22 Chibanis retraités de la SNCF portent plainte contre leur avocate
22 Chibanis retraités de la SNCF portent plainte contre leur avocate
Le Monde.fr avec AFP
Clélie de Lesquen-Jonas est accusée de retenir des indemnités qui leur reviennent. Cette dernière a riposté, dénonçant des « fake news ».
Vingt-deux Chibanis, des retraités d’origine nord-africaine qui ont fait condamner la SNCF pour discrimination, ont porté plainte contre leur ancienne avocate, lui reprochant de retenir les indemnités qui leur reviennent, a révélé Mediapart samedi 2 juin.
L’histoire de 848 ex-salariés de la SNCF, principalement marocains, avait connu un dénouement heureux le 31 janvier, la cour d’appel de Paris leur ayant donné gain de cause en condamnant l’entreprise publique à leur verser plus de 170 millions d’euros de dommages et intérêts. Après la décision, qui mettait un terme à plus de 12 ans de procédure, certains Chibanis (« cheveux blancs » en arabe) avaient porté en triomphe leur avocate, Clélie de Lesquen-Jonas. Cette dernière est aujourd’hui accusée d’« abus de confiance ».
Selon les 22 plaignants, leurs indemnités ont été versées sur le compte professionnel de Me de Lesquen-Jonas, qui aurait refusé « d’adresser à ses clients les fonds leur revenant », conditionnant leur versement « à la signature d’une convention comportant un honoraire de résultat de 5 % », peut-on lire dans la plainte, qui a été enregistrée par le parquet de Paris le 7 mai.
Or, toujours selon la plainte, l’avocate avait déjà « facturé forfaitairement son intervention », à hauteur de 6 000 euros devant le conseil de prud’hommes et de 30 000 euros devant la cour d’appel. Ces sommes auraient été acquittées, selon le document.
« Fake news »
Contactée par l’AFP, l’avocate a dénoncé une « fake news » et prévenu qu’elle lancerait « probablement une action en diffamation ».
« Je n’ai jamais conditionné la remise des fonds à la signature d’une convention », s’est défendue l’avocate, qui a fait valoir que le « processus de règlement est forcément long quand vous avez 850 clients ». Elle a ajouté que les sommes dues aux plaignants ont été réglées vendredi, en y retranchant néanmoins « la note d’honoraires qui fait l’objet aujourd’hui d’un contentieux » dont est saisi le bâtonnier.
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Durée : 05:51
Une information confirmée par son confrère Me Maxime Cessieux, qui représente les 22 Chibanis. Mais, a-t-il assuré auprès de l’AFP, cela « ne change rien au fait qu’elle retient illégalement des sommes qui ne lui appartiennent pas ».
Selon la plainte, les plaignants doivent, chacun, toucher des sommes allant de 17 000 et 287 000 euros.
Me Cessieux a par ailleurs indiqué qu’une « plainte complémentaire [allait] être déposée la semaine prochaine », avec de nouveaux plaignants.
« Minorité agissante »
L’avocate mise en cause, qui se prévaut du soutien de « plus de 800 clients », attribue la plainte contre elle à une « minorité agissante manipulée par une société basée au Maroc créée en mars ». Selon elle, cette société, nommée « BBA », a été créée par Abdelkader Bendali, un consultant marocain qui était aux côtés des Chibanis au début de leur procédure contre la SNCF, et qui a récemment « envoyé plus de 800 factures » aux Chibanis.
« L’escroquerie, elle est là », assure Me de Lesquen-Jonas, qui affirme vouloir seulement « protéger [ses] clients ».
M. Bendali, contacté par l’AFP, a formulé les mêmes accusations « d’escroquerie » à l’encontre de l’avocate, tout en indiquant être « en train de préparer une assignation contre cette dame ». « La justice tranchera », a-t-il dit.
Abdelkader Bendali a assuré avoir, « pendant dix ans, organisé le dossier » des Chibanis contre la SNCF, « reconstitué la carrière de chacun ».
Selon lui, « tout au début » de la procédure, « chaque cheminot s’était engagé à verser 15 % d’honoraires de résultats », qu’il était chargé de « répartir au prorata entre les différents intervenants - avocats, professeurs, actuaires ». Quand Me de Lesquen-Jonas a commencé à intervenir dans le dossier, il lui avait « promis qu’elle aurait 2 % » d’honoraires, a-t-il dit.
Il a affirmé, en outre, que « Mme de Lesquen n’est pas l’auteur d’une seule phrase » des écritures présentées à la cour d’appel. « Cette dame a fait de la figuration et elle s’empare d’un chèque de neuf millions d’euros », a-t-il asséné.