dernières politiques publiques ont été conduites sous l’angle budgétaire.

Les fonctionnaires souffrent parfois de conditions de travail très dures, mais surtout d’un sentiment de non-reconnaissance, qui est terrible. Etre considéré comme un coût en permanence donne un sentiment de mal-être.

Hurler au loup maintenant n’a aucun sens, mais la CFDT sera attentive et exigeante pour que l’action publique continue de reposer demain sur des agents publics reconnus et respectés.