Un discours « sans souffle », « un enfilage de perle »… L’opposition a fustigé « un petit discours de politique générale » après l’allocution du président de la République devant le Congrès, lundi 9 juillet à Versailles.

Pour les formations de gauche, Emmanuel Macron n’a fait que confirmer l’inclinaison de sa politique, sans rassurer la frange de sa majorité qui réclame un rééquilibrage social. « Il est venu dire qu’il ne changerait rien », a dénoncé le premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure. « Chacun peut attendre la jambe gauche, elle ne viendra pas », a-t-il tranché, évoquant « une philosophie libérale assumée ». « Il n’a pas eu un mot sur le pouvoir d’achat, ni pour les territoires qui souffrent », a souligné le sénateur socialiste Patrick Kanner. « Il donne l’image d’un pilote d’avion mais qui ne transporte que des classes affaires », a-t-il encore raillé, montrant que pour la gauche, Macron est toujours « le président des riches ».

Malgré son long développement sur sa vision de « l’émancipation » comme politique sociale, M. Macron n’a pas satisfait ceux qui attendent davantage de mesures pour réduire les inégalités. « L’émancipation, c’est un discours creux si vous n’agissez pas. On attend encore que cela se traduise dans les actes », met en garde le patron de l’UDI, Jean-Christophe Lagarde.

Un « exercice monarchique »

« Ça n’a pas fini de tanguer », a lancé pour sa part Marine Le Pen, dénonçant « une présidentialisation à l’extrême de notre système politique. » « Profitez bien d’Edouard Philippe car le président de la République vient d’annoncer la disparition du premier ministre », a ironisé la patronne du Rassemblement national (ex-Front national), alors que le chef de l’Etat souhaite pouvoir écouter et répondre aux présidents des groupes parlementaires lors des prochains congrès. A son tour, le chef de file des députés LR, Christian Jacob, a moqué la tentation du chef de l’Etat de faire du Parlement « son jouet ou une sorte de marchepied sur lequel il aurait le droit de s’élever pour renforcer son propre pouvoir ». Comme de nombreux élus, le sénateur communiste Pierre Laurent a fustigé « un exercice monarchique ».

Une inquiétude nourrie par la révision constitutionnelle, à la veille du début de son examen dans l’hémicycle du Palais-Bourbon. Les responsables de l’opposition ont accusé M. Macron de vouloir « affaiblir » l’Assemblée et le Sénat, à travers sa réforme des institutions, qui prévoit notamment une accélération de la procédure parlementaire, via une restriction du droit d’amendement, ou une baisse du nombre de parlementaires, qui va entraîner un redécoupage électoral. « Votre décision de créer des circonscriptions à taille inhumaine, deux fois plus grandes qu’aujourd’hui, va rétrécir le lien de la nation avec ses élus », s’est insurgé M. Jacob, en annonçant que ses troupes n’avaient aucunement l’intention de « donner un chèque en blanc » à M. Macron « pour réduire le pouvoir du Parlement ». « La réforme des institutions affaiblira la représentation de nos territoires ! », a abondé son homologue du Sénat, Bruno Retailleau.

Les responsables des groupes parlementaires de droite ont axé leurs critiques sur le volet régalien, jugé insuffisant. « Les peurs civilisationnelles, vous ne les faites pas reculer », a accusé M. Retailleau, en accusant le chef de l’Etat de manquer de « clarté » dans le domaine de la lutte contre l’islam radical. A son tour, M. Jacob a fustigé une politique « dangereuse » et « naïve » en matière de politique migratoire, de sécurité et de protection des Français contre le terrorisme.

Dressant un véritable réquisitoire de l’action du chef de l’Etat – en fustigeant tour à tour « l’augmentation de la CSG », « le sacrifice fiscal des classes moyennes » ou l’instauration des 80 km/h –, M. Jacob a aussi appelé l’exécutif à « renoncer » à l’instauration d’une dose de proportionnelle pour les élections législatives. Avant de lancer, lapidaire, au sujet de M. Macron : « Comme il est le fruit d’une effraction, il repartira sans doute comme il est arrivé ! »