Serge Aurier, lors d’un entraînement à Doha, le 28 décembre 2015. | KARIM JAAFAR / AFP

A l’aune de ses solides prestations du moment, Serge Aurier s’attendait à multiplier les sprints sur son flanc droit, mardi 16 février, lors de la venue des Londoniens de Chelsea au Parc des Princes, en huitième de finale aller de Ligue des champions. Or l’arrière latéral ivoirien du Paris-Saint-Germain (PSG) a été mis à pied « à titre conservatoire », à deux jours de ce match déterminant, par Nasser Al-Khelaïfi, le président du club de la capitale. Salarié d’une institution qui tend à verrouiller sa communication, le joueur de 23 ans a été sanctionné pour des propos insultants tenus à l’égard de son entraîneur Laurent Blanc. Celui-là même qui a fait de l’ex-défenseur de Toulouse un titulaire en puissance depuis l’entame de la saison et qui est responsable de son recrutement – d’abord sous la forme d’un prêt à l’été 2014 – par les dirigeants du PSG.

« C’est une fiotte ! » C’est ainsi que l’international ivoirien (vainqueur en 2015 de la Coupe d’Afrique des nations avec les Eléphants) a qualifié le coach parisien lors d’un chat vidéo avec Mamadou Doucouré, son ex-coéquipier au centre de formation du Racing Club de Lens. Ce dernier a utilisé l’application mobile Periscope, lancée en mars 2015 par Twitter pour diffuser une vidéo en direct.

Lors de cette séance de questions/réponses, Serge Aurier a raillé plusieurs de ses partenaires, dont le buteur du PSG Zlatan Ibrahimovic et son gardien remplaçant Salvatore Sirigu. Au risque de faire imploser le vestiaire parisien. « J’accepte toutes les sanctions. Je regrette sincèrement. J’ai fait une grosse connerie », a déclaré le joueur, penaud, au micro de BeIN Sports. D’une voix fluette, il a assuré assumer « toutes les conséquences » de ses propos.

Tempérament éruptif

Donnant l’impression de jouer avec le feu sur les réseaux sociaux, Serge Aurier avait été suspendu trois matchs par l’Union des associations européennes de football (UEFA) en mars 2015. Sur son compte Facebook, il avait traité de « sale fils de pute » le Hollandais Björn Kuipers, l’arbitre du match Chelsea-PSG, lors du huitième de finale retour de Ligue des champions. L’homme en noir avait notamment expulsé Zlatan Ibrahimovic lors de cette rencontre anxiogène, qui avait scellé la qualification des Parisiens pour les quarts de finale.

Serge Aurier, qui a passé son adolescence à Sevran (Seine-Saint-Denis), a connu une rapide ascension à Lens (2009-2012). En 2014, Le Parisien faisait savoir que le joueur avait « oublié de payer ses impôts » lors de son passage chez les Sang et Or et s’était entouré, depuis, de   « solides conseillers financiers ».

Sous la houlette de l’entraîneur toulousain Alain Casanova, l’Ivoirien prend une nouvelle envergure dans la Ville rose (2012-2014). Avec le Toulouse Football Club, il se meut en défenseur généreux et incisif sur les duels. Réputé pour son tempérament éruptif et sa capacité à récolter les cartons, il est néanmoins élu meilleur arrière droit de la Ligue 1 en mai 2014. Les qualités de ce « guerrier » véloce et percutant attirent rapidement l’œil de Laurent Blanc et de son staff. Auteur de bonnes prestations avec la sélection ivoirienne lors du Mondial au Brésil, le défenseur aux cuisses impressionnantes est prêté avec option d’achat au PSG. Nasser Al-Khelaïfi le qualifie alors « d’immense espoir du football mondial, courtisé par les plus grands clubs ».

« Je m’excuse vraiment auprès du coach »

S’il a vécu une première saison difficile dans la capitale, Serge Aurier s’est progressivement imposé dans le onze type du PSG, reléguant sur le banc de touche le latéral hollandais Gregory Van der Wiel. Vitesse, apport offensif, puissance : l’Ivoirien faisait l’unanimité dans le vestiaire du PSG depuis plusieurs mois. « L’exemple de Serge montre à tout le monde que lorsqu’on se donne les moyens de réussir, beaucoup de choses deviennent possibles », déclarait Laurent Blanc à l’été 2015.

« Je m’excuse vraiment auprès du coach. Il a fait beaucoup pour moi, m’a permis d’être dans ce collectif-là, sans doute l’un des meilleurs au monde », a confié à L’Equipe Serge Aurier, à l’annonce de sa mise à l’écart pour une durée indéterminée. Lui qui a clairement sapé l’autorité de Laurent Blanc − tout juste prolongé jusqu’en 2018 par les dirigeants qataris − dans son chat vidéo.

Fragilisé, l’entraîneur du PSG a reçu le soutien de ses pairs. « Le PSG va devoir gérer une crise qui arrive à un moment important, venant d’un joueur qui n’était pas grand-chose avant d’arriver à Paris, et qui était au contact des plus grands joueurs, parmi les meilleurs européens et d’un grand entraîneur, a estimé Christophe Galtier, le coach de l’AS Saint-Etienne. J’espère qu’il ne sera plus au contact de personne ! »

« Mon plus grand souhait est qu’on fasse un très bon résultat mardi, a glissé Serge Aurier, dont les intérêts sont gérés par l’agent Stéphane Courbis, le fils de l’entraîneur rennais. Je sais que j’ai fait quelque chose de grave, mais j’ai envie que cette histoire-là soit vite oubliée. » Nul doute que Laurent Blanc devra évoquer cette « histoire » en conférence de presse, à la veille de la réception de Chelsea au Parc.