Le stade olympique de Rio de Janeiro, le 25 avril. | RICARDO MORAES / REUTERS

Aux Jeux olympiques de Sydney, en 2000, le Brésil n’avait emporté aucune médaille d’or. Quatre ans plus tard, à Athènes, il en raflait quatre, puis trois à Pékin et à Londres. Jamais le pays n’a dépassé le score de 17 médailles en or en argent ou en bronze. Désormais hôte des Jeux, le pays espère figurer dans le top 10 avec un objectif de 23 et 30 médailles de toutes les « couleurs ». « Le Brésil est fait pour le sport », assure le ministre des sports, Ricardo Leyser. Depuis plus de quatre ans, le pays entraîne, repère et finance des futurs champions avec des équipements plus sophistiqués, afin de faire oublier les stéréotypes qui n’associent le Brésil qu’au « futebol » et à la samba.

Mais compte tenu des turbulences politiques que traverse le pays, le ministre ne sera sans doute plus en poste lorsque la flamme olympique arrivera le 5 août au stade Maracana de Rio de Janeiro. La présidente, Dilma Rousseff, ne sera probablement pas non plus dans les tribunes ce jour-là, éloignée temporairement du pouvoir à la suite de la procédure de destitution lancée contre elle.

« Les ministres vont et viennent, vous savez. A ce stade, les jeux ne dépendent plus des dirigeants politiques », assure M. Leyser. « La préparation pour les Jeux olympiques est maintenant entrée dans une phase très opérationnelle où ce genre de questions politiques a beaucoup moins d’influence sur l’organisation des JO qu’à d’autres phases », a confirmé le Comité international olympique (CIO) le 18 avril, au lendemain d’un vote des députés rendant très probable la destitution de la présidente.

Le symbole restera. La « ville merveilleuse » a été désignée pour accueillir les Jeux en octobre 2009, à un moment où le pays dirigé par le charismatique président Luiz Inacio Lula da Silva offrait toutes les promesses. Sept ans plus tard, les Jeux olympiques, qui coûteront quelque 39,1 milliards de reais (9,7 milliards d’ euros), semblent à contretemps.

Confronté à une sévère crise économique, pénalisé par la chute des prix du pétrole, l’Etat de Rio, surendetté, peine à payer ses fonctionnaires, et sa capitale prend des allures de ville en faillite. Le monde des affaires et de la politique est secoué par un tentaculaire scandale de corruption lié au groupe public Petrobras. Enfin, l’effroyable épidémie du virus Zika, qui provoque de graves malformations fœtales, effraie les touristes.

A cent jours de la cérémonie d’ouverture, le 5 août, le retard dans la construction et la mise en place des infrastructures, source d’angoisse quasi habituelle du comité olympique organisateur, n’est plus, de loin, le seul défi que Rio devra surmonter.

Des équipements qui souffrent du « jeito brasileiro »

Eduardo Paes, maire de Rio de Janeiro depuis 2009, le martèle presque chaque semaine. « Tout sera prêt en temps, en heure et sans surfacturation ». Sûr de lui, le Carioca plaisante évoquant le « jeito brasileiro », cette façon de faire à la brésilienne qui consiste à tout boucler à la dernière minute. D’abord affolées, les équipes du Comité international olympique semblent avoir accepté les méthodes brésiliennes.

Mais le stade vélodrome donne des sueurs froides. Il est encore en chantier et les événements tests, prévus entre le 30 avril et le 1er mai ont dû être annulés, remplacés par des séances d’entraînement du 25 au 27 juin. « La pose des planches de pin de Sibérie a pris douze jours de retard, parce que nous avons eu des problèmes logistiques lors du transport du bois », a expliqué Mario Andrada, porte-parole du comité Rio 2016. Une explication qui ne parvient pas à rassurer Brian Cookson, président de l’Union cycliste internationale.

Effondrement meurtrier d’une piste cyclable à Rio
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La propreté de la baie de Guanabara laisse à désirer

En se promenant sur les eaux de la baie de Guanabara, où auront lieu les épreuves nautiques, il n’est pas rare que le biologiste Mario Moscatelli croise sur son chemin quelques sacs en plastique, des vieux téléviseurs, un sofa… Fervent défenseur de la nature, le scientifique se désole que la ville n’ait pas profité des JO pour entreprendre un profond nettoyage de la baie. L’Etat de Rio a entrepris des travaux, notamment dans la Marina da Gloria, où des écobarrages et un système de pompage ont été installés afin d’empêcher que les eaux usées ne se déversent dans la baie. « Mais ce n’est presque rien », balaie M. Moscatelli. « Les politiciens n’ont aucun intérêt pour le sujet », se désole-t-il.

A écouter les autorités, les médias tordent la réalité, montrant des zones polluées très éloignées de l’endroit où auront lieu les épreuves. Les compétitions de voile se dérouleront entre le Pain de Sucre et le pont reliant Rio à Niteroi, souligne le secrétariat chargé de l’environnement de l’Etat de Rio.

Un métro de retard

Les JO ont été l’occasion de mener d’importants chantiers de rénovation de la ville où se bâtissent des pistes de tramways, où se creusent des lignes de métros. Le quartier autrefois décrépi et défiguré par un viaduc appelé « la périmétrale », est désormais une place dominée par le spectaculaire Museu do Amanha (« Musée de demain »), de l’architecte Santiago Calatrava Valls, où les Cariocas aiment se promener. Les chantiers avancent. Mais pas tous.

La ligne 4 du métro, soit 14 kilomètres de rails qui doivent permettre de relier en treize minutes les plages d’lpanema et de Copacabana, où se dérouleront les épreuves de beach-volley au parc olympique de Barra da Tijuca, et le centre-ville en à peine une demi-heure, a souffert de diverses perturbations, notamment liées au financement (le coût du chantier est estimé à 9,7 milliards de reais). Sans cette connexion, la liaison menace d’être longue (plus d’une heure), épuisante, et de surcharger un trafic automobile déjà dense.

Une fois encore, les autorités sont confiantes. « Les galeries entre Barra da Tijuca et Ipanema, sont totalement creusées », assure le secrétariat chargé des transports de l’Etat de Rio. « Les travaux d’implantation sont réalisés à 93 %. » La ligne sera inaugurée en juillet, assure-t-on.

La menace Zika, H1N1 et terroriste

Quelque 91 387 cas probables de contamination au virus Zika ont été pour la première fois officiellement dénombrés au Brésil – où l’épidémie de chikungunya a parallèlement connu une forte hausse par rapport à l’année dernière – a annoncé mardi 26 avril le ministère de la santé brésilien. L’épidémie de Zika a suscité une sorte d’hystérie mondiale. Elle a poussé les touristes à annuler leurs voyages au Brésil et inquiète les athlètes.

« Notre préoccupation, c’est davantage la grippe H1N1 », souligne pourtant le ministère de la santé. Rio a déjà recensé plus de 400 cas de grippe aviaire, dont deux décès. Dès le 30 avril sera lancé un programme de vaccination des populations à risque : personnel de santé, d’hôtellerie, bébés, personnes âgées et femmes enceintes.

Dernière préoccupation, le 14 avril, l’agence de renseignements brésilienne a confirmé l’existence d’une menace terroriste. La vague d’attentats en Europe et aux Etats-Unis a changé la donne. L’arrivée de dirigeants de pays attaqués par l’organisation djihadiste Etat islamique fait du Brésil une cible potentielle. « Depuis le début notre préoccupation numéro un, c’est le terrorisme », affirme José Mariano Beltrame, secrétaire d’Etat chargé de la sécurité de Rio. Et d’ajouter : « On est prêt, les Jeux pourraient commencer lundi prochain. »