Après un lancement numérique, le manga « Platinum End » sort dans les librairies françaises
Après un lancement numérique, le manga « Platinum End » sort dans les librairies françaises
Par Pauline Croquet
La troisième collaboration des auteurs à succès Ohba et Obata, créateurs de la série culte « Death Note » est publiée à compter du 25 mai.
Qui connaît les mangas Death Note et Bakuman – les deux premières séries à succès du duo Tsugumi Ohba (scénario) et Takeshi Obata (dessin) – devinera sans peine que la nouvelle œuvre de leurs auteurs est très attendue par les fans… et les libraires : trois millions de Death Note et Bakuman se sont déjà écoulés en France. Le premier tome de ce nouveau shonen, manga destiné aux adolescents et jeunes adultes, sort en France ce mercredi 25 mai, et le deuxième volume suivra fin août.
Dans ce thriller surnaturel, les lecteurs suivent les aventures de Mirai, un adolescent suicidaire sauvé un jour par Nasse, un ange aux traits de jeune fille. Ce dernier lui fait cadeau de pouvoirs spéciaux et ne lui révélera qu’une fois ce don irréversible accepté, son véritable dessein. Au paradis, Dieu se meurt. Nasse est descendu sur Terre avec douze autres séraphins et chacun a choisi un humain qui concourra pour le remplacement de Dieu.
Dans Platinum End, treize humains entrent en compétition pour remplacer Dieu. | Shueisha - Kazé
Difficile de ne pas noter la proximité de l’intrigue avec celle de Death Note, série dans laquelle le héros, un lycéen, se voit confier par un dieu de la mort un cahier aux pouvoirs surnaturels, lui permettant de faire justice lui-même et le conduisant à une chasse à l’homme effrénée avec la police. Takeshi Obata conçoit d’ailleurs Platinum End « comme s’il s’agissait de la face B de Death Note ».
Le bonheur, la justice et Dieu
De son côté, Tsugumi Ohba, le scénariste, défend : « Même si je savais qu’on n’échapperait pas à la comparaison, c’est justement ce défi que j’avais envie de relever. » Il détaille, d’ailleurs, les divergences : « A la différence du personnage principal de Death Note, dans Platinum End, Mirai ne vit pas dans un environnement doré. Par ailleurs, il n’a pas envie de tuer des gens. J’ai le sentiment que Platinum End s’interroge sur la notion du bonheur, là où Death Note nous questionne sur la notion de justice. Si Death Note se présente comme un manga shônen marginal, j’aimerais que Platinum End s’inscrive plutôt dans le genre shônen classique. »
Effectivement, la comparaison entre les héros s’arrête dès les premières pages. Les lecteurs de Death Note auront vibré pour la sagacité et la détermination de Light qui, dès le début, redouble d’intelligence pour échapper à son ennemi, le jeune détective L. Au contraire, dans Platinum End, le personnage principal est relativement passif. L’attention se reporte alors sur la stratégie de l’ange qui a précipité Mirai dans cette course à « deviens Dieu ».
Les premiers chapitres comportent un retournement de situation suffisamment efficace pour avoir envie de poursuivre dans le deuxième tome. Au risque de perdre toutefois le lecteur avec un fil conducteur jalonné de nombreuses règles du jeu. L’arrivée de l’ennemi de Mirai, un concurrent qui se déguise en super-héros de sentai, séries traditionnelles japonaises, sauve à peine de l’ennui dans lequel nous plonge le héros à qui l’on a envie de crier « bouge-toi un peu ».
Mirai et son ange Nasse dans le premier tome de Platinum End. | Shueisha - Kazé
Le bien, le mal et l’humain
Pour autant, comme dans leur précédente collaboration et dès les premiers chapitres de Platinum End, Ohba et Obata questionnent habilement l’attitude des humains face au bien et au mal, leur façon de se comporter et leurs choix quand ceux-ci détiennent du pouvoir. Et de révéler leurs sombres désirs parfois. « Je ne pense évidemment pas que tous les hommes sont gentils et bienveillants. Néanmoins, si c’était le cas, le monde serait-il en paix ? Les inégalités disparaitraient-elles ? » s’interroge Ohba, qui complète : « En général, si des événements dans l’actualité me font réfléchir, je les garde dans un coin de mon esprit. Il n’y a pas de philosophie personnelle et particulière. Je souhaite au contraire montrer aux lecteurs qu’il existe toutes sortes d’approches et de manières de penser par rapport à des faits donnés. »
Au cœur de l’histoire de Platinum End, une question que s’est posée Ohba : pour un homme, qu’est-ce que le bonheur ? « Je me suis dit que c’était sûrement de pouvoir voler dans le ciel et d’avoir la chance de connaître un amour réciproque », confie-t-il.
Une planche du manga « Platinum End ». | Shueisha - Kazé
L’éditeur japonais Shueisha réunit donc une nouvelle fois le duo. Sur papier seulement, puisque à la différence de leurs héros de Bakuman, une histoire de jeunes mangakas, les deux sensei ne partagent pas le même atelier et collaborent par l’intermédiaire de leur contact éditorial au Japon. « Le rythme est très soutenu, Obata dessine jusqu’à 70 pages par mois, ce qui est beaucoup. Il se permet de compléter des séquences entières sur les propositions d’Ohba », explique Pierre Valls, le directeur éditorial de Kazé – l’éditeur français –, ce qui permet un rendu homogène et rythmé sur des planches superbement exécutées et détaillées.
Parutions française et japonaise coordonnées
Les premières pages de Platinum End sont parues début novembre 2015 dans le magazine nippon Jump Square. Si le titre ne se hisse pas en tête des ventes de mangas dans l’archipel, largement monopolisées par des séries comme One Piece, il s’assure un succès constant. En France, Death Note et Bakuman ont cumulé 3 millions d’exemplaires vendus au bénéfice des éditions Kana. Aujourd’hui, Kazé, qui emporte la nouvelle licence, propose de façon inédite une parution des chapitres en France sous format numérique, coordonnée avec celle au Japon dans le mensuel imprimé.
Si le nombre de chapitres vendus en ligne est plutôt faible, Kazé estime l’opération réussie car Platinum End fait partie des meilleures ventes BD numériques. « C’est le plus gros titre de toute l’histoire de Kazé », assure Pierre Valls. Un premier tirage à 50 000 exemplaires est prévu, soit plus du double habituel. La Fnac disposera, sur son initiative, de 2 000 tomes 1 à couverture spéciale pour le lancement, ce qui a indigné les défenseurs des librairies indépendantes. Au Japon, aucune adaptation en dessin animé n’est prévue à ce jour, ce qui ne devrait pas tarder si la série connaît un succès sans équivoque.
Platinum End, de Tsugumi Ohba (scénario) et Takeshi Obata (dessin) tome 1, sortie le 25 mai ; tome 2 à paraître le 24 août, 6,99 euros.