Woodstock, unique à jamais
Woodstock, unique à jamais
Par Catherine Pacary
Des émissions sur les ondes pour revivre les moments qui ont bâti le mythe du festival.
Lors du festival de Woodstock, le 14 août 1969 à Bethel (New York). / AP
Il n’y aura donc pas de Woodstock 2019. Michael Lang, co-organisateur de l’événement comme il l’a été du Woodstock originel, l’a annoncé le 30 juillet. Lui qui sut, en 1969, surmonter les obstacles et réaliser des « miracles », jette l’éponge, comme un symbole. Une raison supplémentaire, si tant est qu’il en fallait une, pour plonger dans l’ambiance musicale de l’époque, grâce à une riche programmation estivale. De « Woodstock. Very Good Trip », série podcast de 9 épisodes sur France Inter présentée par Michka Assayas, à « Woodstock, l’éternel été », enregistrée en direct sur France Culture par Elodie Maillot et disponible en replay. Sans oublier le film de Michael Wadleigh, rediffusé par Arte Woodstock, trois jours de paix et d’amour (1970).
« Trois jours de paix, de musique et de chaos, rectifie le journaliste Michka Assayas en introduction. Woodstock, au départ, n’avait rien d’idyllique », du concert de Joan Baez qui s’est terminé sous des trombes d’eau, à celui de Jimi Hendrix, donné alors que le public partait. Avant de raconter, d’une façon chronologique et quasi exhaustive, à l’aide de longues plages musicales, l’histoire du plus grand festival du siècle organisé en plein air.
La journaliste Elodie Maillot choisit, elle, une présentation plus thématique, qui s’inscrit dans la série « Faire tomber les murs » de France Culture. Avec moins de morceaux retransmis dans leur intégralité, deux fois moins de temps (5 x 55 min), mais de nombreux témoignages originaux, elle décline : « 1. Rêver une autre route », « 2. Vivre un autre monde », « 3. Faire tomber les portes de la perception », « 4. Woodstock, hors les murs » et « 5. Woodstock hors le temps ». Deux tons pour deux approches complémentaires, qui convergent inconsciemment vers la même conclusion.
Les grands absents ne sont pas oubliés : les Doors, qui ont refusé de participer ; les Beatles, qui n’ont pas joué en concert depuis 1966 ; les Stones, jugés trop violents par les organisateurs…
Les deux radios rappellent également le contexte historique, après le massacre des étudiants par l’armée à Mexico [octobre 1968] , les assassinats de Martin Luther King [4 avril 1968] et de Robert Kennedy [5 juin 1968], la guerre du Vietnam… Et le besoin d’utopie qui en a résulté. Une conjonction qui explique l’incroyable succès de la manifestation : « 540 000 jeunes Américains sont dans le bourbier vietnamien quand 500 000 migrent vers Woodstock », résume Elodie Maillot.
Un « Soul Sacrifice » hallucinant et halluciné
Musicalement, France Inter propose l’offre la plus riche, consacrant 6 épisodes aux trois jours de concert. Impossible dès lors de mentionner tous les « moments uniques à l’origine du mythe ». Citons l’ouverture par Richie Havens sur Freedom, répété à l’envi, Country Joe McDonald scandant F.U.C.K. seul en scène, Joe Hill, de Joan Baez… Incontournable également Carlos Santana, qui, persuadé que sa guitare se transforme en serpent, s’agrippe à elle dans un Soul Sacrifice hallucinant et halluciné ; Janis Joplin chantant un Summertime, d’autant plus émouvante que l’artiste n’a plus qu’un an à vivre ; Sly and the Family Stone transportant le public au son de « Higher ! and Higher ! » (leitmotiv de I Want To Take You Higher) ; Joe Cocker, une des nombreuses révélations de ces trois jours, ne serait-ce que pour With a Little Help From My Friends ; avant l’emblématique hymne américain distordu à la guitare électrique par Jimi Hendrix : quatre minutes de plaisir dont deux de larsens.
Au fil des heures d’écoute naît imperceptiblement le sentiment de vivre quelque chose qui n’existera plus. Une impression confortée lorsque Elodie Maillot aborde l’héritage de Woodstock, en commençant par le concert gratuit d’Altamont près de San Francisco en décembre 1969, à l’initiative des Rolling Stones (une catastrophe), puis les Vieilles Charrues, premier festival hexagonal « les pieds dans la boue ». Elle cite aussi le Festival panafricain d’Alger de juin 1969, avec Nina Simone, Miriam Makeba et Archie Shepp.
De même lorsqu’elle évoque sa descendance : Woodstock 2, en 1994, et Woodstock 3, en 2009. Seules les Rave Parties des années 1990 semblent, un temps, perpétuer la tradition, en réunissant en une nuit et en un même lieu (sans téléphone portable et sans autorisation) des milliers de « tufeurs ». Aujourd’hui, le Burning Man, surgi une semaine par an du désert du Nevada, autour d’une ville éphémère, rivalise avec le festival californien de Coachella, pour le titre de « Woodstock du XXIe siècle ». Actant de fait l’édition de 1969 comme unique.
Woodstock, l’éternel été, France Culture, produit par Elodie Maillot, réalisé par Jean-Christophe Francis,(5 x 55 min), à réécouter ici.
Woodstock. Very Good Trip, réalisé par Marie-Hélène Fauquet, sur France Inter et RTBF (9 x 49 à 52 min) Et en podcast.
Les 50 ans du festival de Woodstock, 4 épisodes sur RFI, par Joe Farmer.
Woodstock, le film, de Michael Wadleigh. Rediffusé sur Arte le 16 août à 22 h 50 et le 25 août à 13 h 55.