JeremStar : « Aujourd’hui encore, je dois sans cesse expliquer que non, je n’ai rien fait »
JeremStar : « Aujourd’hui encore, je dois sans cesse expliquer que non, je n’ai rien fait »
Par William Audureau
Dans son livre « La Vérité, toute la vérité », la vedette de Snapchat et YouTube rompt son silence médiatique, et espère être blanchi après avoir été associé à une entreprise de détournement de mineurs.
JeremStar, star déchue des réseaux sociaux et de la télévision, veut laver son nom après ce qu’il estime être une campagne de calomnie. / DAMIEN STRAKER / Hugo Image
Il fait son grand retour, et sur un terrain miné. Un an et trois mois après ce que ses détracteurs ont baptisé le « JeremstarGate », et autant de temps de retrait forcé de la vie publique, l’ancienne vedette de télé-réalité devenue star de l’application Snapchat et chroniqueur chez Ardisson veut laver son nom.
Dans La Vérité, toute la vérité, un livre qui paraît le 4 avril aux éditions Hugo Image, Jérémy Gliscon, dit « JeremStar », dresse le bilan de son année de purgatoire, après les accusations qui ont mêlé son nom à un supposé réseau de pédophilie.
Visé pour corruption de mineurs
Tout commence en janvier 2018, quand après un différend portant sur un banal scoop people, Aqababe, autre starlette de Snapchat et des potins en ligne, diffuse sur les réseaux sociaux une vidéo pornographique de JeremStar. Puis, dans la foulée, accuse Pascal Cardonna, quinquagénaire régulièrement mis en scène sous le surnom de « Babybel » dans les pastilles vidéo de JeremStar, souvent dans un rôle de souffre-douleur, et très connu de sa communauté, d’avoir eu des comportements sexuels illicites avec des mineurs.
Quelques jours plus tard, deux connaissances de Pascal Cardonna, Annoir S. puis Jason F., accusent « Babybel » d’avoir abusé d’eux lorsqu’ils avaient respectivement 17 et 16 ans, et ce, ajoute le premier, sous le regard complice de JeremStar. Deux plaintes séparées sont déposées contre le quinquagénaire à Nîmes, les faits visés s’étant déroulés dans le Gard, pour corruption, agression sexuelle, viol, et recours à la prostitution de mineur. JeremStar est, lui, visé pour corruption de mineur par Annoir S. : il lui est reproché d’avoir été au courant des agissements allégués de Pascal Cardonna et d’avoir joué le rôle de facilitateur, en le mettant en contact avec ses jeunes fans, ce qu’il a toujours nié.
Trop tard. Le 25 janvier 2018, après deux semaines de torrents de messages accusateurs sur les réseaux sociaux, le magazine Public fait sa « une » sur l’affaire. Sur la foi des témoignages des plaignants et d’anciens tweet ambigus, le journal people lie JeremStar à un réseau de « pédophile », et révèle la plainte déposée par Annoir S. le mentionnant. L’information est reprise dans de nombreux médias nationaux. « Aujourd’hui encore, je dois sans cesse expliquer que non, je n’ai rien fait », se désespère l’intéressé dans son livre.
« Il n’y a rien »
Un an et trois mois plus tard, le dossier est loin d’être clos. Mais les nouvelles sont plutôt positives pour JeremStar. Dès le départ, la plainte dans laquelle son nom apparaissait comportait des incohérences : elle accusait notamment l’intéressé d’avoir assisté à une partie fine dans le Gard en compagnie de Pascal Cardonna, alors que JeremStar se trouvait alors à l’étranger – comme en attestent ses comptes Instagram et Snapchat, soulignait BuzzFeed en février 2018.
Autre élément allant dans son sens, JeremStar n’a toujours pas été sollicité par la justice dans cette affaire. « J’ai expliqué que mon client souhaitait être entendu. Or, il n’a même pas été ne serait-ce que convoqué en tant que témoin. Il a perdu son émission de télé, il reçoit des messages de harcèlement, on le traite de pédophile, mais il n’y a rien », explique son avocate, Me Aude Weill-Raynal, qui s’étonne de ne plus avoir de nouvelles du parquet :
« On présentait les faits comme gravissimes, et mon client comme le principal témoin, au mieux comme un appât passif, au pire comme un complice piégeant sciemment les jeunes pour les faire tomber dans les griffes d’un pédophile. Mais il n’y a rien, c’est étonnant. »
Pour JeremStar, c’est la preuve qu’il y a une affaire Pascal Cardonna, mais pas de « JeremStarGate », mot-clé poussé par Aqababe sur les réseaux sociaux, et qui lui a valu la vindicte populaire et l’éviction de l’émission « Les Terriens du dimanche ! », sur C8. « L’enquête est peut-être encore ouverte du côté de Pascal Cardonna, qui a été entendu par la brigade criminelle, mais moi je ne l’ai jamais été, dit-il. Pourtant pour moi, le préjudice est permanent. »
Deux plaintes retirées
L’accusation contre lui a par ailleurs été affaiblie par la décision d’Annoir S. et de Jason F. de retirer leurs plaintes en février 2018. Les deux jeunes plaignants, mineurs au moment des faits allégués, expliquent avoir été manipulés par les avocats que leur a proposés à titre gracieux un personnage de l’ombre, le journaliste people Jean-Claude Elfassi, qui se vante d’avoir informé le magazine Public de l’affaire. Les deux ex-plaignants l’accusent aujourd’hui d’avoir monté l’affaire pour ses propres intérêts.
Joint par Le Monde, ce dernier jure ne pas avoir été rémunéré par le magazine people et questionne leur crédibilité :
« A l’époque, j’ai parlé [des accusations contre Pascal Cardonna et JeremStar] sur mon blog, je crois même que j’étais le premier, et quand j’ai vu que c’était foireux, j’ai retiré mon billet. Que l’affaire soit vraie ou fausse, je n’en sais rien, j’ignore s’il y a un fond de vérité, les mecs étaient tellement mythomanes que cela ne servait à rien de continuer là-dessus, je n’allais pas perdre mon temps avec ça. Le procureur est alerté, c’est à lui de faire son boulot. »
Sur les accusations d’agression sexuelle, de viol et de corruption sur mineur, l’avocat de Pascal Cardonna explique ne plus avoir eu de nouvelles des différentes procédures depuis mars 2018, et évoque une affaire qui a tourné court. « C’étaient des enfants qui voulaient faire le buzz. Ils se sont tous repentis en expliquant qu’on leur avait dit de le faire, ils nous ont écrit pour s’excuser », relate-t-il.
Le retrait de ces plaintes ne signifie toutefois pas la fin de l’affaire. « Certaines des enquêtes sont toujours en cours », explique au Monde Eric Maurel, procureur de la République de Nîmes, sans donner davantage de détail, ni innocenter la star des réseaux sociaux.
La contre-attaque de JeremStar
A défaut d’avoir été blanchi par la justice, Jérémy Gliscon a contre-attaqué. Selon Me Aude Weill-Raynal, deux procédures en diffamation sont en cours. La première, contre le journal Public, a abouti à la mise en examen de sa directrice de publication et de son journaliste Loïc Torino-Gilles. Des faits confirmés par Myriam Pallomba, directrice de la rédaction du journal people, qui estime que le magazine a suivi la déontologie professionnelle. « On a fait notre boulot. Nous avons interrogé tous les protagonistes, ceux qui ont déposé plainte comme les avocats de ceux qui sont visés par ces plaintes. »
La seconde, contre Annoir S., devait aboutir à une mise en examen en mars 2019, affirme JeremStar dans son livre. Mais l’intéressé, qui a déménagé entre-temps, n’a jamais reçu de convocation, explique-t-il au Monde. Le jeune homme déclare aujourd’hui s’en vouloir d’avoir mêlé la star à ces accusations. « J’attends que justice soit faite concernant Pascal Cardonna. Mais ce qui m’importe le plus à l’heure actuelle, c’est que JeremStar comprenne bien que je regrette les propos que j’ai tenus, et que si je pouvais revenir dessus, je le ferais. »
Jérémy Gliscon a également porté plainte contre Anis Zitouni, alias « Aqababe », qui avait été à l’origine du déclenchement de l’affaire sur les réseaux sociaux, pour injures, injures homophobes, harcèlement et atteinte à la vie privée. « Je regrette la forme, comment j’ai parlé, mais le fond reste le même, réagit l’intéressé. Je regrette juste ma vulgarité. » Aqababe a été mis en examen le 8 janvier pour injures, injures homophobes et diffamation.
En février, la plainte pour atteinte à la vie privée a quant à elle fait l’objet d’un rappel à la loi et été classée sans suite, la vidéo pornographique diffusée par Anis Zitouni sur Twitter ayant été initialement mise en ligne par JeremStar lui-même, qui s’est constitué partie civile. Par ailleurs, l’ancien chroniqueur de C8 prévoit de déposer le 4 avril une nouvelle plainte pour injures et diffamation, à la suite de récents tweets virulents publiés par Aqababe.
Enfin, l’avocate de JeremStar explique avoir porté plainte à Nîmes contre Pascal Cardonna, qui s’est rendu coupable selon la star de Snapchat de harcèlement téléphonique au moment de l’éclatement de l’affaire. Il est visé pour harcèlement et abus de confiance – une plainte dont Christophe Dubourd, avocat du principal accusé, dit ne pas avoir eu connaissance. JeremStar, lui, ne désespère pas d’être un jour blanchi. « L’administration judiciaire est lente, mais justice sera faite », conclut-il dans son livre.