Polémique en Autriche sur l’abattage rituel des animaux
Polémique en Autriche sur l’abattage rituel des animaux
Par Jean-Baptiste Chastand
L’extrême droite est souvent accusée d’agiter le sujet des souffrances animales pour cacher des motifs antisémites ou islamophobes.
A Saalfelden, en Autriche, en 2012. / ALEXANDER KLEIN / AFP
Le gouvernement régional de Basse-Autriche s’apprête-t-il à faire des listes de juifs ? Une polémique autour de l’égorgement halal et casher a pris, mercredi 18 juillet, une ampleur qui en dit long sur l’atmosphère politique empoisonnée en Autriche depuis le retour de l’extrême droite au pouvoir en décembre 2017, en coalition avec les conservateurs. Tout est parti de la volonté d’un ministre issu du Parti de la liberté (FPÖ, extrême droite) du Land de Basse-Autriche, une région qui encercle Vienne, de limiter considérablement les méthodes d’abattage religieuses.
Chargé du bien-être animal dans le gouvernement de coalition local dominé par les conservateurs, Gottfried Waldhäusl n’a jamais caché son hostilité à l’égorgement d’animaux non étourdis prescrit par les religions juive et musulmane. Le FPÖ est régulièrement accusé d’agiter le sujet des souffrances animales pour cacher des motifs plus bassement antisémites ou islamophobes. Mais à défaut de pouvoir l’interdire totalement – une compétence nationale –, M. Waldhäusl a expliqué au quotidien Wiener Zeitung qu’il souhaitait limiter la pratique au maximum en « liant la fourniture de viande à la résidence effective » dans la région. « Il n’est pas acceptable que des Viennois viennent faire égorger des milliers d’animaux en Basse-Autriche », a-t-il justifié.
« Les chapitres les plus sombres »
Cette proposition a immédiatement déclenché les protestations du Consistoire juif de Vienne. Pour son président, Oskar Deutsch, elle impliquerait en effet la création de liste nominative de coreligionnaires. « Or, cela rappelle presque l’époque nazie », a-t-il dénoncé. Alors que les sujets migratoires, historiques et religieux sont sensibles depuis le retour au pouvoir du FPÖ, la polémique a immédiatement pris une ampleur nationale. « Cet enregistrement rappelle les chapitres les plus sombres de notre histoire », a ainsi fustigé le leader des sociaux-démocrates autrichiens, Christian Kern, en demandant la démission du ministre.
Visiblement gênés, les conservateurs, partenaires majoritaires du FPÖ au niveau national et en Basse-Autriche, ont écarté toute constitution de liste de juifs. « Nous allons trouver une solution pour dissiper les inquiétudes du président du Consistoire », a ainsi promis un représentant local de la formation du chancelier Sebastian Kurz.
Mercredi, les sites autrichiens notaient d’ailleurs avec ironie que c’est le prédécesseur social-démocrate de M. Waldhäusl qui avait autorisé les premières restrictions en septembre 2017, en demandant notamment aux autorités locales de vérifier scrupuleusement que les abattoirs pratiquant l’égorgement ne le fassent que pour des raisons strictement religieuses.