Des militantes de #BringBackOurGirls, le 18 mai à Abuja. | AFOLABI SOTUNDE / REUTERS

« Son nom est Serah Luka, elle figure au numéro 157 sur la liste des filles enlevées. On pense qu’il s’agit de la fille du pasteur Luka. » D’après le colonel Sani Usman, porte-parole de l’armée nigériane, l’adolescente serait la deuxième rescapée parmi les 219 lycéennes de Chibok kidnappées par Boko Haram a avoir été retrouvée.

Elle fait partie du groupe de 97 femmes et enfants libérés jeudi 19 mai lors d’une opération conjointe de l’armée et de miliciens à 11 heures, aux alentours de Damboa, dans l’Etat de Borno (nord-est). Selon l’armée, elle a été prise en charge médicalement dans une caserne de Biu.

D’autres otages dans la forêt de Sambisa

Quelques heures plus tôt, Amina Ali, l’autre rescapée de Chibok découverte mardi par des milices locales, arrivait à Abuja par avion depuis Maïduguri, la capitale de l’Etat de Borno, avec sa mère pour rencontrer le président Muhammadu Buhari. Ce dernier s’est engagé à faire « tout ce qu’il peut pour sauver d’autres jeunes filles de Chibok ».

Le 14 avril 2014, 276 d’entre elles avaient été kidnappées par le groupe islamiste Boko Haram. Cinquante-sept avaient réussi à s’échapper dans les heures suivant leur rapt, mais on était sans nouvelles des autres captives jusqu’à ce qu’Amina Ali soit retrouvée.

Selon des responsables locaux, la jeune fille, aujourd’hui âgée de 19 ans, a affirmé à sa famille que la plupart des autres victimes se trouvaient toujours dans la forêt de Sambisa, mais que « six d’entre elles sont déjà mortes ». L’ancienne réserve naturelle, qui s’étend sur 60 000 km2 et présentée comme l’un des bastions de Boko Haram, est ratissée par l’armée depuis plusieurs semaines.

Des observateurs ont affirmé avoir repéré les filles de Chibok sur des images satellites de la zone fournies par les Etats-Unis et la Grande-Bretagne. Mais l’ancien ambassadeur britannique au Nigeria, Andrew Pocock, avait déclaré en mars au Sunday Times que les militaires nigérians n’avaient rien fait de ces renseignements.

Le président nigérian Muhammadu Buhari tenant dans ses bras le bébé d’Amina Ali (en orange), première rescapée de Chibok retrouvée dans la forêt de Sambisa, le 19 mai. | FLORIAN PLAUCHEUR / AFP

2 000 enlèvements

Après avoir été découverte, Amina Ali a été transportée à Maïduguri avec son bébé de 4 mois, Safiya, dans un hélicoptère militaire accompagnée d’un homme qu’elle présente comme son mari. La jeune fille, très mince, a les traits tirés. Sur l’une des photos transmises par l’armée, son « mari », que l’armée considère comme « le terroriste présumé de Boko Haram Mohammed Hayatu », est assis sur un lit d’hôpital et tient l’enfant dans ses bras. Selon le colonel Usman, M. Hayatu « fait l’objet d’une enquête approfondie au Centre conjoint de renseignements » et il est « bien traité ».

Depuis 2009, Boko Haram est tenu responsable de l’enlèvement d’au moins 2 000 personnes, dans une insurrection qui a fait quelque 20 000 morts. Certaines des otages ont été mariées de force et transformées en esclaves sexuelles. De jeunes hommes ont aussi été conscrits de force.

Des ONG dénoncent régulièrement l’absence de programmes de réinsertion des otages de Boko Haram, dont plusieurs centaines ont déjà été libérées ces derniers mois. Des experts de l’ONU avaient souligné en janvier « un besoin urgent et pressant de mesures concrètes pour assister ces femmes et ces enfants stigmatisés, ostracisés et rejetés » par une société généralement très conservatrice.

Boko Haram : « Les ex-otages subissent une double peine »
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