La troisième vie de Chaton
La troisième vie de Chaton
M le magazine du Monde
Simon Rochon Cohen, alias Chaton, s’est isolé pendant huit mois pour se réinventer artistiquement. Grâce à un label qui promeut les jeunes pousses, il sort son album « Possible », le 9 mars.
Le chanteur Simon Rochon, alias Chaton. / ILYES GRIYEB
Si les chats ont neuf vies, Simon Rochon Cohen aborde sa troisième sous le nom de scène de Chaton. Après une première carrière solo en tant que Siméo au début des années 2000, puis une dizaine d’années dans l’ombre de l’industrie musicale à composer des titres pour des artistes de variété francophone (Jenifer, Yannick Noah, Natasha St-Pier…), le musicien a opéré un virage en octobre 2016. « J’étais las d’écrire pour les autres, de faire face à des directeurs artistiques qui réclamaient toujours un simili du dernier tube à la mode, relate le trentenaire aux cheveux longs. Et puis j’étais de moins en moins sollicité, fauché émotionnellement autant que financièrement. »
Son album, Possible, est le résultat d’une réinvention artistique empruntant le surnom de Chaton, dont sa fiancée l’affublait et qui fait rire ses amis. Mais l’album est surtout le produit d’une fabrication en solitaire, en toute indépendance, dans le salon à moitié vide de son appartement du nord de Paris. « J’ai enregistré un premier titre guitare-voix mais ça ne me ressemblait pas. J’ai alors pensé que c’était l’occasion rêvée de mixer dans un même objet tout ce qui me plaisait : la chanson qui valorise le texte, le beat reggae, les éclats de transe et d’électro, les sonorités du rap et du hip-hop… »
Eclectique, il se nourrit aussi bien de Brel que de PNL, de Nicolas Jaar, Aznavour ou Balavoine, Booba, Renaud ou Fishbach. Assis à son bureau huit mois durant, avec son casque, sa carte son, son minisynthétiseur, l’artiste trousse et enregistre dix morceaux qui partagent la même base rythmique reggae, des sons synthétiques, la même voix autotunée « qui vient troubler la ligne harmonique ».
Dans ces chansons, il évoque sa fiancée, ses amis, son compte courant grevé, sa colère contre la consensuelle industrie et ses chanteurs « machines à larmes, hommes-fontaines, distributeurs de billets doux » avec qui il collaborait par le passé… « J’ai passé le temps de l’écriture à osciller entre des phases d’exaltation et de durs moments de lucidité où je prenais du recul et me disais : “Mec, tu as à peine de quoi payer le loyer et tu ne sais même pas dans quelle direction tu vas !”. »
CHATON - J’attends en bas | Live Plus Près De Toi
Durée : 05:11
Fin août 2017, La Souterraine, label qui promeut de jeunes pousses pop, accueille son titre Poésies sur une compilation. Décollage immédiat. France Inter et Radio Nova le programment dans leurs playlists, un Graal qui assure d’être régulièrement diffusé à l’antenne. « J’imaginais sortir l’album en auto-édition, en payant une licence sur Internet, mais les choses se sont accélérées », s’émerveille-t-il. Après un showcase réussi, Vincent Boivin, qui dirige Arista, la pépinière de nouveaux talents de Sony, vient le trouver : « Tu ne peux pas sortir ce disque seul dans ton coin, offre à ce produit fini une meilleure vie ! » Après cette longue gestation en solitaire, il s’est laissé convaincre et a saisi la main tendue.
« Possible », de Chaton (Arista-Sony), sortie le 9 mars. En concert à La Maroquinerie, 23, rue Boyer, Paris 20e, le 22 mars.